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critiques et comptes rendus
Académie Princesse Grace, Monaco : «Glazounov / Horizons / Traverses»

21 juin 2019 : Gala de fin d'études de l'Académie Princesse Grace de Monaco




Le gala de l'Académie Princesse Grace, traditionnelle conclusion d'une année d'étude au sein de l'institution monégasque, demeure un événement chorégraphique d'une qualité exceptionnelle. D'année en année – et cela fait quatre ans maintenant que nous le suivons –, il vient confirmer l'excellence de l'école – de son collectif comme de ses individualités –, dans une programmation stimulante, au contenu toujours renouvelé. L'édition 2019, en trois parties, s'est avérée de ce point de vue particulièrement riche, avec un premier acte placé sous le signe d'Alexandre Glazounov, suivi d'une création de Claude Brumachon, Les Horizons suspendus, puis de Traverses, un florilège de chorégraphies de Jean-Christophe Maillot, réarrangées pour l'occasion.

La première partie réunit, «autour de Glazounov» - tel en est l'intitulé -, une série de dix courts tableaux créés sur mesure pour les élèves de l'Académie par les chorégraphes attitrés - professeurs aussi pour certains - de l'Académie : Michel Rahn, Francesco Nappa, Julien Guérin, Eugenio Buratti, Roland Vogel. Notons d'abord le choix judicieux, comme ferment musical, d'extraits tirés d’œuvres de Glazounov, compositeur à la notoriété sans doute moins grande que celle de Tchaïkovski, mais au fond tout aussi important dans le parcours « symphonique » du dernier Petipa, celui des années 1890 et de Raymonda bien sûr, mais aussi celui, passablement oublié, des années 1900 et, notamment, des Ruses d'amour (dont la partition fut publiée sous le titre de Lady Soubrette), dont le programme utilise pas moins de trois extraits. Les pièces qui composent cette première partie, d'une grande variété stylistique, soulignent l'impressionnante versatilité des élèves - à coup sûr l'une des «marques de fabrique» de l'Académie Princesse Grace -, qui ne peut que frapper d'emblée le spectateur.

gala princesse grace 2019


Le style académique, avec ses ensembles brillants aux lignes impeccables, est ainsi mis à l'honneur dès l'ouverture, ainsi que dans les deux tableaux finaux, confiés à Michel Rahn, qui maîtrise admirablement l'exercice, lui conférant du reste une petite touche balanchinienne bien plaisante. En contrepoint, les autres pièces mettent davantage en valeur la force des individualités... à commencer par le solo concocté par Francesco Nappa pour MacKenzie Brown, véritable star - et l'on n'aime guère se payer de mots - de la soirée.
(L')Âme passée laisse ainsi éclater la personnalité lumineuse et la maturité exceptionnelle de cette danseuse, dont l'expressivité se donne finalement à voir de manière plus probante dans ce spectacle à l'éclectisme bien tempéré que dans le cadre d'un Prix de Lausanne qu'elle avait pourtant remporté haut la main - mais sans grosse prise de risque - il y a quelques mois. Le même Francesco Nappa signe d'ailleurs une autre pièce marquante, Orientale, d'après la suite pour quatuor à cordes op. 35, qui exalte de belle façon la virtuosité masculine. Très jolie réussite aussi pour Mannequins, chorégraphié par Eugenio Buratti, qui propose de son côté une variation collective assez drôle sur le thème bien connu – et coppélia-esque - de la poupée mécanique.

gala princesse grace 2019


Le célèbre duo de Claude Brumachon,
Les Indomptés, avait été dansé par deux élèves de l'Académie lors du gala de fin d'études en 2017. Le chorégraphe récidive cette année avec une création à part entière, Les Horizons suspendus, au titre un tantinet mystérieux, pour quatre couples de danseurs - trois couples fille-garçon et un couple de garçons. On reconnaît sans peine dans cette pièce son écriture très «physique», où s'entremêlent courses, chutes, portés et contacts tenant presque des arts martiaux. Les choix musicaux – d'Hildegarde de Bingen à Haendel, en passant par les sonorités électro-acoustiques plus contemporaines de Bruneau Billaudeau – contrastent singulièrement avec la brutalité de la gestuelle, dans laquelle se fondent de manière impressionnante tous ces jeunes danseurs. S"y distinguent notamment Mackenzie Brown – de nouveau! – ou encore Marco Masciari, un jeune danseur captivant, à la danse d'une grande intensité.

gala princesse grace 2019


La dernière partie confirme l'orientation très «chorégraphique» du gala de l'Académie Princesse Grace, ainsi que ses liens – un peu plus qu'administratifs - avec les Ballets de Monte-Carlo.
Traverses réunit ainsi cinq extraits de pièces de son directeur-chorégraphe, Jean-Christophe Maillot, datant de différents époques : on y retrouve par exemple le récent Abstract Life, sur une musique de Bruno Mantovani (on est d'ailleurs ravi de redécouvrir le solo dansé par Mackenzie Brown au Prix de Lausanne dans sa réalité chorégraphique originelle – un duo), ou le beaucoup plus ancien Vers un pays sage, sur une partition efficace - et très «philglassienne» - de John Adams, Fearful Symmetries. A partir de ces extraits, Maillot a recomposé un vrai ballet, ménageant des transitions entre ses différents tableaux - ensembles, duos ou solos. Si l'Académie, nous l'avons souvent dit, n'a pas forcément vocation à fournir les effectifs des Ballets de Monte-Carlo (il arrive certaines années que des élèves rejoignent ses rangs, comme Katrin Schrader il y a peu, mais cela n'a pas force de loi), la familiarité des élèves avec le « style » Maillot - la liberté des bras et du haut du corps, la rigueur des pointes - apparaît cependant d'éclatante manière dans cette ultime partie. Là est d'ailleurs le grand plaisir de cet événement annuel, qui se donne beaucoup moins à voir comme un gala d'école que comme un vrai spectacle professionnel, interprété par autant de solistes en puissance.


Bénédicte Jarrasse © 2019, Dansomanie




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gala princesse grace 2019
Album-photo (cliquer sur la mosaïque)



Première partie -  «Autour de Glazounov»

Polonaise

Musique : Alexandre Glazounov (Scène de ballet, op. 52)
Chorégraphie : Michel Rahn

(L)Ame passée
Musique : Alexandre Glazounov (Méditation en Ré Majeur, op. 32)
Chorégraphie : Francesco Nappa

Au-delà de nous deux I
Musique : Alexandre Glazounov (Chant du Menestrel, op. 71)
Chorégraphie : Julien Guérin

Au-delà de nous deux II
Musique : Alexandre Glazounov (Raymonda, Acte III, variation)
Chorégraphie : Julien Guérin

Mannequins
Musique : Alexandre Glazounov (Lady soubrette, op. 61)
Chorégraphie : Eugenio Buratti

Désir
Musique : Alexandre Glazounov (Zhelaniye, op. 60 n°2)
Chorégraphie : Roland Vogel

Muddled
Musique : Alexandre Glazounov (Lady soubrette, op. 61)
Chorégraphie : L. Ferro, O. Tweedy, J. Klein, A.C. Meyer

Orientale
Musique : Alexandre Glazounov (Suite pour quatuor à cordes, op. 35)
Chorégraphie : Francesco Nappa

Valse
Musique : Alexandre Glazounov (Valse de concert n°2, op.51)
Chorégraphie : Michel Rahn

Polonaise
Musique : Alexandre Glazounov (Scène de ballet, op. 52)
Chorégraphie : Michel Rahn

Polonaise
Musique : Alexandre Glazounov (Lady soubrette, op. 61)
Chorégraphie : Michel Rahn

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Deuxième partie - 
«Les Horizons suspendus»

Musique : Georg Friedrich Haendel, Hildegard von Bingen, Bruneau Billaudeau
Chorégraphie : Claude Brumachon

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Troisième partie - 
«Traverses»

Dov'e la luna
Musique : Alexandre Scriabine
Chorégraphie : Jean-Christophe Maillot

Men's dance
Musique : Steve Reich
Chorégraphie : Jean-Christophe Maillot

Abstract life
Musique : Bruno Mantovani
Chorégraphie : Jean-Christophe Maillot

Opus 40
Musique : Meredith Monk
Chorégraphie : Jean-Christophe Maillot

Vers un pays sage
Musique : John Adams
Chorégraphie : Jean-Christophe Maillot


Elèves de l'Académie Princesse Grace, Monaco
Musique enregistrée


Vendredi 23 juin 2019,  Opéra Garnier, Monte-Carlo


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