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critiques et comptes rendus
Bayerisches Staatsballett (Munich)

08 mai 2009 : soirée Schläpfer - Van Manen - Sandroni
(Ballettfestwoche #3)


cambio d abito
Cambio d'abito  (chor. Simone Sandroni)

Qu’est-ce que le répertoire d’une compagnie? Comment se constitue le fonds courant qui, aux côtés des coûteuses créations et entrées au répertoire, assure à la compagnie une bonne partie de ses ressources tout en contribuant fortement à en définir l’identité et le style? Deux soirées de la Semaine du Ballet National de Bavière 2009 offrent quelques réponses à ces questions, deux soirées extrêmement différentes : la triple affiche Sandroni / van Manen / Schläpfer, jouée devant une salle qui laissait voir quelques places vides, unit à deux créations récentes une pièce désormais classique, mais qui n’est entrée au répertoire qu’en même temps que ces deux créations, dans un programme donné 13 fois en un peu plus d’un an ; La Dame aux camélias, l’un des classiques les plus populaires en Europe en général et en Allemagne en particulier, se joue devant une salle pleine jusqu’aux dernières places debout, alors que, entrée au répertoire en 1997, elle atteint sa 75e représentation avec une popularité inentamée.

severine ferrolier et tigran mikayelyan dans adagio hammerklavier
Séverine Ferrolier et Tigran Mikayelyan dans Adagio Hammerklavier  (chor. Hans van Manen)

La première des deux soirées, que nous avions déjà critiquée ici, doit son attraction auprès du grand public surtout à la présence d’Adagio Hammerklavier de Hans van Manen, qui sur la musique du mouvement lent de la sonate de Beethoven, ralenti au point d’être presque méconnaissable, a dessiné trois pas de deux conventionnels : la recherche d’une sorte d’épure absolue, au-delà des actes blancs de Petipa, au-delà même des ballets de Balanchine, aboutit à une monotonie interrompue qui laisse perplexe. On ne saurait dire ce qui a convaincu les responsables du Ballet de Bavière d’acquérir cette pièce, mais le succès relatif qu’elle obtient auprès du public témoigne de la prégnance d’une vision de la danse simplement fondée sur l’élégance, l’harmonie et l’écho d’une pureté originelle, comme hors du monde, très en-deçà des exigences artistiques de la danse contemporaine, mais également plus proche d’un cliché sur la danse classique que de sa réalité, bien moins éthérée, bien plus vivante et moderne que cette réinvention tardive.

stephanie hancox dans cambio d abito
Stephanie Hancox dans Cambio d abito  (chor. Simone Sandroni)

Les deux autres pièces au programme, bénéficiant des très beaux décors et costumes de la plasticienne Rosalie, apportent heureusement toutes les sensations qui manquent au volet central de la trilogie. Les qualités de la première, Cambio d’abito, sont largement démontrées par le fait qu’elle fait mieux que résister à une seconde vision : on ne cesse d’y découvrir des relations qu’une première vision avait pu laisser de côté, et on redécouvre avec éblouissement à quel point les couleurs vives et l’humour visuel de la pièce ne sont que la politesse des rois, offrant un premier niveau de lecture à ceux qui ne cherchent qu’un plaisant divertissement, mais travaillant au plus profond des questions d’identité.

lucia lacarra et cyril pierre dans violakonzert ii
Lucia Lacarra et Cyril pierre dans Violakonzert II  (chor. Martin Schläpfer)

Très différente visuellement, mais aussi artistiquement, la pièce de Martin Schläpfer sur le magnifique concerto pour alto de Sophia Goubaidoulina – qui bénéficie d’un accompagnement exemplaire de la part d’un orchestre que la valeur musicale de l’œuvre motive visiblement – ne révèle pas de nouvelles significations à la seconde vision ; mais, s’étant entre temps familiarisé avec l’œuvre de la compositrice russe, on peut toujours admirer à loisir la profondeur du rapport du chorégraphe à la musique qu’il a choisie. Jamais illustrative, la danse n’hésite jamais à s’inscrire en rupture avec la musique pour mieux en faire comprendre la logique interne, attirant l’attention sur ses traits marquants sans pour autant chercher à mettre de l’ordre dans le chaos musical organisé par la compositrice russe. Même si des danseurs de premier plan de la troupe participent au spectacle, Martin Schläpfer a eu toute liberté pour créer une pièce où c'est l'ensemble des danseurs qui est mis en avant, non chaque individualité : la manière dont il a su s'emparer de cette rare liberté est d'une richesse qui n'a d'égale que la manière dont les danseurs de la troupe répondent, avec fantaisie et puissance, aux exigences de la chorégraphie.




Dominique Adrian © 2009, Dansomanie


violakonzer ii
Violakonzert II  (chor. Martin Schläpfer)



Cambio d’abito
Musique : Johann Sebastian Bach
Chorégraphie : Simone Sandroni
Décors et costumes : Rosalie

Avec : Tigran Mikayelyan, Daria Sukhorukova, Martina Balabanova, Giuliana Bottino,
Petra Conti, Mia Cooper, Leonor de Távora, Ilana Werner

Adagio Hammerklavier
Musique : Ludwig van Beethoven, Sonate op. 106 "Hammerklavier", 3ème mouvement
Chorégraphie : Hans van Manen
Décors et costumes : Jean-Paul Vroom


Avec : Séverine Ferrolier , Tigran Mikayelyan, Roberta Fernandes
 Maxim Chashchegorov, Daria Sukhorukova, Marlon Dino


Violakonzert II
Musique : Sofia Goubaidoulina
Chorégraphie : Martin Schläpfer
Décors et costumes : Rosalie


Avec : Roberta Fernandes, Séverine Ferrolier, Daria Sukhorukova, Zuzana Zahradníková
Alen Bottaini, Lukáš Slavický, Tigran Mikayelyan, Marlon Dino


Bayerisches Staatsballett
Vendredi 8 mai 2009,  Nationaltheater, Munich


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