Azulynn
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Posté le: Dim Oct 04, 2009 9:39 pm Sujet du message: Nouvelles du Scottish Ballet |
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Un fil qui n'existait pas, je crois, consacré à la compagnie nationale écossaise - à l'occasion, au moins, de son 40e anniversaire !
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Scottish Ballet
40e anniversaire : Rubis / Workwithinwork / In Light and Shadow
George Balanchine / William Forsythe / Krzysztof Pastor
3 octobre 2009
Sadler's Wells, Londres
Le Scottish Ballet a quarante ans et il affichait son bonheur lors d'une inévitable tournée londonienne, en ce début de mois d'octobre, à Sadler's Wells. A l'heure où le Royal Ballet a perdu sa réputation d'antan et où d'autres troupes se taillent la part du lion au Royaume-Uni, l'Ecosse peut en effet rappeler qu'elle possède depuis longtemps sa propre troupe nationale, qui a consolidé son statut depuis l'arrivée à la direction artistique du chorégraphe Ashley Page, en 2002. A l'heure du bilan, la compagnie associe Balanchine, Forsythe et Krzysztof Pastor, présentant ainsi à la fois le répertoire néo-classique historique de la compagnie et l'une de ses créations les plus populaires, In Light and Shadow.
Le joyau le plus sanguin de Balanchine connaît un destin étrange chez certaines troupes de pedigree classique, que ce puzzle new-yorkais tour à tour divertissant et légèrement dangereux semble laisser de marbre. Le Scottish Ballet ne rencontre pas ce problème – le style résolument moderne de la compagnie lui permet de saisir l'esprit de ces Rubis, mais ceux-ci manquent à l'inverse de la précision académique qui imbue toute l'oeuvre de Balanchine. Les ports de bras des uns et des autres, en particulier, se perdent dans un flou artistique qui n'a plus grand-chose à voir avec les accents néo-classiques de la chorégraphie. Les effets géométriques implacables de cette dernière en pâtissent ; le Scottish Ballet attaque pourtant l'oeuvre avec une attitude si affirmée qu'il est difficile de leur tenir longtemps rigueur des défauts techniques. Les rôles principaux respirent la liberté et l'énergie, et même si Vassilissa Levtonova, jeune coryphée russe, n'a pas les armes pour relever les défis posés par le rôle de la grande soliste, tours ou équilibres, son expression de prédatrice et la fierté de sa cambrure n'en laissent rien transparaître.
A ses côtés, c'est une danseuse française qui explose dans les pas de deux, Sophie Martin, nommée Principal en 2008. Techniquement assurée, elle joue d'un mélange d'audace et d'ingénuité qui contraste avec la sophistication constante de la grande soliste – plus impressionnant encore, elle joue de ses courbes comme peu de danseuses classiques savent le faire. Les déhanchés et déséquilibres de la chorégraphie prennent tout leur sens visuel et musical, et sa ponctuation pleine d'esprit parachève un star turn impeccable. Adam Blyde partage son énergie dans les pas de deux, malgré quelques imprécisions, et son court galop avec le quatuor de danseurs provoque quelques rires amusés. Le petit corps de ballet féminin, aux expressions disparates, n'a quant à lui pas la même latitude pour dissimuler ses propres imprécisions, et semble collectivement en retrait sur la partition de Stravinsky.
La soirée se poursuivait avec un produit Forsythe, figure importante du répertoire de la compagnie écossaise, alors même que ses œuvres sont peu montées au Royaume-Uni. Workwithinwork, créé en 1998 pour le Frankfurt Ballett, est l'une des dernières pièces du chorégraphe qui trouve sa source (lointaine ?) dans la technique classique. On a parlé d'apaisement au sujet de ce travail au coeur du travail, dansé sur des pièces pour deux violons de Luciano Berio. Nulle composition électronique, effectivement, mais on n'en retrouve pas moins l'essence du style de Forsythe – un mouvement ininterrompu, comme improvisé, une tension et une torsion extrêmes dans chaque pose, un flot de duos qui se relaient dès que la musique s'interrompt. La décor de fond, sombre, esquisse quelques portes. Quelques passages rappellent le profond instinct théâtral du chorégraphe, qui avait créé pour le Scottish Ballet le fascinant Artifact Suite – le jeu de révérences des couples qui s'avancent vers le fond, comme des marionnettes, la présence d'une figure presque étrangère, dansée de manière électrifiante par une Diana Loosmore à la stature différente de ses collègues. La solitude est ici plus mélancolique que dans la plupart des œuvres de Forsythe, mais l'ensemble tend vers la répétition à l'infini en n'intégrant qu'ici et là des transitions significatives, dont l'écho s'éteint trop vite.
Si les danseurs entraient déjà dans le vocabulaire de Workwithinwork comme autrement plus naturel que celui de Balanchine, In Light and Shadow, la dernière œuvre au programme, créée pour la compagnie, les voit rayonnants sur scène. Le chorégraphe, Krzysztof Pastor, a expliqué qu'il s'agissait de la création la plus populaire de son répertoire, et on le comprend aisément. Humain, lumineux, le mouvement, qui intègre des références à la danse baroque et à son usage des bras, reflète avec simplicité la Suite n°3 de Jean-Sébastien Bach, précédée de l'aria des Variations Goldberg. Claire Robertson et William Smith dansent cette dernière avec délicatesse, Pastor donnant le temps à ses danseurs de mettre en relief leur relation sans que le partenariat devienne un rapport de force – la jupe d'une danseuse (Soon Ja Lee) devient ainsi l'instrument d'un jeu et d'un dialogue avec son partenaire, Gabriel Barrenengoa. L'angélique Tomomi Sato, à l'allure d'elfe, semble protégée dans les mains du danseur qui l'accompagne. Ces duos sont l'ombre de la pièce, ramenée dans la lumière par un corps de ballet extrêmement bien dirigé, qui se disperse et se réunit avec bonheur au fil des morceaux. La seule fausse note tient aux costumes, supposés évoquer les contrastes de l'ère baroque – or, argent et rouge vif sont bien présents, mais l'ensemble apparaît plus discordant que réellement brillant. In Light and Shadow met quoi qu'il en soit des artistes en lumière – les applaudissements ne s'y sont pas trompés –, et parmi eux plus particulièrement Paul Liburd, d'une profondeur pleine de maturité.
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Joël
Inscrit le: 11 Avr 2010 Messages: 112
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Posté le: Sam Aoû 31, 2013 4:30 pm Sujet du message: |
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J'ai été agréablement surpris par le Scottish Ballet dont j'ai vu il y a quelques jours plusieurs ballets dans le cadre des Dance Odysseys programmés dans le cadre du Festival international d'Édimbourg. Les ballets et extraits de ballets que j'ai vus étaient tous ou presque de la danse contemporaine, dans laquelle les danseurs étaient en général convaincants ou très convaincants. J'y ai découvert le ballet de Twyla Tharp intitulé The Fugue, qui m'a vraiment beaucoup ému. Ils ont aussi recréé Pierrot lunaire de Glen Tetley (qui m'a surtout procuré un immense plaisir musical tant la musique de Schönberg était merveilleusement jouée et chantée). La compagnie a aussi à son répertoire leurs versions de grands ballets classiques.
(Ce qui m'a le moins convaincu dans les spectacles du Scottish Ballet que j'ai vus, ce sont les deux extraits de ballets classiques de Peter Darell, fondateur de la compagnie. Cela dit, qu'ils soient présentés comme extraits en dehors de tout cadre narratif n'aidait pas.)
Parmi les à côtés appréciables :
* C'est le public le plus agréable que j'aie rencontré, idem pour les ouvreurs et ouvreuses. On se sent immédiatement très à l'aise.
* Le (nouveau) directeur Christopher Hampson était très présent, mais sa présence était plus intéressante, utile, agréable que cela ne peut être le cas dans notre chère institution parisienne. C'est vraiment un tout autre style !
* Parmi les 10 chorégraphes des ballets que j'ai vus, seulement 5 étaient des hommes.
* Par rapport à d'autres villes où le lyrico-balletomane pourrait avoir envie de se déplacer, j'ai trouvé que les coûts d'hébergement/séjour étaient relativement modérés à Édimbourg.
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