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entretiens
Patrick de Bana, chorégraphe des reines

23 janvier 2016 : Patrick de Bana, d'Agnès Letestu à Svetlana Zakharova



Le nom de Patrick de Bana est indissociable de celui de Manuel Legris, et les deux artistes poursuivent aujourd'hui à Vienne une collaboration entamée il y a presque une décennie. Mais Patrick de Bana suit également sa propre voie, qui l'amène aujourd'hui au Bolchoï, où il prépare une nouvelle chorégraphie dont l'héroïne sera Svetlana Zakharova. Création le 12 mai au Teatro Comunale de Modène, puis Première russe au Bolchoï le 24 mai. Initialement conçu comme un pas de deux pour Svetlana et Patrick, The Rain Before it Falls est, au fil des répétitions, devenu un trio auxquel s'est joint une autre star de la danse moscovite, Denis Savin. Pour Dansomanie, Patrick de Bana évoque «ses» reines, la star du Bolchoï, bien évidemment, mais aussi une autre forte personnalité, Agnès Letestu, qui fut sa muse pour Marie-Antoinette en 2009.



Patrick de Bana, Svetlana Zakharova

On vous connaît déjà un peu en France grâce à votre chorégraphie Marie-Antoinette qui avait été représentée à Versailles, à l'Opéra Royal, avec le ballet de Vienne. Pouvez-vous nous en rappeler l’origine?

Des fragments en avaient déjà été donnés précédemment avec Agnès Letestu [au théâtre de Poissy, ndlr]. C'est Agnès qui est à l'origine de cette Marie-Antoinette. On s'est rencontrés à Cuba, au Festival de La Havane. En sortant de scène, après un spectacle, elle m'a dit «j'aimerais bien que l'on travaille ensemble». Je lui ai répondu «d'accord». Une semaine plus tard, elle m'a recontacté.

Agnès Letestu, pour moi, c'est une vraie aristocrate, c'est une personne noble. Et je me suis dit que pour une création avec elle, il me fallait une vraie histoire, qui corresponde à ce trait de sa personnalité. J'ai hésité entre la Reine Margot et Marie-Antoinette. J'ai observé attentivement Agnès, nous avons discuté, et je me suis dit : «c'est sûr, elle doit danser à Versailles». D'où le choix final de Marie-Antoinette. J'ai commencé par écrire un pas de deux, qui allait plus tard constituer les quinze dernières minutes de Marie-Antoinette. Brigitte Lefèvre avait vu ce pas de deux, et elle a dit à Manuel Legris qu'on pourrait en faire un grand ballet pour Vienne. Manuel Legris venait d'être nommé directeur du Wiener Staatsballett, et il voulait une création nouvelle pour sa compagnie. Je me suis dit que Marie-Antoinette conviendrait exactement, puisqu'il était question d'une Autrichienne, qui a vécu en France. Et Manuel Legris était à présent un Français vivant en Autriche. Le lien était pour moi évident. Donc, j'ai transformé le pas de deux initial en un ballet entier [«full length»]. Par-dessus le marché, le Wiener Staatsballett devait venir, dans le cadre d'une tournée, se produire à l'Opéra Royal de Versailles. Le cadre rêvé! J'étais très heureux de pouvoir ainsi ramener Marie-Antoinette dans sa propre maison, dont elle avait été chassée par la Révolution française. J'avais l'impression d’être une sorte de petit «messager», en y montant ce ballet.

Patrick de Bana - Svetlana Zakharova
Svetlana Zakharova, Patrick de Bana

Vous aviez déjà une expérience de chorégraphe?

Oui. En fait, je me suis mis assez tôt à la chorégraphie, à l'époque où j'étais encore Principal chez Nacho Duato, à la Compañía Nacional de Danza, à Madrid. C'est lui qui m'a poussé à devenir chorégraphe. Moi, cela ne me tentait pas spécialement. Je voulais, lorsque j’arrêterai de danser, me lancer dans l'élevage canin! J'adore les chiens. J'adore la vie à la campagne. Mon rêve, c'était ça : avoir un élevage de chiens! Nacho Duato m'avait repéré lors de quelques «workshops», et selon lui, j'avais, paraît-il, du talent. C'est lui qui m'a commandé mon premier vrai ballet, pour la CND.


Après Marie-Antoinette, vous avez eu envie de récidiver et de créer d'autres grands ballets?

Oui, car j'aime beaucoup créer des univers, raconter des histoires. En Chine, je viens de faire deux ballets «full length
» (Jane Eyre et Echoes of Eternity), on va reprendre Le Sacre du Printemps et Louis II, Le Roi-cygne (Ludwig II - The Swan King), et j'ai encore un autre projet là-bas. Je travaille beaucoup avec la Chine. Les Chinois apprécient mon travail, et me traitent très bien. Il y a beaucoup de possibilités dans ce pays, qui s'ouvre de plus en plus. Ils m'aiment bien, et je les aime bien. Dans un grand ballet, davantage encore que l'histoire, ce qui compte pour moi, c'est l'émotion. Traduire les émotions des personnages principaux, leur dimension spirituelle et psychologique.

Patrick de Bana - Svetlana Zakharova
Patrick de Bana, Svetlana Zakharova

Parlons du futur, justement, mais du futur proche. Vous préparez en ce moment un nouveau ballet pour Svetlana Zakharova, non?

Oui. Le point de départ en est un pas de deux que j'avais déjà créé pour elle, Digital love. C'est une belle histoire. En fait, jamais je n'avais imaginé pouvoir travailler un jour avec Svetlana Zakharova. Je l'ai rencontrée par hasard au World Ballet Festival, à Tokyo [en 2012, ndlr], où elle dansait un pas de deux de Nacho Duato, Cor Perdut, que j'avais moi-même interprété durant des années. Personne n'était disponible pour la coacher, la faire travailler, et je me suis proposé. Elle était ravie et a tout de suite accepté mon offre. On a travaillé cinq jours durant, et elle a même voulu que j'assiste au spectacle, afin que je puisse la corriger ensuite. Nous avons noué une amitié, et à l'issue du World Ballet Festival, elle m'a dit qu'elle aimerait bien que je crée quelque chose pour elle. Je lui ai demandé avec qui [elle voudrait danser], elle m'a répondu : «avec toi». Ça m'a fait un gros choc!

On a donc commencé à travailler sur Digital love, qui a été créé il y a deux ans lors d'un de mes galas à Shanghai. Après la première, elle m'a dit : «Patrick, j'en veux plus»! «Que veux-tu dire»? «Je veux que ça soit plus long»! Et donc j'ai repris et rallongé Digital love, qui est devenu The Rain Before It Falls - La Pluie, avant qu'elle tombe – et qui dure maintenant trente minutes.


Patrick de Bana - Svetlana Zakharova
Patrick de Bana, Svetlana Zakharova

Et quel est le sens de ce titre [qui fait référence à un roman de l'écrivain anglais Jonathan Coe, ndlr]?

C'est toujours difficile de parler d'une œuvre qu'on est en train de créer. Cela parle de l'amour invisible, indicible, impossible, cela parle de tout et de rien, comme avant la pluie : on sent qu'il y a quelque chose dans l'air, que quelque chose va se passer, mais on ne sait pas vraiment quoi. C'est l'histoire d'un écrivain, tourmenté par ses démons... C'est Jean-François Vazelle, avec qui j'ai déjà collaboré pour Le Sacre du Printemps, Apollon, Echoes of Eternity et Cléopâtre, qui s'est occupé de la dramaturgie.


Là, vous avez travaillé avec Svetlana Zakharova, auparavant, c'était avec Agnès Letestu. Est-ce que vous vous sentez attiré par ce type de danseuse, un peu «aristocratique»? Cela contraste avec votre propre personnalité, non?

Vous savez, Tarzan et Jane... Eh bien, c'est exactement cela! Les contraires s'attirent. J'ai un physique un peu «exotique», j'ai des tatouages, des boucles d'oreilles, toutes ces choses ne font évidemment pas partie de leur monde, à Svetlana Zakharova ou Agnès Letestu! Inversement, elles ne font normalement pas partie de mon monde à moi non plus! Mais je n'ai pas activement cherché à travailler avec elles, c'est le destin qui nous a rapprochés.

J'ai une base de danseur classique, j'ai fait mes études à l'école de John Neumeier, à Hambourg, et j'ai donc une connaissance de la technique classique, même si je ne danse plus de classique. Mais j'évolue dans un univers un peu atypique, j'ai travaillé avec des gitans, avec des danseurs de flamenco, avec des soufis, en Turquie, j'ai utilisé de la musique arabe. Et en même temps, j'ai travaillé avec Svetlana Zakharova et de la musique de Bach. Cela vient aussi un peu de ma naissance, je crois. Ma mère est allemande, avec des origines polonaises et hongroises, mon père est nigérian. En fait, j'ai tout en moi, un côté européen, et aussi un côté africain, ancestral, profond.

Denis Savin - Patrick de Bana

Denis Savin, Patrick de Bana,

Est-ce que dans The Rain Before It Falls, que vous montez actuellement donc, vous jouez sur ce contraste entre votre personnalité et celle de Svetlana Zakharova?

Non, en tout cas pas sur le plan visuel. Ce serait vraiment tomber dans la facilité : moi le sauvage, elle la blonde aristocrate russe! Mais inconsciemment, dans nos rapports, oui. Je suis à moitié africain, et même si je ne veux pas en jouer, je ne peux pas le nier, le cacher. L'Afrique est forcément quelque part autour de moi.

Quand je crée, je crée «au fil de l'eau», au fur et à mesure. Ça a été pareil lorsque j'ai collaboré avec Ivan Vassiliev. J'ai écrit pour lui un solo, The Labyrinth of Solitude, et durant tout le processus de création, j'ai pensé à Nijinsky. Ce n'était ni l'Afrique, ni l'Europe, c'était Nijinsky. Quand je suis face à un danseur, je m'en fiche de l'apparence extérieure, qu'il soit beau, blond, avec des yeux bleus ou des yeux noirs, ça n'a pas d'importance. Ce qui m'intéresse, c'est l'intérieur. J'essaye d'en faire une sorte de radiographie. C'est ce que les gens ont à l'intérieur qui me donne envie de travailler avec eux. Svetlana, comme Agnès, comme Aurélie Dupont [l'interview a été réalisée avant l'annonce de la nomination de la danseuse à la direction du Ballet de l'Opéra de Paris, ndlr], comme également Ivan Vassiliev, Hervé Moreau, Mathieu Ganio : ils ont tous en eux un univers qui leur est propre, et c'est cet univers-là qui m'attire, qui me donne l'envie de créer.


Est-ce que vous utilisez aussi les pointes?

Oui. Dans The Rain Before It Falls, Svetlana Zakharova ne sera pas sur pointes, mais j'ai récemment monté Creatures, à Vienne, pour les jeunes talents de la compagnie. La soliste féminine y était sur pointes. J'ai créé aussi d'autres ballets sur pointes : Le Chant de la Terre, pour le Ballet National de Chine, par exemple - et maintenant, dans sa version remaniée les deux rôles féminins principaux sont également sur pointes. Mais je n'aime pas les étiquettes. Vous me voyez devant vous, trouvez-vous que j'ai l'air allemand? Non, évidemment. Et pourtant j'ai un passeport allemand. Même les douaniers et la police n'y croient pas et vérifient mes papiers cinq fois de suite quand je voyage! Donc, je ne veux pas m'attacher aux apparences, je ne veux pas juste plaquer des clichés. La danse classique, ce n'est pas que les pointes. D'abord, c'est la danse telle qu'on l'apprend dans les classes. Les pointes en sont un des aspects. La danse, c'est un thème et des variations - d'ailleurs, j'adore ce ballet de Balanchine! La danse doit rester ouverte, il ne faut pas la diviser en cases. J'aime la liberté. C'est pour cela que j'exerce mon métier en free-lance depuis 2002. J'aurais pu intégrer différentes compagnies, mais je me suis dit, même si c'est difficile, au moins je suis libre. C'est cela qui me plaît. Quand je suis devant Svetlana Zakharova, je suis libre!

Patrick de Bana - Svetlana Zakharova

Patrick de Bana, Svetlana Zakharova

Est ce qu'Agnès Letestu ou Svetlana Zakharova se sont tournées vers vous justement parce qu'elles ont l'habitude d'évoluer dans des compagnies très hiérarchisées, très structurées, et qu'elles voulaient expérimenter autre chose?

C'est fort possible. Elles ont très vite compris que pour moi, avant l'étoile, avant la star, il y a l'être humain. Si je ne ressens pas l'humanité d'une personne, qu'elle soit Etoile ou dernière danseuse du corps de ballet, ça ne m'intéresse pas.


Les répétitions de
The Rain Before It Falls se déroulent où? C'est vous qui vous rendez à Moscou?

Nous avons répété plusieurs fois à Vienne, et, de mon côté, je me rends souvent à Moscou. J'y ai passé dix jours en décembre dernier, et je m'y rends de nouveau fin février 2016. La première est prévue le 12 mai, à Modène [au Teatro Comunale Luciano Pavarotti de Modène, ndlr]. Après une mini-tournée en Italie, la pièce sera présentée au Bolchoï, à Moscou, les 24 et 25 mai 2016. D'autres représentations auront lieu d'ici la fin de l'année 2016, à Monte-Carlo, Riga, Naples, Gênes, Ravenne... 

Vous disposez d'un interprète pour communiquer avec Svetlana Zakharova?

Non, on se débrouille avec l'anglais! Et puis on se parle aussi avec nos corps, avec le physique! Et comme j'ai aussi été très souvent en Russie, sans vraiment parler la langue, je la comprends plus ou moins.

Patrick de Bana - Svetlana Zakharova
Svetlana Zakharova, Patrick de Bana

Est-ce qu'il y a des échanges avec Svetlana Zakharova? Est-ce qu'elle vous donne des idées, vous suggère des modifications?

J'adore travailler avec Svetlana Zakharova, car elle est d'une très grande disponibilité. Cela m'a d'ailleurs étonné, je ne m'attendais pas à ça. J'ai travaillé avec d'autres personnes avec lesquelles c'était plus compliqué, où il fallait faire preuve de diplomatie... Svetlana m'a dit un jour : «Patrick, je suis ton instrument. Fais avec moi ce que tu veux». Nous avons énormément d'échanges, et comme, de surcroît, nous dansons ensemble, le contact est encore plus intime, plus intense. Ce que je crée pour elle, je le crée de fait aussi pour moi. N'interprétez pas mal mes propos – mais c'est aussi une belle histoire d'amour. J'ai découvert en elle un être humain fantastique. Elle a une très grande force de caractère, elle est très professionnelle, et en même temps, elle peut être très drôle aussi. Nous avons même eu des fou rires ensemble! Je me dis que j'ai vraiment eu de la chance.


Comment arrive-t-on à concilier le travail du chorégraphe et celui de l'interprète? N'est-ce pas compliqué d'être à la fois à l'intérieur et à l'extérieur?

C'est une chose que je ne fais pas, en temps ordinaire. Cela ne m'est arrivé que très rarement, avec Elena Martin, une danseuse de flamenco, notamment. Mais on se connaissait depuis des années. Pareil pour Agnès Letestu, encore qu'au départ, ce n'était pas franchement voulu.

Agnès Letestu, Svetlana Zakharova, tout comme Elena Martin, sont très grandes, et pour moi, elles ont des physiques très «faciles». Et je suppose qu'inversement, comme je suis grand aussi, elles se sentent «enveloppées», en confiance. Je me considère plutôt comme la base, en quelque sorte, sur laquelle elles peuvent danser. Bien sûr, nous dansons ensemble. Mais je serais presque tenté de dire que je les «protège» sur scène.


Est-ce que cela ne vous incite pas à vous tenir en retrait, sur scène?

Absolument. Je me mets au second plan. Quand je danse avec Agnès Letestu ou Svetlana Zakharova, je me mets toujours au second plan. Je suis l'ombre d'Agnès Letestu, l'ombre de Svetlana Zakharova.


Est-ce que vous prenez aussi l'avis de personnes extérieures? Manel Legris par exemple?

Pas seulement avec Manuel Legris, cela dépend des personnes présentes. Je prends souvent l'avis de Chantal Lefèvre, qui est maintenant Maître de ballet à Vienne, et qui dansait auparavant chez John Neumeier à Hambourg. Il m'arrive de demander à quelqu'un de s'asseoir dans le studio, et d'observer. Sauf avec Svetlana Zakharova, qui apprécie beaucoup l'intimité, elle préfère travailler à huis clos. Mais nous filmons tout, et on regarde ensuite les vidéos et nous en discutons.

Quand je crée quelque chose, ce n'est jamais définitif. Ça évolue au fil des répétitions, et même des représentations. Il y a toujours des changements. Mes créations, je les appelle mes «enfants», mes «bébés». Et un enfant, il doit grandir. Il faut le nourrir. Par exemple, en avril, je vais en Chine, pour y reprendre Echoes of eternity, ma dernière création. Je suis sûr à quatre-vingt dix pour cent qu'il y aura des changements.

Patrick de Bana - Svetlana Zakharova

Patrick de Bana, Svetlana Zakharova

Le programme sera complété par d'autres pièces, au Bolchoï notamment?

Oui, c'est LA soirée de Svetlana Zakharova, au cours de laquelle trois pièces de trois chorégraphes différents seront présentées au public. Mais je ne suis pas en mesure de vous donner les noms des deux autres pour le moment [le détail du spectacle n'est pas encore annoncé sur le site du Bolchoï, même si tous les billets pour les représentations du 24 et du 25 mai sont déjà vendus, ndlr].

Et la musique de The Rain Before It Falls, vous avez évoqué Jean-Sébastien Bach?

La musique, il y aura Bach en effet - un fragment des Variations Goldberg, tout à la fin, mais aussi Ottorino Respighi, et également un compositeur avec qui je travaille souvent, Carlos Pino Quintana. C'est un Vénézuélien, mais il a une formation tout à fait classique, il a étudié à la Musikhochschule de Vienne. Il a une grande ouverture d'esprit. Il va d'ailleurs aussi réviser en partie la musique de Marie-Antoinette. Entre les pièces baroques, il y a des transitions contemporaines, qui doivent exprimer les angoisses de la Reine de France.


Il n'y a aucun lien, aucune filiation entre
Marie-Antoinette et The Rain Before It Falls?

Non, il n'y a vraiment pas de lien entre ces deux ballets. Pour moi, la «responsable» de Marie-Antoinette, c'est Agnès Letestu. C'est elle, lors de notre rencontre à Cuba, qui a été l'inspiratrice de cette création. En plus, elle en a réalisé les costumes, magnifiques. Pour The Rain Before It Falls, le responsable, c'est le Destin, qui m'a fait rencontrer Svetlana à Tokyo!


Vous allez à nouveau travailler avec elle?

Oui. Je l'aime bien. Elle possède une élégance toute personnelle. Et elle a cette touche un peu «Ancien Régime». Et j'adore l'Ancien Régime. Chaque fois que je viens à Versailles – et cela m'arrive souvent – je me dis : «Patrick, pourquoi n'as-tu pas vécu ici»? J'aime beaucoup les temps anciens, le passé.


Vous n'êtes pas allé à Versailles avant-hier [21 janvier 2016, ndlr] justement pour y commémorer l'anniversaire de la mort du roi Louis XVI justement [rires]?

Non! Mais j'aurais pu [rires]. En fait, ce qui me fascine surtout, c'est l'époque baroque, cette imagination débordante des gens d'alors, cette créativité foisonnante : Lully, Haendel, Vivaldi... D'ailleurs, à la maison, j'ai des centaines de disques de musique baroque. Pour moi, la Lumière, c'est l'époque baroque. Bien sûr, toute médaille a son revers. Paris était remplis de miséreux. L'histoire de notre monde est malheureusement faite ainsi.Mais que ce soit en musique, en peinture, dans les arts en général, le baroque était pour moi pris d'une véritable folie créative.


Baroque donc. Comme vous êtes né à Hambourg, n'avez-vous jamais été tenté de créer un spectacle autour de Telemann, qui y dirigea, de 1722 à 1738 le premier opéra «public» d'Allemagne, le Theater am Gänsemarkt?

En fait, je me suis un peu éloigné du Nord. Mon port d'attache est en Espagne maintenant. Comme je suis à moitié Allemand, je connais bien la mentalité du Nord. Mais ce que j'aime beaucoup, en ce moment, c'est la mélancolie du Sud. Elle me donne énormément d'inspiration pour créer. Un coucher de soleil à Hambourg, ce n'est pas pareil qu'un coucher de soleil en Toscane. Et pourtant, c'est le même soleil. Ce sont l'air, l'ambiance, l'histoire, qui rendent les choses plus lumineuses ou plus sombres.


Vous avez d'autres projets pour l'avenir, notamment à Vienne, avec Manuel Legris?

J'ai des projets, mais ils ne sont pas suffisamment avancés pour pouvoir en parler.

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Propos recueillis par Romain Feist



Svetlana Zakarova
Svetlana Zakharova

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Entretien réalisé le 23 janvier 2016 - Patrick de Bana © 2016, Dansomanie


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