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critiques et comptes rendus
Bayerisches Staatsballett (Munich)

06 février 2015 : Artifact II - The Exiles - Zugvögel au Nationaltheater


artifact II
Artifact II (chor. William Forsythe)


Un peu plus de cinq se sont passés depuis la première des Oiseaux migrateurs (Zugvögel) créés par Jiří Kylián pour le Ballet de Bavière, dont nous avions commenté la première. Depuis, le parcours souterrain précédant le spectacle a été supprimé et remplacé pour cette soirée par deux classiques du XXe siècle. Hélas, le prologue disparu n’était pas ce qui plombait la pièce ; le reste est toujours là, les costumes d’un post-modernisme désuet et clinquant, les bruitages de Dirk Haubrich, l’emphase chorégraphique qui n’a plus rien des subtilités qui distinguaient le maître du Nederlands Dans Theater.

Zugvögel
Zugvögel (chor. Jiří Kylián)

La pièce affiche l’élite de la troupe de Munich, mais c’est à peine si on voit les danseurs, privés de leur personnalité par un travail qui semble beaucoup regarder du côté des expérimentations de Forsythe, sans la force de leur rigueur formelle. Nous n’avions pas relu notre critique avant de voir le spectacle : la conclusion spontanée de cette seconde vision est la même qu’il y a cinq ans, à savoir que seules les séquences de film viennent un peu soulager la monotonie de ce noir sans nuance.  

Zugvögel
Caroline Geiger et Peter Jolesch dans Zugvögel (chor. Jiří Kylián)

La première partie, beaucoup plus courte, unit une entrée au répertoire et une reprise. Après The Moor’s Pavan ou Chaconne, la troupe place à son répertoire une nouvelle œuvre de José Limón, rival un peu oublié de Balanchine ou Robbins, mort en 1972, et fondateur de la troupe qui porte son nom et existe toujours aujourd’hui. Créé en 1950, The Exiles a le mérite de présenter au public de son temps la seconde Symphonie de chambre de Schönberg, qui était encore vivant au moment de la création ; Limón en fait le support d’une illustration à la fois très prosaïque et très abstraite de l’histoire d’Adam et Ève : le premier mouvement les montre dans la douleur de la proscription, le second est consacré au souvenir du Paradis, avant que la sombre coda les ramène vers la dure réalité.

The Exiles
Stephanie Hancox et Matej Urban dans The Exiles (chor. José Limón)

Mais à quoi bon ce cadre narratif? La chorégraphie est beaucoup trop sage et attendue pour que l’histoire (les personnages, les émotions, les formes, peu importe) trouve sa nécessité. Tous les mythes sont bons à raconter, à condition qu’ils signifient quelque chose pour l’artiste qui s’en empare. Pour cette première, Stephanie Hancox et Matej Urban ont l’élégance et la technique acquise, mais peut-être la pièce gagnerait-elle un peu de l’efficacité qui lui manque tant s’ils osaient s’en emparer de façon plus personnelle.


Artifact II
Artifact II (chor. William Forsythe)

Ce sont donc les quatorze premières minutes de la soirée qui en justifient seules la programmation : Artifact tout court, Artifact Suite, Artifact II, en entier, en morceaux choisis ou à travers un extrait, Forsythe parvient dans cette triple pièce à une harmonie formelle sans exemple. Artifact II n’a que le défaut de sa brièveté, mais on y retrouve tout le travail de Forsythe sur les possibilités et les limites du corps humain, la force sculpturale de ses lumières et l’énergie vitale de ses meilleures créations. Peut-être cette énergie, d’ailleurs, pourrait-elle être plus évidente chez les solistes de ce soir, malgré leur élégance et leurs qualités techniques : tout ce qui fait la force de cette pièce est présent, sauf l’ivresse paradoxale qui accompagne son apparente froideur.





Dominique Adrian © 2015, Dansomanie

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The Exiles
Matej Urban et Stephanie Hancox dans The Exiles (chor. José Limón)



Artifact II

Musique : Jean-Sébastien Bach (Chaconne de la Partita pour violon n° 2 BWV 1004)

Chorégraphie, scénographie, costumes et lumières : William Forsythe

Avec :  Javier Amo, Emma Barrowman
Lucia Lacarra, Tigran Mikayelyan

The Exiles

Musique : Arnold Schönberg (Symphonie de chambre n° 2, op. 38 )

Chorégraphie : José Limón
Décors : Anita Wescher
Costumes :  Pauline Lawrence
Lumières : Aaron Copp

Avec : Stephanie Hancox, Matej Urban

Zugvögel
Musique : Dirk Haubrich

Chorégraphie : Jiří Kylián
Décors et lumières : Michael Simon
Costumes :  Yoshiki Hishinuma
Vidéo : Boris Paval Conen, Jiří Kylián interprétée par  Sabine Kupferberg et Richelle Plantinga

Avec :  Caroline Geiger, Peter Jolesch



Bayerisches Staatsballett
Musique enregistrée

Vendreid 06 février 2015,  Prinzregententheater, Munich


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