haydn Site Admin
Inscrit le: 28 Déc 2003 Messages: 26583
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Posté le: Lun Sep 22, 2014 8:59 pm Sujet du message: |
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Le site semble marcher assez mal, notamment sous Firefox (l'affichage est meilleur avec Google Chrome) :
Les danseurs annoncés sont :
Léonore Baulac, Ballet de l’Opéra de Paris, France
François Alu, Ballet de l’Opéra de Paris, France
Elena Vostrotina, Semperoper Ballett Dresden, Allemagne
Raphaël Coumes-Marquet, Semperoper Ballett Dresden, Allemagne
Jurgita Dronina, Ballet National d’Amsterdam, Pays-Bas
Isaac Hernandez, Ballet National d’Amsterdam, Pays-Bas
Mathilde Froustey, San Francisco Ballet
Pascal Molat, San Francisco Ballet, USA
Melissa Hamilton, Royal Ballet de Londres, Angleterre
Eric Underwood, Royal Ballet de Londres, Angleterre
Xander Parish, Mariinsky, Saint Petersbourg
Rolando Sarabia, Etoile Internationale, Cuba
Venus Villa, Etoile Internationale, Cuba |
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sophia
Inscrit le: 03 Jan 2004 Messages: 22130
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Posté le: Jeu Nov 20, 2014 11:49 am Sujet du message: |
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Les Hivernales de la danse – 3ème édition
Liège, Manège de la Caserne Fonck
16 novembre 2015
Il faut sans doute beaucoup aimer la danse et les danseurs pour se lever un dimanche de bon matin et partir ainsi, en plein cœur d'un mois de novembre bien pluvieux, direction Liège et un lieu nommé... la caserne Fonck! Cela fait trois ans que s'y déroule le gala des Hivernales de la danse, fondé par Marie Doutrepont, une dynamique Liégeoise, ancienne danseuse du Royal Ballet et du Ballet royal de Flandres (entre autres), reconvertie dans l'organisation de stages de danse. Mine de rien, elle réussit non seulement à réunir, une fois l'an et deux jours durant, quelques-uns des meilleurs danseurs de la planète, mais aussi à créer, autour du spectacle, une belle alchimie entre les artistes et le public – où se croisent, en nombre, familles et ballerines en herbe. Lui sont ainsi proposés, en plus du gala, un cours public, des séances de dédicace avec les danseurs, une tombola ou encore une vente de produits dérivés, autant de petites choses qui participent pleinement du succès de cette manifestation - qu'il était temps de découvrir! Pour le reste, le lieu, tout en briques rouges du Nord, réaménagé en salle de spectacle pourvue de gradins, possède un charme brut qui se marie bien avec l'ambiance très « night-club » qui encadre la représentation : salle plongée dans le noir, éclairages tamisés, petites bougies design disposées sur les tables du bar... Les organisateurs ont le sens du détail et, ma foi, il n'y a pas lieu de regretter une seconde le voyage.
Le cours public est un spectacle en soi, qui nous offre une agréable mise en bouche. Il est donné par Howard Quintero, un Cubain, et accompagné par une formidable pianiste, Natalya Chepurenko, qui apporte un dynamisme bienvenu à un choix diversifié de musiques de ballet. La barre laisse voir quelques regroupements nationaux : les danseurs de Dresde d'un côté, les Anglais et les Cubains d'un autre, tandis qu'à la barre centrale trônent nos quatre Français, présents en force – une fois n'est pas coutume dans ce genre de contexte -, avec les représentants de l'Opéra de Paris et du San Francisco Ballet. Au milieu les choses s'animent naturellement avec une saine et enthousiasmante compétition de sauts et de pirouettes entre les garçons – Isaac Hernandez, un formidable danseur du Het Nationale Ballet qui semble ne pas connaître l'existence du sol, François Alu, qu'on ne présente plus, et le mythique Rolando - « Rolandito » - Sarabia, qui allie à une extraordinaire virtuosité cette rareté, l'élégance du geste, jusque dans ses épaulements et ses mains, tellement cubaines. A cette démonstration, qui réchauffe l'assistance et emballe les applaudissements, succède une coda endiablée de fouettés et de tours, réclamée par les danseurs eux-mêmes. Bref, le « dédain de la prouesse » peut aller se rhabiller et Louis XIV avec.
Le soin apporté dans l'organisation se retrouve lors de la représentation. Nejma Ben Brahim, présentatrice à la diction impeccable, introduit au fil du spectacle les danseurs et les morceaux dansés. Le propos est pédagogique, parfois un brin emphatique, mais néanmoins toujours éclairant. C'est surtout une belle marque de respect envers les spectateurs et les danseurs, traités comme des artistes, attachés à une maison ou à un répertoire, et non comme de simples débiteurs de pirouettes en série – trois petits tours et puis s'en vont. Côté mise en scène, le gala opte pour la sobriété, avec des éclairages tempérés (presque trop parfois – ceux de Diamants m'ont paru bien trop sombres), nous évitant les diaporamas dégoulinants dans l'air du temps.
Le gala s'ouvre par une démonstration des élèves de l'Académie Grétry, démonstration charmante et bien dosée qui, en un petit ensemble, un solo et quelques révérences, semble nous dire à peu près tout du ballet classique, avec son croquignolet haut comme trois pommes débarqué au milieu d'une cour de mini-sylphides. Le programme souligne ensuite, une fois de plus, une tendance générale constatée à peu près partout : l'importance prise par le répertoire « néo-classique » - au sens le plus large – dans la danse d'aujourd'hui, au détriment du répertoire du XIXe siècle. Heureux sommes nous toutefois que ce gala nous en propose à peu près le meilleur : Balanchine et Lifar alternent ici avec MacMillan, Van Manen, et, pour les chorégraphes plus récents, Dawson, Wheeldon et McGregor. Quant au classique, il semble qu'il n'y ait quasiment plus que les Cubains ou les Russes pour l'honorer au plus haut niveau et avec ce petit plus qui s'appelle le style. De manière obligée, ce sont donc Vénus Villa et Rolando Sarabia qui nous offrent, avec Coppélia et Diane et Actéon, ces moments rares. On admire, malgré la bande-son désolante à la limite du supportable, le sens qu'ils ont du détail et du style - style désormais presque perdu qui n'est pas sans jeter sur leurs prestations un léger voile de tristesse.
Honneur pour le reste au vaste continent néo-classique, avec un ensemble de pièces témoignant assez bien du répertoire des compagnies, européennes ou américaine, dont sont issus les danseurs. Les « macgrégoreries » sont notamment présentes en force, déployant sans frein leur physicalité de l'extrême, sans crainte de lasser. Chorégraphiées par McGregor (Qualia), par Wheeldon (Tryst) ou par Dawson (Grey Area), on peine à vrai dire à saisir ce qui distingue tous ces duos qui, pour reprendre les termes consacrés, ne cessent de « repousser les limites du corps », ou à déceler ce qui peut rendre l'un meilleur – ou pire - que l'autre. Elena Vostrotina et Raphaël Coumès-Marquet sont brillamment incisifs dans la pièce de Dawson, qui les met sans doute plus en valeur que l'extrait de Diamants ouvrant le gala. Les bras et la plasticité très russes de Vostrotina font merveille et se marient idéalement à l'élégance sombre et lointaine de Raphaël Coumès-Marquet, mais l'élan romantique semble quelque peu absent de leur prestation. Melissa Hamilton et Eric Underwood sont de leur côté un couple consacré dans ce type de répertoire, qui a souvent été créé sur eux par les deux chorégraphes attitrés du Royal Ballet, et l'on comprend aisément pourquoi. Un couple en noir et blanc, deux physiques athlétiques, hyper-laxes et hyper-sensuels - une sorte d'idéal de la modernité urbaine, aux frontières de la déshumanisation. Les deux pièces qu'ils proposent sont curieusement dans le même registre. On ne doute pas que la présence de Xander Parish, qui devait danser avec Melissa Hamilton (un extrait de Giselle?), aurait apporté en contrepoint la touche à la fois dramatique et classique que l'on attend aussi des artistes du Royal Ballet.
Jurgita Dronina et Isaac Hernandez, du Het Nationale Ballet, ont pu manifester davantage de versatilité avec Two Pieces for Het de Hans van Manen et le pas de deux de la chambre tiré de la Manon de MacMillan, deux pièces qui exigent bien d'autres qualités que la pure virtuosité que ces deux danseurs sont largement capables de délivrer et dont on aurait peut-être aimé aussi profiter. Two Pieces for Het offre un contraste intéressant au travers de ses deux tableaux, l'un plus rapide et virtuose, l'autre plus dense et lyrique. Au milieu de tant de faiseurs actuels de pièces, fonctionnant au seul effet, les chorégraphies de Van Manen se distinguent toujours par leur sobriété et la tension qu'elles parviennent à créer. La complicité des deux danseurs est palpable dans Manon, mais l'extrait arrive sans doute un peu trop brutalement, en ouverture de la seconde partie, pour véritablement émouvoir.
La défection (regrettable) de Xander Parish profite directement aux danseurs du San Francisco Ballet, vus à trois reprises dans ce gala. Curieusement, Mathilde Froustey nous propose pour sa première apparition la variation de la Cigarette extraite de Suite en blanc, ballet qui figure certes au répertoire du SFB, mais qui évoque davantage de par chez nous le fameux concours de promotion interne, qui ne lui a pas forcément très bien réussi par le passé. Le moins que l'on puisse dire est qu'elle ne danse pas cette Cigarette façon concours de l'Opéra -et c'est heureux! -, laissant voir des bras et des poses étonnamment libérés et sensuels, qui se marient tout à fait bien à l'esprit de la Namouna de Lalo. Who Cares?, dans l'esprit du musical américain, n'est certes pas le Balanchine que l'on préfère, mais Pascal Molat et Mathilde Froustey y sont comme des poissons dans l'eau, rivalisant de vitesse, d'humour et de clins d'oeil coquins - au risque de l'indigestion. Lambarena, de Val Caniparoli, sur un drôle de mélange de Bach et de musique africaine, est une sorte de remix - façon show télévisé – de l'histoire de Tarzan, Jane et Cheetah... Bon. On n'a rien contre l'entertainment, mais on dira pudiquement que c'est là la pièce de trop – la pièce oubliable par excellence.
In fine, c'est bel et bien François Alu, plus jeune danseur de l'équipe incidemment, qui aura réussi à se démarquer des numéros plus ou moins attendus des vedettes frottées à l'exercice du gala, avec sa relecture hip-hop de La Sylphide. Son interprétation des Bourgeois, solo par trop rebattu, par trop marqué par certains interprètes bien connus, si elle est soignée et séduit par son caractère compact et nerveux, semble encore toutefois un peu retenue dans l'humour. En revanche, le solo/duo revisité de La Sylphide surprend agréablement par son mélange réussi de mouvements hip-hop et contemporains, mis au service de l'intrigue la plus romantique qui soit. François Alu aurait pu se contenter de délivrer seul, et brillamment, de ces figures athlétiques qui n'ont pas de nom dans la grammaire classique, mais le duo avec Léonore Baulac, solaire et radieuse en créature éthérée des temps modernes, donne à la démonstration simplement plaisante qui l'ouvre une véritable dimension émotionnelle. Face à l'abus des poses chirurgicales pour humanoïdes dansants, cette petite pièce est une respiration : ça danse enfin! Si les créations de nos étoiles maison et autres danseurs chorégraphes adoubés par la direction ont souvent laissé – au minimum – sceptique, voilà incontestablement, de la part d'un jeune espoir, un ton nouveau, réjouissant pour l’œil et pour l'esprit, rafraîchissant surtout par son naturel. A suivre!
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