Théâtre des Champs-Elysées 2010-2011

[marc]

[Florestiano]

Un retour plus que réservé de Gérard Mannoni, qui est notamment bien peu tendre avec Ekaterina Krysanova.

Nous n'allons pas épiloguer sans fin sur l'enthousiasme de Jacqueline Thuilleux, qui m'inspire beaucoup de sympathie, mais j'ai sérieusement du mal à ne pas être mort de rire quand je lis sous sa plume que les spectateurs parisiens ont "admiré l’académisme impeccable des chinois Zhang Jian et Hao Bin", entre autres perles. Décidément - et c'est ce qui en fait probablement le charme -, un même spectacle peut être accueilli de manière fondamentalement contrastée d'une personne à l'autre !
Vivement le spectacle de demain

[LysNoir]

L'article de Gérard Mannoni traduit, mieux que je ne saurais le dire, tout ce que j'abhorre dans ce genre de manifestations. Ce n'est plus de la danse, mais de la gymnastique, c'est à qui sautera le plus haut et le plus fort...Beurk. Quant à Jacqueline Thuilliez, c'est à se demander s'il ne faut pas la lire au second degré!

[Aurélie]

Même son de cloche dans cette article de classiqueinfo.com

Sinon, je confirme que les spectateurs étaient enthousiastes! Mais pas tous apparemment. Juste pour rire, j'avais à côté de moi une "spécialiste" qui expliquait la danse à son mari: "Ah, ça, Yana Salenko, elle est très très connue! Et puis lui aussi, il est très très connu!" . C'est drôle, les gens en veulent pour leur argent, et veulent être sûrs de voir la crème de la danse!

[marc]

Je suis toujours étonné par ces critiques professionnels qui semblent découvrir le monde et s'émeuvent de ne pas trouver dans un spectacle de gala des profondeurs métaphysiques et des innovations chorégraphiques époustouflantes. Cela me semble aussi dérisoire et vain que quelqu'un qui s'émeuvrait de découvrir des femmes nues dans un spectacle du "Crazy Horse" !

Faut-il leur dire qu'un gala n'est pas un spectacle des profondeurs mais un spectacle de surface, où les danseurs se montrent, où l'on saute, où l'on pirouette, où l'on "entrechatte", où l'on "fouette", et où le public manifeste bruyamment son contentement ou son dépit ? C'est ainsi, et si l'on aime pas ce style de spectacle, pourquoi se faire du mal en y allant ?

Dans cette affaire, la question n'est pas l'originalité du spectacle mais savoir si c'est bien fait. A cet égard, si comme Florestino je peux sourire quand Madame Thuillier écrit que les spectateurs parisiens ont "admiré l’académisme impeccable des chinois Zhang Jian et Hao Bin", c'est plus devant son excès de bienveillance qu'au nom du "bon goût". Car nos amis chinois, quand je les ai vus, ont loupé leur prestation, ils l'ont complètement loupée. Ils étaient tendus, nerveux, ils n'ont pas dansé, ils ont simplement veillé à bien faire les pas. C'était scolaire, appliqué, aussi plaisant à voir que des élèves ânonnant une table de multiplication. Mais peut-être que Madame Thuillier à utilisé le mot "académisme" au deuxième degré, dans le sens d'ennuyeux et rasoir ? Cela étant, je n'en tire aucune conclusion. Il est bien évident pour moi que nos amis chinois sont de grands artistes, et je mets leur contre-performance sur le compte de la fatigue, du décalage horaire, et peut-être du trac de se produire devant le public parisien qu'ils doivent mal connaître.

Mais si je suis agacé devant la fausse naïveté de certains critiques que j'assimile à de l'imposture intellectuelle, je suis bien plus exaspéré par une conclusion comme celle de Monsieur Gérard Manonni qui écrit "Alors, reconnaissons que la tentation est forte, tant pour les organisateurs que pour les interprètes, de lui donner (au public) ce pour quoi il a payé." Au nom de quel mérite peut-on se permettre de prendre de telles hauteurs et de parler du public avec un pareil dédain et une telle condescendance ?

Car, si la danse existe vit et prospère c'est avant tout parce qu'il y a un public qui paie ! Et en cette matière, le public, cette brave vache à lait, est préssuré comme un citron. S'il y a bien une chose sur laquelle on peut s'entendre tous, c'est que la danse n'est globalement pas un spectacle pour les fauchés ! Quand je pense que j'ai payé l'équivalent de plus de 8 places de cinéma pour assister à un spectacle de loin, du balcon, où j'étais assis dans un fauteuil trop étroit, dans une position presque foetale car je n'avais pas la place d'étendre mes jambes (alors que je ne suis pas grand), pour voir une prestation sans orchestre, avec une bande son crachouillante sur une sono minable, qui s'est déroulée sur une scène nue sans aucun décor ! Si ce n'est pas de l'amour cela ! Et je ne suis pas le seul : On pense aussi à ces héros qui assistent pour des dizaines d'euros à des spectacles de danse depuis des fonds de loges où l'on est debout et où l'on doit se contorsionner pour entrevoir ce qui se passe sur scène. Franchement, parler avec dédain de ce public là qui est celui de la danse, c'est marcher sur la tête !

[sophia]

Il me semble justement que l'on n'a guère vu l'autre jour les danseurs "entrechatter", "fouetter" (Salenko, Krysanova), "pirouetter" et "sauter" (Simkin, Merkuriev), bref, faire la démonstration d'un certain savoir-faire technique (ce que je me garde bien de regarder de haut, à la différence de beaucoup), apte à être sublimé par le talent particulier de certains, qu'on appelle les étoiles. Ce que l'on a vu se résumait surtout à une "virtuosité" du lever de jambe, ce qui est tout autre chose à mon avis. Pour le reste, renouvellement du répertoire ou de la formule, pourquoi pas... mais il faut aussi savoir l'équilibrer avec du "connu" - c'est la loi du genre, car c'en est un.
La leçon de ce gala, comme dit Hermine, c'est surtout "recherche chorégraphe désespérément", car si la danse classique a aujourd'hui le visage de ce que nous avons vu dimanche - formatage esthétique et médiocrité conjugués - alors, oui, on peut comprendre que l'on aime à se réfugier dans les valeurs sûres et bien rodées (Corsaire, Diane et Actéon, DQ, etc...), qui ont le mérite de dessiner de manière un peu moins impressionniste ou stéréotypée les contours de danseurs supposés en devenir.
Personnellement, j'apprécie les galas, le jeu qu'ils proposent et imposent aux danseurs, et l'horizon "cirque" ne me gêne pas, c'est quelque chose qui a toujours existé dans la danse. Mais encore faut-il des interprètes aptes à l'assumer (le gala des Etés de la danse était merveilleux et exemplaire à cet égard).
Sinon, je ne vois pas ce que la conclusion de Mannoni a de choquant, j'aimerais qu'il ait toujours la même acuité.

[haydn]

Après la pub de la "concurrence", la nôtre

L'article de l'amie Sophia est en ligne sur le site de Dansomanie avec les photos ad-hoc (ce sont les deux mêmes images qui ont été fournies à tous les médias).


19 septembre 2010 : Gala des Etoiles du XXIème siècle au Théâtre des Champs-Élysées

[Perle]

En ce qui me concerne cet article est parfait. Ceux qui n'ont pas vu se spectacle pourront se faire une idée de ce moment (qu'ils n'aient pas de trop grands regrets et ne pas avoir été là)

[Florestiano]

Quel plaisir de vous lire, sophia !

[Lanou]

Je viens de m'apercevoir qu'un nouveau programme était sur le site, et dont je ne pense qu'il eût été question ici:
http://www.theatrechampselysees.fr/saison-detail.php?t=3&s=194 le 6 décembre 2010


Gala Hommage à M. Plissetskaïa

Musique enregistrée
Sherwood Productions
Pas de deux (Don Quichotte, Lac des Cygnes, Raymonda, Le Corsaire, Carmen Suite, La Dame de Pique) et projection du film documentaire « Ave Maïa » par Nikita Tikhonov


Maria Alexandrova, Ilze Liepa,
Elena Kazakova, Nikolaï Tsiskaridze, Mikhail Lobukhin, Artem Yachmennikov,
Andrey Merkuriev danseurs
du Théâtre Bolchoï de Moscou
Alina Somova et Vladimir Shklyarov danseurs du Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg
Liudmila Konovalova danseuse du Ballet de l'Opéra de Berlin

[haydn]

Merci Lanou, on ne pourrait pas suggérer au Quai d'Orsay de célèbrer l'amitié franco-russe tous les ans?

[sophia]

Florestiano l'avait signalé plus haut (mais c'est pas grave, Lanou, il faut faire de la pédagogie, comme dirait l'autre... ).

[sophia]

Peut-être déjà signalé ailleurs...

Le dimanche 14 novembre, à 11h :

Dans le cadre du Centenaire Jean-Louis Barrault

Baptiste ou l’art du geste

Martinez - Pantomime-ballet
Barrault - "Le Langage du corps" (extraits)
et les Musiques à danser de la Compagnie Renaud-Barrault

José Martinez, danseur étoile de l’Opéra de Paris
mise en espace

Clément Hervieu-Léger, de la Comédie-Française
lecteur

Arantxa Sagardoy
danse

http://www.theatrechampselysees.fr/saison-detail.php?t=9&s=122

[sophia]

Déjà un petit changement pour le gala-hommage à Maïa Plissetskaïa du 6 décembre :

Evguénia Obraztsova figure a présent parmi les participants, apparemment en remplacement d'Alina Somova, si l'on se fie à leurs sites respectifs.

[haydn]

Dansomanie était ce soir invité à la conférence de presse donnée au Fouquet's (on ne se refuse rien!) en présence de Maïa Plissetskaïa, de Rodion Chédrine et d'Andris Liepa, qui faisait office de maître de cérémonie. Carla et Nicolas, eux, avaient séché...







Le programme détaillé de la soirée nous a été communiqué :




La présence d'Agnès Letestu n'est pas absolument certaine. Il serait toutefois dommage qu'il n'y ait pas de représentant de notre compagnie nationale lors de ce gala qui s'inscrit dans le cadre de l'année France-Russie.


Andris Liepa a effectué les présentations d'usage, et a précisé que le titre du gala avait été choisi en référence à Ave Maïa, un ballet que Maurice Béjart avait écrit spécialement pour Maïa Plissetskaïa. Le programme mêle répertoire traditionnel russe et ouvrages contemporains. Il s'agit également de faire interpréter par des artistes chorégraphiques d'aujourd'hui des ouvrages autrefois dansés par Maïa Plissetskaïa.

Ce gala répond à une proposition du Théâtre des Champs-Elysées, qui souhaitait voir revenir Maïa Plissetskaïa à Paris après le succès remporté par la soirée donnée à l'Espace Cardin à l'occasion du quatre-vingtième anniversaire de la célèbre danseuse. M. Liepa a également insisté sur le rôle important joué par l'Ambassadeur de Russie à Paris, grand amateur de ballet, et qui fait beaucoup pour promouvoir la danse russe en France.

Maïa Plissetskaïa rappelle pour sa part que c'est en France qu'elle a remporté ses premiers grands succès internationaux. Mlle Plissetskaïa souligne également que, selon elle, la danse classique russe a atteint un très haut niveau, tout en précisant néanmoins que ce qu'elle perçoit d'un danseur, c'est avant tout son talent - ou son absence de talent -, indépendamment de sa nationalité ou de son école.

"De mon temps, affirme-t-elle, on avait des gens qui étaient soit de grands artistes, soit de grands techniciens. Maintenant, avec des danseurs tels Alina Somova ou Léonide Sarafanov, on a les deux à la fois. Avant, il fallait choisir, ou l'un, ou l'autre."


A une journaliste qui demandait à Maïa Plissetskaïa quelles étaient ses compagnies contemporaines préférées, la danseuse répondit :

"- Les compagnies contemporaines que je préfère ont pour la plupart aujourd'hui disparu. J'aimais particulièrement Alvin Ailey, Mats Ek aussi est une personnalité à part. Mais pour moi, le plus grand chorégraphe du XXème siècle, c'est Maurice Béjart. Après lui, il est difficile d'inventer encore quelque chose de neuf.

- Et Angelin Preljocaj, dont la compagnie s'est récemment produite avec le Bolchoï à Moscou?

- Je ne peux pas en parler, je ne l'ai pas vue."


Pour Dansomanie, nous avons demandé à Maïa Plissetskaïa si la danse était toujours - comme c'était le cas à l'époque soviétique - une vitrine de la culture russe à l'étranger :

"Dans la Russie soviétique, le ballet était source de prestige, on en était fier, on s'en "vantait" (traduction russe incertaine). Avant la disparition du Rideau de fer, on emmenait tous les invités politiques étrangers voir des spectacles de ballet, et pour faire bonne impression sur les visiteurs, les représentations étaient extrêmement soignées.

Aujourd'hui, le ballet n'intéresse plus vraiment les politiciens. Je dois tout de même dire que lors de la représentation du Petit cheval bossu au Théâtre du Châtelet, hier, j'ai été agréablement surprise. S'il n'y avait pas de membres du gouvernement, des personnalités politiques de premier plan s'étaient tout de même déplacées. Quand j'ai entendu sortir de leur bouche des "merveilleux", "formidable", je me suis dit que cela devait encourager les autorités russes à persévérer dans leurs efforts pour promouvoir la danse. Si les politiciens veulent utiliser la danse pour "vendre" leurs propres idées, eh bien, tant mieux!

Diaghilev était le premier à avoir compris l'importance de la danse pour promouvoir la culture russe. Et avec la danse, pas de problème de traduction! (La remarque de Maïa Plissetskaïa faisait suite à une anecdote survenue à Moscou avec des VIPs japonais, mais qu'une erreur de traduction a rendu incompréhensible aux Français qui assistaient à la conférence de presse, ndlr.)."

Maïa Plissetskaïa a conclu la séance en plaisantant : "Ce qui est sûr, c'est que le 6 décembre, je ne danserai pas au Théâtre des Champs Elysées", ce à quoi Andris Liepa répondit : "Une révérence de Maïa Plissetskaïa vaut tous les ballets".