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sophia
Inscrit le: 03 Jan 2004 Messages: 22163
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Posté le: Dim Mar 15, 2015 2:20 am Sujet du message: |
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Miracle, nous tenons enfin un Cygne à l'Opéra de Paris!
Comme dans Nikiya il y a quelques saisons, Héloïse Bourdon signe de magnifiques débuts en Odette-Odile, avec une personnalité - c'est bien normal - plus affirmée encore : technique qui se fait oublier, musicalité jusqu'au bout des doigts, sens du geste et du personnage, attention aux partenaires, force et lyrisme conjugués, tout y était, auréolé d'une autorité royale, en blanc comme en noir. Du coup, ses deux partenaires, débutants eux aussi, paraissaient un peu éclipsés, même s'ils n'ont pas démérité (les adages avec le Prince étaient, il faut le dire, impeccables).
Je compléterai sans doute plus tard, car il y a probablement des choses à dire sur le reste - pour le meilleur (l'acte IV pour réconcilier tout le monde) et aussi pour le pire (l'acte I, brouillon et anxiogène, et les danses de caractère, fades et sans caractère).
Côté costumes, il semble qu'il y ait eu quelques changements dans l'acte I, et les effets "délavés" des robes de ces dames ne sont vraiment pas très heureux.
Dernière édition par sophia le Dim Mar 15, 2015 12:43 pm; édité 3 fois |
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Garance39
Inscrit le: 22 Déc 2012 Messages: 54
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Posté le: Dim Mar 15, 2015 2:28 am Sujet du message: |
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Ce soir ce n'est pas Héloïse Bourdon la danseuse que j'ai vu mais un cygne merveilleux, tour à tour, gracieux, émouvant, déchirant puis machiavélique !!! Ce soir une Etoile est née..... Merci pour ces magnifiques photos Haydn !!!!!
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haydn Site Admin
Inscrit le: 28 Déc 2003 Messages: 26657
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Posté le: Dim Mar 15, 2015 2:43 am Sujet du message: |
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Ce devait être le Lac d'Héloïse Bourdon, et ce fut le Lac d'Héloïse Bourdon ; pour sa première Odette/Odile, la ballerine, qui avait raté de peu l'accession au grade de Première Danseuse lors du dernier concours de promotion, a frappé un grand coup, avec une prestation qui n'était en rien inférieure à celle d'étoiles chevronnées de l'Opéra de Paris. Ce soir, ce fut sans conteste SA représentation. On l'attendait, au vu de son tempérament, surtout en Cygne blanc, mais elle fut également une excellente Odile, avec ce qu'il fallait d'agressivité et de cynisme. Elle se sera de plus offert le luxe d'une vraie série de 32 fouettés (31 tours 1/2, pour être tout à fait honnête!), exploit que l'on n'avait pas vu depuis belle lurette sur une scène de la Capitale. Pour ne rien gâcher, les pirouettes ont été exécutées sans déploiement exagérément visible d'efforts physiques, et la danseuse est restée parfaitement dans son axe tout au long de la giration. En Odette, elle a pu faire valoir, de manière plus prévisible cette fois, ses qualités de lyrisme (avec des ports de bras plus jolis que la norme "habituelle" à l'Opéra de Paris, où l'accent est surtout mis sur le travail des pointes) et, comme Ludmila Pagliero, sa stabilité dans les équilibres.
Josua Hoffalt, qui faisait également ses premiers pas en Siegfried, était un prince aux lignes élégantes et racées, très différent de Mathias Heymann. La redoutable variation lente qui conclut l'acte I a été prise sur un tempo relativement allant, ce qui est une bonne chose sur le plan musical. Néanmoins, Josua Hoffalt, qu'on imaginait davantage en danseur d'adage, s'est montré plus prosaïque que son prédécesseur le soir de la première. Il a également (mais c'est chez lui une pratique plus ou moins assumé), pris, semble-t-il, quelques licences avec la chorégraphe (doubles tours en l'air supprimés?). Curieusement, dans les passages plus extravertis du troisième acte (pas-de-deux/trois du Cygne noir), il s'est là avéré plus démonstratif, spectaculaire que Mathias Heymann, et a conclu sur un très beau quatrième acte.
Troisième (!) prise de rôle de la représentation, Florimond Lorieux, qui se parait des atours de Rothbart. Même s'il n'avait pas été promu, il avait, comme Héloïse Bourdon, réussi un joli concours en novembre 2014, avec un Marco Spada qui restera dans les mémoires. Ses premiers pas dans le rôle du précepteur pervers auront aussi été couronnés de succès. Très correct sur le plan technique, il a par ailleurs intelligemment composé son personnage, soulignant ses ambiguïtés et son machiavélisme. Chez Nouréev, Rothbart en pince de manière plus ou moins inavouée pour Siegfried, et manipule Odile afin de détourner définitivement le jeune aristocrate objet de son désir de la belle et pure Odette. On peut d'ailleurs se demander si le chorégraphe n'a pas ici délibérément projeté ses propres fantasmes, mais ce n'est pas à nous qu'il appartient de trancher la question. Il n'en reste pas moins que l'interprétation de Florimond Lorieux est sensible et cohérente - même si elle ne vaut évidemment que pour la version du Lac des cygnes, et serait déplacée dans une lecture moins "psychanalytique" du célèbre ballet. Seul petit point faible, le maniement de la cape, où l'expérience d'un Karl Paquette lui fait défaut! La performance de M. Lorieux aura en tous cas reçu l'approbation du public, qui l'a amplement ovationné, tout comme le couple principal. L'auditoire de l'Opéra Bastille était assez chaud ce soir, et les rappels ont été très nombreux (il y en aurait certainement eu encore davantage si le régisseur n'avait pas fini par baisser autoritairement le rideau).
Tout serait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possible, s'il n'y avait pas tout de même quelques "mais", en grande partie les mêmes que ceux que nous avons évoqués lors de la première : Acte I brouillon au niveau du corps de ballet, avec une fois de plus une chute, chez les dames cette fois et une valse ratée.
Le pas de trois était plus homogène que précédemment, et Germain Louvet, toujours très distingué, n'écrasait pas ses deux partenaires, Fanny Gorse et Hannah O'Neill. Sa technique n'est cependant pas aussi explosive que celle de François Alu, et on pouvait aussi relever quelques réceptions un peu instables. Germain Louvet désorientera certainement moins les habitués de l'Opéra de Paris que François Alu, dans la mesure où il est plus conforme, sur le plan morphologique (mince, élancé) à ce que Brigitte Lefèvre a mis en avant durant les vingt ans de son règne. François Alu, plus compact, plus "sportif", renvoie davantage aux danseurs de générations plus anciennes, tels Cyril Atanassoff ou Jean Guizérix, à une époque où la performance physique n'était pas systématiquement considérée comme une faute de goût.
On ne s'appesantira pas trop sur l'acte III, aux danses de caractère ratées sur le plan chorégraphique, nous l'avons déjà souligné à maintes reprises, et exécutées avec une relative vulgarité, ce qui détonne à l'Opéra de Paris, où les artistes sont plutôt réputés très policés.
Autre petite déception, le pas de quatre des Petits cygnes, très bien réussi le soir de la première et qui là était un peu pataud, avec un manque de synchronisation visible entre les exécutantes, notamment au niveau des ports de tête. Le quatuor des Grands cygnes, emmené par une Laetizia Galloni douée d'un joli ballon, était en revanche excellent ce soir, à l'image des ensembles féminins des deux actes blancs.
Le IVème acte, sûrement l'une des chorégraphies les plus abouties et les plus personnelles de Nouréev, conserve toute sa magie. Il faut néanmoins avoir conscience qu'une page se tourne, qu'une grande partie du corps de ballet est en train de se renouveler, et que ces ouvrages ne pourront plus être interprétés de la même manière, en l'absence des "anciens" qui ont encore eu la possibilité de travailler sous la direction du célèbre danseur russe. Il ne s'agit pas de ressasser que "c'était mieux avant", il est normal qu'une troupe évolue, tout comme son répertoire, et l'on sent vraiment que se rapproche le moment ou il n'y aura plus d'autre choix possible que de "passer à autre chose". L'histoire ne ferait d'ailleurs que se renouveler, puisque le Lac des cygnes de Nouréev avait lui-même supplanté - non sans résistances - celui de Bourmeister, qui avait tenu plus de vingt ans à l'affiche de la compagnie nationale. Tempus fugit... |
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fandorine
Inscrit le: 29 Avr 2012 Messages: 379
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Posté le: Dim Mar 15, 2015 9:47 am Sujet du message: |
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Au vu de ces commentaires élogieux, il y aurait donc matière pour Benjamin Millepied à joindre l'action à la parole et à "oser" en nommant Héloïse Bourdon étoile sans passer par la case Première Danseuse. C'est une très belle saison pour la danseuse : l'étoile d'Etudes magistrale, un concours magnifique , Clara de Casse-Noisette presque au pied levé, une présence remarquée dans AndréAuria et enfin le Lac. Sans compter, les prises de rôles réussies des saisons précédentes dans la Bayadère et la Belle. Certaines étoiles n'avaient pas prouvé autant dans les grands rôles du répertoire avant d'être nommées.
Pourquoi lui faire gaspiller son potentiel plus longtemps dans le corps de ballet?
Dernière édition par fandorine le Dim Mar 15, 2015 11:05 am; édité 1 fois |
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NEOPHYTE
Inscrit le: 25 Sep 2011 Messages: 1062 Localisation: PARIS
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Posté le: Dim Mar 15, 2015 10:59 am Sujet du message: |
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fandorine a écrit: |
Au vu de ses commentaires élogieux, il y aurait donc matière pour Benjamin Millepied à joindre l'action à la parole et à "oser" en nommant Héloïse Bourdon étoile sans passer par la case Première Danseuse.
Pourquoi lui faire gaspiller son potentiel plus longtemps dans le corps de ballet? |
Vous résumez parfaitement mon opinion après cette représentation menée de main de maître par Héloise Bourdon.
Déjà "sa" Bayadère m'avait enthousiasmée, mais là elle atteint des sommets.
Je me doutais qu'elle serait parfaite pour danser et interpréter Odette-Odile, mais là je l'ai trouvée exceptionnelle.
Son port de bras est fabuleux, sa musicalité est incroyable, ses équilibres sont maitrisés, son interprétation est théâtralement pleine de subtilité et, cerise sur le gâteau, les pas-de-deux avec Josua Hoffalt fonctionnent très bien.
Siegfried n'est pas un prince de conte de fées qui "assure", il semble ne pas avoir beaucoup de caractère et se laisse influencer, ce qui le conduit à perdre la femme qui avait fait naître un sentiment (enfin) fort dans son coeur, en fait il se réveille un peu tard et Rothbart le machiavélique a gagné.
Josua Hoffalt s'est montré un excellent partenaire et ce Siegfried qui pour moi danse mieux lorsqu'Odette-Odile est dans les parages me va bien.
C'est Rothbart qui incarne la virilité, et j'ai adoré Florimond Lorieux dans ce rôle, sa technique est à la fois ciselée et physique, il était parfait et logiquement à la fin c'est lui qui gagne...!
Dans le pas de trois j'ai beaucoup aimé Hannah O'Neill et Germain Louvet, c'était vraiment bien.
Effectivement, il y a un problème sur les costumes des danses au château, les robes sont floues et mal cintrées et comme les bras sont couverts, j'ai eu l'impression que les danseuses étaient gênées dans leurs mouvements par le haut de la robe, un peu comme si la robe restait immobile avec le corps qui bouge en-dessous mais on ne le voit pas, c'était bizarre.
Pour les garçons, c'était moins grave mais les hauts m'ont semblé trop longs, pas ajustés à la taille et serrés aux épaules.
Donc les costumes des danses au château et les décors ne sont pas supers, mais heureusement il y a les actes blancs et ils sont merveilleux.
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Marie-Ange
Inscrit le: 12 Déc 2010 Messages: 335 Localisation: Paris
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Posté le: Dim Mar 15, 2015 12:41 pm Sujet du message: |
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Ravie de ces impressions sur le Lac d'Héloise Bourdon qui avait époustouflé -sièges à l'orchestre compris!- lors du dernier concours, avec ce que l'on sait de la difficulté d'interprétation à cette occasion dans des variations qui n'en jettent pas avec un coup d'éventail si l'on peut dire. Choisir Mirages -une des variations la plus longue et aride du répertoire- après Le Lac, il fallait oser!
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sophia
Inscrit le: 03 Jan 2004 Messages: 22163
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 8:43 am Sujet du message: |
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La première du Lac des cygnes vue par Ariane Bavelier dans Le Figaro.
Première aussi pour la journaliste? La langue de bois ravie se fissure à l'occasion pour se livrer à quelques aveux (le couple prévu pour la première - Cozette / Bullion - "n'a pas tout à fait convaincu. Ils repasseront plus tard.") ou tirer sur ce qu'elle adorait hier ("Francois Alu saute aux étoiles mais avec les lignes fortes et l'énergie sans nuance d'un taurillon. Il lui faudra beaucoup travailler pour son premier rôle de Siegfried - est-ce une bonne idée? - en clôture de cette série du Lac."). Conclusion quelque peu sibylline par ailleurs.
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Ornella
Inscrit le: 03 Mai 2013 Messages: 363 Localisation: Versailles
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 10:25 am Sujet du message: |
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Quel affront pour Emilie Cozette et Stéphane Bullion !
Enfin, cela explique l'annonce du changement le jour-même.
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sophia
Inscrit le: 03 Jan 2004 Messages: 22163
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 10:54 am Sujet du message: |
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La seule chose qui me gêne, c'est le passage brutal d'un discours ultra-complaisant envers l'Opéra, subi pendant des années, à cela (quoiqu'allant toujours dans le sens de la direction).
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fandorine
Inscrit le: 29 Avr 2012 Messages: 379
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 11:30 am Sujet du message: |
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Ornella a écrit: |
Quel affront pour Emilie Cozette et Stéphane Bullion !
Enfin, cela explique l'annonce du changement le jour-même. |
On peut imaginer la pression pour Emilie Cozette de faire son retour après de longs mois d'absence dans un rôle si exigeant. D'ailleurs, elle en parle dans le petit reportage diffusé au JT de M6.
Pour la Belle, le retrait d'Eleonora Abbagnato pour la diffusion au cinéma m'avait fait le même effet.
Pour le coup, la journaliste manque un peu d'élégance. Ce serait plus juste de voir cette distribution avant de critiquer (notre cher modérateur aurait sans doute pris la paire de ciseaux pour un tel billet sur le forum).
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sophia
Inscrit le: 03 Jan 2004 Messages: 22163
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 11:34 am Sujet du message: |
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Idem pour Alu, flingué (c'est tout comme) avant même d'avoir dansé Siegfried.
Le retrait d'Abbagnato de la retransmission ciné de La Belle avait alors été justifié par une blessure. Les temps changent, il faut croire, mais l'on sait toujours d'où vient le vent...
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Ornella
Inscrit le: 03 Mai 2013 Messages: 363 Localisation: Versailles
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 11:41 am Sujet du message: |
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Citation: |
On peut imaginer la pression pour Emilie Cozette de faire son retour après de longs mois d'absence dans un rôle si exigeant. |
C'était un peu étonnant que son retour ait lieu lors de la première, pour ces raisons.
Dernière édition par Ornella le Lun Mar 16, 2015 12:13 pm; édité 1 fois |
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sophia
Inscrit le: 03 Jan 2004 Messages: 22163
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 11:42 am Sujet du message: |
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Ould-Braham est bien programmée sur la première de Paquita. Et Odette était quand même censée être "le" rôle d'Emilie Cozette.
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Ornella
Inscrit le: 03 Mai 2013 Messages: 363 Localisation: Versailles
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Florestiano
Inscrit le: 28 Mai 2010 Messages: 1802
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Posté le: Lun Mar 16, 2015 11:53 am Sujet du message: |
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C'est pourquoi il faut se méfier des poussées hormonales des journalistes et des balletomanes à l'issue d'une soirée, sur le thème "han, c'est vraiment une Etoile" ou "vite, une nomination", phénomène récurrent. Entre les chouchous des uns, ceux des autres, ceux ou celles qu'on trouve troooop beauuuxx, ceux ou celles qui sont vraiment super touchants, ou ceux dont le charisme éclabousse pour de vrai, la moitié du corps de ballet a dû se retrouver catapultée Etoile un jour...
Mais en tout état de cause, ces gens-là lèchent, puis ils lâchent, puis ils lynchent, c'est imparable. Et l'exemple d'Alu illustre bien cette dynamique...
[Le fait est que quand Alu sera Etoile, les points de comparaison seront les grandes Etoiles internationales, et il faudra assurer... Parce qu'en dehors du cocon douillet de l'Opéra de Paris, personne ne fait de cadeau.
Et je me demande d'ailleurs dans quelle mesure une large partie des défections en chaîne pour le festival du Mariinsky ne tient pas à une certaine "angoisse" des danseurs d'affronter seuls, c'est-à-dire hors tournée du Ballet - le public russe. Incidemment, cela m'amuse de voir que ces derniers temps, ce sont Pagliero et Park (deux "pièces rapportées" comme disent certains avec mépris) qui représentent la tête haute l'école française à Saint-Pétersbourg. ]
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