FILMER LA DANSE

[Nesle]

Je sais bien que filmer un spectacle dansé est la quadrature du cercle, mais que pensez-vous de la captation télévisée du spectacle Robbins diffusée hier sur sur Mezzo ? Pour moi, c'est une catastrophe. L'exemple type d'un réalisateur qui filme la danse comme s'il ne s'agissait que de gym accompagnée de musique. Point.

Plus les danseurs sont de simples silhouettes bien alignées, plus il semble content de lui-même.
Résultat : dans "En Sol", on ne devine pas une seconde les visages des solistes... Ils pourraient s'appeler X, Y ou Z, peu importe.

Il me semble que la danse - et c'est encore plus crucial pour la danse classique, si on veut qu'elle ne meure pas - nécessite une implication de l'être entier, un don de soi absolu. Les plus grands moments de danse classique sont ceux où le spectateur a l'impression de voir une "âme"... danser. Les expressions du visage, l'osmose entre les interprètes, le geste d'une main, une étreinte vue de près, sont aussi importants que des lignes de danseurs qui s'agitent en maillot de bain, soit-il signé Erté. Pas un seul gros plan sur le pas de deux, il faut le faire ! L'idée du contraste entre ce mouvement et les autres n'a donc même pas traversé l'esprit du réalisateur ?

Pour une fois que nous avions le privilège exceptionnel d'avoir du Robbins filmé, quelle déception ! J'imagine Dances at a gathering filmé de la même façon, avec des fourmis au milieu d'un terrain de foot (j'exagère, mais c'est presque cela !)

Je ne pense pas qu'on puisse confier des retransmissions télévisées à des personnes qui n'ont pas réfléchi à un moyen d'essayer de résoudre ce problème, même s'il peut leur arriver de faire parfois le mauvais choix. En gros, n'importe qui aurait pu signer la réalisation d'hier. Je prévois trois ou quatre plans différents, j'appuie sur mes boutons, et le tour est joué !
Quant au spectateur, il trépigne de frustration...


PS - J'étais tombée un jour par miracle sur une VHS d'une Giselle "live" de Barishnikov et Gelsey Kirkland et le problème était le même. Pas un seul plan ne permettait de les reconnaître... Une horreur.

[haydn]

Je ne peux pas juger de la retransmission de la soirée Robbins, que je n'ai pas vue. Le réalisateur, Vincent Bataillon, avait déjà signé le film du Boulon, de Chostakhovitch, dans la chorégraphie d'Alexeï Ratmansky. Il ne me semble pas que la captation ait été particulièrement mauvaise. Il faudra que je re-visionne le DVD.


Maintenant, filmer la danse n'est pas donné à tout le monde. Toutes les captations réalisées par François Roussillon, par exemple, ne sont pas des chefs d'œuvres, mais c'est quelqu'un qui possède une bonne connaissance des chorégraphies, et qui sait distinguer ce qu'il faut mettre en avant et ce qui relève de l'anecdotique.

[akhmatova]

Je confirme l'impression de Nesle. Sans vouloir des "close up" par tout, c'était très éloigné et très sombre, avec des fois, cette tendance fâcheuse de filmer du haut, du très haut. Rien à voir avec le Boulon.

[Nesle]