Au-delà des controverses que suscitent immanquablement des créations telles que Play, lorsqu'elles figurent à l'affiche d'une compagnie chargée d'histoire telle que le ballet de l'Opéra national de Paris, la parution en DVD / Blu Ray de la captation de l'ouvrage d'Alexander Ekman, réalisée il y a moins d'un an, en décembre 2017, au Palais Garnier, peut exciter la curiosité, en raison de la difficulté à filmer un dispositif scénique aussi atypique. L'orchestre sur scène, la pluie de vingt mille balles de tennis, les ébats dans la fosse, le lâcher de ballons au milieu des spectateurs, tout ceci constitue un véritable défi pour le réalisateur, Tommy Pascal, ancien danseur du Béjart Ballet Lausanne, reconverti dans le cinéma. Tommy Pascal a d'ailleurs déjà collaboré avec Alexander Ekman et la firme Bel Air Media pour la captation de Midsummer night's dream au Ballet Royal de Suède, à Stockholm, en 2016.

Lorsque l'on découvre l'enregistrement de Play, la surprise est, paradoxalement, qu'il n'y a pas de surprise. La prise de vue reste très classique, avec un cadrage essentiellement de face et de trois quarts sur chaque côté. En bref, on a affaire à un «film de danse» tel qu'on le concevrait pour Giselle ou Don Quichotte. Ou presque. Les possibilités spécifiques du cinéma ne sont ici pas vraiment utilisées, contrairement aux captations très sophistiquées réalisées pour Pathé Live au Nederlands Dans Theater en 2012-2013 – avec déjà une création d'Alexander Ekman, Maybe Two. Les retransmissions ont malheureusement été abandonnées après une saison, faute d'une rentabilité commerciale suffisante. C'est un peu dommage, car le sujet s'y prêtait et Play pouvait aussi être une invitation à jouer avec la caméra. Mais une telle entreprise aurait sans doute était trop complexe à mettre en œuvre au Palais Garnier, et aurait probablement exigé un tournage hors représentation publique, ce qui aurait fait exploser les coûts.

Non crédités en tant que solistes, hiérarchie oblige, ce sont pourtant les personnages récurrents – un duo caricatural de cadres sup' en tailleur et costume – incarnés par Caroline Osmont et Simon Le Borgne qui captent toute l'attention. Hésitant entre conformisme et rébellion (marqué par le troc du costume pour un sweat-shirt orange), ils déroulent le fil conducteur de la pièce. Même si Muriel Zusperreguy et Stéphane Bullion se voient gratifiés d'un pas de deux assez développé dans la seconde partie, les solistes principaux doivent se contenter de la portion congrue.

Simon Le Borgne

La réalisation cinématographique, qui fait la part belle à Mlle Osmont et à M. Le Borgne, accentue encore cette impression que l'on pouvait déjà ressentir dans la salle lorsqu'on assistait aux représentations. Ce parti-pris n'est d'ailleurs pas injustifié, car les deux artistes, plutôt habitués aux emplois anonymes au sein du corps de ballet, font montre de beaucoup de sens théâtral et de présence, et ce sont eux qui assurent la cohésion d'un ouvrage parfois déroutant et hétéroclite.

Autre vedette de cette captation vidéo : la musique. La partition «jazzy» de Mikael Karlsson, collaborateur habituel d'Alexander Ekman, a été remarquablement bien enregistrée et l'orchestre «live», installé sur un praticable au lointain, possède une présence étonnante. Le son est si exempt de défauts et de bruits parasites qu'on se demande même s'il n'a pas fait l'objet d'une prise séparée, et post-synchronisée, cette fois vraiment «comme au cinéma». Le film se conclut d'ailleurs en chanson, avec «Hear my prayer». Ce «spiritual» a valu à son interprète, l'Américaine Calesta Day, une célébrité quasi-instantanée à travers les États-Unis en 2016.

Play
Musique : Mikael Karlsson
Chorégraphie : Alexander Ekman
Décors : Alexander Ekman
Costumes : Alexander Ekman, Xavier Ronze
Lumières : Tom Visser
Vidéos : T. M. Rives

Réalisation : Herbert Ross
Scénario : Arthur Laurents
Bande-son : Louise Alenius
Producteurs : Arthur Laurents, Herbert Ross, Roger M. Rothstein, Nora Kaye
Directeur de la photographie : Robert Surtees
Montage : William Reynolds
Décors : Albert Brenner, Marvin March
Costumes : Tony Faso, Albert Wolsky

Durée : 1h46

Avec : Muriel Zusperreguy, Stéphane Bullion, Vincent Chaillet
Marion Barbeau, Aurélia Bellet, Alice Catonnet, Sylvia Saint-Martin
Ida Viikinkoski, Juliette Hilaire, Laurène Lévy, Charlotte Ranson, Jennifer Visocchi
Claire Gandolfi, Marion Gautier de Charnacé, Clémence Gross, Caroline Osmont
Sofia Rosolini, Chelsea Adomaitis, Margaux Gaudy-Talazac, Mouget Shanti

Aurélien Houette, Allister Madin, Marc Moreau, Jérémy-Loup Quer
Daniel Stokes, Simon Valastro, Adrien Couvez, Yvon Demol, Alexandre Gasse
Antoine Kirscher, Mickaël Laffon, Hugo Vigliotti, Takeru Coste
Simon Le Borgne, Antonin Monié, Andrea Sarri

Calesta «Callie» Day, chant
Frédéric Vaysse-Knitter, piano solo
Allan Watts, voix off


Sortie commerciale le 28 septembre 2018

1 DVD Référence : BAC155 Code-barre : 3760115301559 Livret : oui Durée : 106 min. Bonus : non Sous-titres : N/A Image : Couleur, 16/9, NTSC Son : PCM Stéréo + Dolby 5.1 Code région : 0 (toutes zones)

1 BLU-RAY Référence : BAC551 Code-barre : 3760115304512 Livret : oui Durée : 106 min. Bonus : non Sous-titres : N/A Image : Couleur, 16/9, Full HD Son : DTS HD Master audio 5.1 Code région : A,B,C (toutes zones)

1 DVD Bel Air Classiques


Prix public conseillé : 26 € (DVD) - 28 € (Blu-Ray)