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Ballet National de
Bordeaux
27
décembre 2017 : Don Quichotte
(Charles Jude) au
Grand Théâtre de Bordeaux
Diane Le
Floc'h (Kitri) - Neven
Ritmanic (Basilio)
Comme
pour souligner la forme de partenariat en train de
s’instituer entre le Ballet de Bordeaux et le Ballet de
l’Opéra de Paris, les deux maisons affichent en
cette fin
d’année le même ballet de
répertoire. Il
n’est pas question ici de comparer les deux productions, mais
la
coïncidence ne manque pas d’interroger, à
l’heure où des moyens de transports rapides
relient les
deux villes. N’en tirons pas de conclusions trop
hâtives.
Nous sommes après tout dans une saison de transition et des
indications plus précises sur les orientations que compte
prendre la nouvelle direction ne manqueront pas d’arriver
bientôt.
La version Charles Jude de Don
Quichotte
est maintenant bien connue. A la place de
l’ingénieux
hidalgo féru de lectures héroïques, elle
propose la
vision d’un artiste peintre plutôt sentimental,
faisant le
portrait d’un modèle qu’il voit dans ses
rêves
et qu’il n’aura de cesse de retrouver à
travers ses
aventures. On s’éloigne sensiblement de
Cervantès,
mais Petipa à son époque
n’était
guère fidèle au modèle romanesque. La
scénographie de cette production harmonise de la
manière
la plus étonnante le jaune ensoleillé des
décors
aux déclinaisons roses et pourpres des costumes. Mais le
noir
simple et uni des personnages principaux donne beaucoup de vigueur
à l’ensemble. Ces costumes
allégés et ce
décor aux attaches temporelles somme toute
imprécises
laisse la plus grande place au jeu des comédiens dans le
ravissant écrin du Grand-Théâtre.
Neven
Ritmanic (Basilio) - Diane Le
Floc'h (Kitri)
Une
des caractéristiques du ballet est de proposer un nombre
impressionnant de rôle secondaires que la compagnie a pour
défi de distribuer de la meilleure des manières.
Certains
de ces rôles sont de purs
«caractères», dont le
jeu mimé exige des talents de comédien. On verra
ainsi
les quatre rôles qui nouent l’intrigue :
Don
Quichotte, Sancho Pança, Gamache et Lorenzo.
D’autres
rôles sont de brefs passages dansés, attendus avec
gourmandise par les balletomanes, et dont les difficultés
techniques incontournables résistent
généralement
aux relectures des différentes versions du ballet.
C’est
le cas notamment des rôles de Cupidon et de la Reine des
Dryades
dans la scène de la vision de Don Quichotte, dont
l’interprétation est une véritable
pierre de touche
pour une compagnie de danse.
Léo Lecarpentier (Le Chef des Gitans - distribution non chroniquée)
Parmi les nombreuses prises de rôles qui animent cette
reprise,
celle du couple principal Kitri-Basilio par Diane Le Floc'h et Neven
Ritmanic était très attendue. Depuis leur
candidature au
concours international de Varna, ces deux danseurs n’ont
cessé de consolider leur partenariat. Ils sont vus
à
présent comme le couple glamour de la troupe bordelaise. Si
l’entrée de Diane Le Floc’h semble
timide aux tous
premiers instants, elle a tôt fait de gagner en assurance,
distribuant force sourires à droite et à gauche,
comme si
l’arrivée de son Basilio la galvanisait. Le pas de
deux
qui clôt le premier acte est éblouissant de
qualité
technique. La danse est large, les lignes sont fermement tenues, les
ports de tête et de bras sans défaut. Les tableaux
suivants ne montreront pas de faille. On pourrait imaginer davantage de
mystère en Dulcinée, produit du rêve de
Don
Quichotte, mais le pas de deux final la voit briller en toute
liberté, avec des fouettés impeccables de
solidité. Son complice Neven Ritmanic déploie en
Basilio
toute la fougue dont on le sentait capable. Doté
d’un
charisme qui le distingue immédiatement, il ajoute
à une
technique à l’élégance bien
française
un jeu scénique toujours en situation. Les portés
à un bras, d’une déconcertante
facilité, et
longuement tenus, déclenchent des applaudissements nourris.
Impressionnant dans des sauts toujours plus hauts, il nous gratifie
dans l’acte final de sa diagonale favorite, devenue sa marque
de
fabrique, celle qui se termine en révoltade.
.

Neven
Ritmanic (Basilio) - Diane Le
Floc'h (Kitri)
Le
couple secondaire formé par Espada et la Fille des rues
réunit Marina Kudryashova et Austin Lui. A noter que, assez
curieusement, ce sont les mêmes danseurs qui
interprètent
le chef gitan et Mercédès. Pourquoi ne pas
être
allé plus loin et ne pas avoir fusionné les
personnages,
comme chez Kader Belarbi à Toulouse? La scène en
aurait
gagné en cohérence. Marina Kudryashova est une
danseuse
aux qualités sûres. Sa danse des couteaux la
montre
souveraine techniquement. Peut-être lui manque-t-il ce brin
d’hispanité, ne serait-ce qu’une
cambrure de dos,
qui la rendrait indispensable en étourdissante Andalouse.
L’Espada d’Austin Lui est un contre-emploi
manifeste, ne
proposant ni la prestance, ni l’assurance pour incarner de
manière satisfaisante le fat torero. On retrouve Austin Lui
heureusement davantage à son aise au deuxième
acte en
bondissant chef gitan.
Laure Lavisse est une reine des Dryades de première valeur
dans
sa variation. Ses développés, ses
fouettés, ont
toute l’élévation qu’il faut.
Elle nimbe en
outre son personnage d’une aura de mystère, celle
justement qui manque à la Dulcinée de Mlle Le
Floc’h. Alice Leloup est étincelante de finesse
dans la
célèbre variation de Cupidon. Les deux amies de
Kitri
sont incarnées par deux nouvelles venues dans la compagnie,
les
séduisantes Marini da Silva Vianna et Saki Kuwabara. Gageons
qu’on les reverra bientôt dans des rôles
encore plus
importants.
Guillaume
Debut (Sancho Pança) - Kase Craig (Don Quichotte)
Parmi les rôles de comédie, on a un regard
affectueux
envers le Sancho Pança ébouriffé de
Guillaume
Debut, poétique et drôle. Si Kase Craig et
Alexandre
Gontcharouk maintiennent dans un registre agréablement sobre
leurs personnages respectifs, on n’en dira pas autant du
Lorenzo
de Pierre Devaux, qui envahit la scène de manière
intempestive par un mime trop appuyé.
On le voit une fois de plus, le Ballet National de Bordeaux regorge de
talents les plus évidents. A partir de ce
précieux
matériau humain, la volonté artistique de les
diriger ne
peut pas manquer non plus.
Jean-Marc
Jacquin © 2017, Dansomanie
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Laure Lavisse (La Fille
des rues / Mercédès - distribution non chroniquée)
Don
Quichotte - Album photo (grand merci à Julien Behnhamou pour les clichés)

Roméo
et Juliette
Musique : Ludwig Minkus
Chorégraphie : Charles Jude
Décors : Philippe Miesch
Costumes : Pierre-Jean Larroque
Lumières : François Saint-Cyr
Kitri –
Diane Le Floc'h
Basilio –
Neven Ritmanic
La Fille des rues /
Mercédès – Marina
Kudryashova
Espada / Le Chef des Gitans –
Austin Lui
Amies de Kitri
– Marini da Silva Vianna, Saki Kuwabara
Le Chef Gitan –
Oleg Rogachev
La Reine des Dryades –
Laure Lavisse
Cupidon –
Alice Leloup
Don Quichotte –
Kase
Craig
Sancho Pança –
Guillaume Debut
Lorenzo –
Pierre Devaux
Gamache –
Alexandre Gontcharouk
Ballet National de Bordeaux
Orchestre
National de Bordeaux-Aquitaine, dir. Nicolas Brochot
Mercredi
27 décembre 2017 - 15h00, Grand
Théâtre de Bordeaux
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