Du 11 au 13 mars,
Nicolas Le Riche et Clairemarie Osta, anciennes Étoiles de l'Opéra de
Paris, ont investi le Théâtre des Champs-Élysées pour un spectacle
onirique, qui traduit leur duo à la vie comme à la scène.
«Tu
es entré(e) dans ma vie comme une porte qui s'ouvre (…) Tu es en
moi, je suis en toi et pourtant, nous sommes si différents».
Ces déclarations amoureuses, qui s'entremêlent mais se distinguent,
qui sont susurrées ou déclamées en voix-off par Nicolas Le Riche
et Clairemarie Osta eux-mêmes, résumeraient parfaitement le message
du spectacle.
Il était une fois— car c'est ainsi que leur conte
chorégraphique pourrait commencer— deux êtres un peu enfantins
qui croyaient leur symétrie salvatrice alors qu'en réalité, c'est
leur complémentarité qui sera source de réussite. Dans la première
partie du spectacle, en effet, les deux danseurs (lui en noir, elle
en blanc) esquissent des gestes communs, frénétiques, sur une
création musicale envoûtante de Matthieu Chedid. On ne sait qui,
dans ce duo, est le pilier de l'autre. Ils semblent sur la même
longueur d'ondes, quitte à parfois tomber dans une certaine routine.
Les mouvements se répètent, s’essoufflent, à la limite de
l'oppression. Dans ce tableau, leur course statique ressemble
davantage à un entraînement sportif qu'aux accélérations subtiles
d'Anne-Teresa de Keersmaeker. En soi, le début de Para-ll-èles
peut dérouter, comme lorsque Le Riche et Osta, incarnant deux
personnages sortis tout droit de leur imagination, joignent leur
corps avec des paroles quasi-inaudibles.
Les guitares de Matthieu Chedid s'estompent alors et
seul le souffle des danseurs se fait musique. Le couple se cherche,
se trouve enfin, jusqu'à une impossibilité totale de séparation.
Une union que l'on pourrait sans mal leur appliquer car, s'ils
n'ont pas souvent dansé ensemble sur la scène de l'Opéra de Paris,
Nicolas Le Riche et Clairemarie Osta ont profité de leur retraite
respective pour multiplier les projets : à commencer par LAAC,
un atelier de danse lancé il y a quelques mois et destiné aux
amateurs comme aux néophytes, au Théâtre des Champs-Elysées.
Faisant de ce lieu leur nouveau terrain, c'est également ici qu'ils
créent Para-ll-èles, poursuivant leur entreprise commune.
Ainsi, les deux néons jaunes du préambule, qui, d'abord parallèles,
fusionnent ensuite, traduisent non seulement leur vie, mais aussi le
premier tableau. Un sous-titre redondant, mais qui fait le lien avec
la seconde partie, bien plus intéressante.
Nicolas Le Riche et Clairemarie Osta
Quand Clairemarie Osta sort subitement de la scène,
Nicolas Le Riche entreprend un solo chorégraphique intense, qui nous
ramène délicieusement en arrière, avec ses performances telles que
Le Jeune Homme et la Mort de Roland Petit. Jouant avec
justesse la folie et le manque de l'être cher, l'Etoile reste au
sommet de son art, ses 44 ans semblant n'avoir aucune prise sur son
talent.
Finalement, est-ce un songe ou de véritables
retrouvailles, toujours est-il que la danseuse le rejoint, parée de
pointes qu'elle ne portait pas. Ensemble, ils se lancent dans un
dernier pas de deux, qui reste probablement le meilleur moment du
spectacle. Contrairement au début, leurs chorégraphies ne sont plus
symétriques mais, plus proches de leur formation classique, ils
prouvent que la magie de leur duo, c'est de faire les choses
différemment, mais ensemble. L'image finale est celle d'un mur
d'étoiles... dont ils font indubitablement partie.
Paola Dicelli © 2016, Dansomanie