menu - sommaire



critiques et comptes rendus
Ballet du Capitole de Toulouse

21 février 2013 : «Rythmes de danse» (Belarbi/Forsythe/Godani), à la Halle aux  grains


The Vertiginous Thrill of Eaxctitude
The Vertiginous Thrill of Eaxctitude (chor. William Forsythe)


Ce programme mixte à la Halle aux grains est construit selon la même grille que le précédent : une pièce de Kader Belarbi pour commencer, suivie de deux ballets de chorégraphes contemporains, choisis parmi les noms reconnus de la planète danse. Une différence notable cette fois-ci, la brièveté de la soirée. Une heure et demie, y compris les deux entractes, c’est nettement plus court qu’à l’accoutumée. Serait-ce une tendance de fond?

Autre particularité du programme, il présente l’unique reprise de la saison. The Vertiginous Thrill of Exactitude ("Le Vertigineux Frisson de l’Exactitude") de William Forsythe échappe en effet au renouvellement du répertoire qui fait pièce à l’héritage balanchinien de la compagnie toulousaine. C’est une reprise bienvenue car pour l’occasion, elle nous a conduit à réévaluer notre jugement sur ce ballet qui, lors de son entrée au répertoire en 2009, nous avait semblé n’être qu’un vain exercice de style tournant à vide. En effet, l’ambiguïté qui y est entretenue entre premier et second degré est bien difficile à cerner. Cette ambiguïté, ce sentiment de déséquilibre, sont donnés d’emblée par l’effectif choisi de cinq danseurs, deux garçons et trois filles, nombre peu usité dans les ballets, où règne le plus souvent l’ordonnancement des jardins à la française. Les effets de dissymétrie se multiplient au gré des entrées, des combinaisons et des oppositions par deux ou par trois. Sur la chevauchée menaçante de l’allegro vivace de la grande symphonie en ut de Schubert, jouée à toute allure par une bande son anonyme, les cinq danseurs rivalisent de sauts et de pirouettes, et font se succéder à vitesse accélérée une infinie variété d’épaulements, résumant ainsi l’art de la technique classique.

The Vertiginous Thrill of Eaxctitude
The Vertiginous Thrill of Eaxctitude (chor. William Forsythe)

Isabelle Brusson et Maria Gutierrez, malgré des personnalités dissemblables, opposent leurs pointes d’acier et leurs pirouettes, à peine déparées par les tutus jaunes en soucoupe de Stephen Galloway. Juliette Thelin fait preuve de lyrisme, grâce à des ports de bras aux jolies finitions. Davit Galstyan et Demian Vargas, qui s’affirme pour sa part comme un soliste incontournable au sein de la compagnie, grandissent leurs mouvements, malgré la redoutable vitesse d’exécution. Les danseurs réussissent à dominer le grand plateau de la Halle aux grains, ce qui, on l’a souvent constaté, est une véritable gageure.


Entrelacs
Entrelacs (chor. Kader Belarbi)

Entrelacs, de Kader Belarbi, a été créé en 2007 à Pékin par le Ballet National de Chine. Il s’inspire du dessin et de la calligraphie chinoise, utilisant les danseurs à la façon des traits du pinceau. Il se structure en plusieurs parties. D’abord, trois couples de solistes et douze danseurs du corps de ballet évoluent gracieusement sur les harmonies immobiles de Fratres, de l’incontournable Arvo Pärt, compositeur qui tend à devenir le support préféré des chorégraphes d’aujourd’hui. Puis, les six couples du corps de ballet restent sur scène sur la rythmique du plus rare Rebonds pour percussions de Iannis Xenakis. Les solistes reviennent pour des pas de deux juxtaposés, à nouveau au son de Fratres, mais dans la version bien impudique pour violon et piano, qui plus est à travers une bande son de piètre qualité. Un retour de tous les danseurs vient rapidement et sereinement conclure l’ensemble.

Entrelacs
Entrelacs (chor. Kader Belarbi)

L’alternance de mouvements horizontaux et verticaux met en valeur les lignes des danseurs, et c’est précisément ce qui est recherché dans cette pièce. Les solistes sont choisis parmi les plus longilignes. Les silhouettes du corps de ballet sont encore allongées par de longues robes de tulle transparent. L’atmosphère est douce et sans heurts. Tatyana Ten, Gaëla Pujol et Julie Loria, dans leurs maillots académiques de couleurs vives, dévoilent chacune une plastique impeccable et des arabesques sans défaut. Au contraire de Forsythe, dont la ligne directrice semble être l’étude du déséquilibre, cette œuvre de Belarbi s’inscrit dans une recherche de l’équilibre sous toutes ses formes, voire de la plénitude.

Ancien soliste principal au Ballet de Francfort, alors sous la direction de William Forsythe, Jacopo Godani s’est fait connaître du public toulousain par des œuvres d’une exigence physique extrême, associées à un propos des plus intellectualistes. Il en assure lui-même, outre la chorégraphie, la conception des décors, des costumes et des lumières. Il a aussi pris l’habitude d‘en commander la musique au groupe électro-acoustique munichois 48nord, démarche louable s’il en est. 
A.U.R.A. (Anarchist Unit Related to Art, ou en français, "Unité Anarchiste Liée à l’Art") a été créé en 2009 par le Ballet de Mayence.


AURA
A.U.R.A. (chor. Jacopo Godani)

Les danseurs en body sombre semblent tout d’abord écrasés par les éclairages très crus livrés par des barres au néon disposées géométriquement. Doigts écartés, poignets cassés, lignes brisées, ils se libèrent peu à peu en distordant au maximum leur technique. Godani croit à la force du mental pour dépasser ses limites corporelles, et finalement rendre sa liberté à l’individu. Le public se laisse convaincre avec enthousiasme par ce tourbillon hypnotique et irrésistible.




Jean-Marc Jacquin © 2013, Dansomanie

Le contenu des articles publiés sur www.dansomanie.net et www.forum-dansomanie.net est la propriété exclusive de Dansomanie et de ses rédacteurs respectifs.Toute reproduction intégrale ou partielle non autrorisée par Dansomanie ou ne relevant pas des exceptions prévues par la loi (droit de citation notamment dans le cadre de revues de presse, copie à usage privé), par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. 



AURA
A.U.R.A. (chor. Jacopo Godani)



Entrelacs  
Musique : Arvo Pärt, Iannis Xenakis
Chorégraphie :
Kader Belarbi
Décors et lumières : Rémi Nicolas
Costumes : Joop Stokvis

Avec : Tatyana Ten, Gaëla Pujol, Julie Loria
Kazbek Akhmedyarov, Valerio Mangianti, Takafumi Watanabe

The Vertiginous Thrill of  Exactitude
Musique : Franz Schubert
Chorégraphie, scénographie et lumières :
William Forsythe
Costumes : Stephen Galloway

Avec : Isabelle Brusson, Maria Gutierrez, Juliette Thelin
Demian Vargas, Davit Galstyan

A.U.R.A - Anarchist Unit Related to Art
Musique : Ulrich Müller , Siegfried Rössert / 48nord
Chorégraphie, décor, costumes et lumières :
Jacopo Godani

Avec : Isabelle Brusson, Olivia Hartzell, Lauren Kennedy
Ina Lesnakowski, Solène Monnereau, Vanessa Spiteri
Alexander Akulov, Julian Ims, Jérémy Leydier
Nicolas Rombaut, Takafumi Watanabe



Ballet du  Capitole de Toulouse
Musique enregistrée


Jeudi 21 février 2013,  Halle aux grains, Toulouse


http://www.forum-dansomanie.net
haut de page