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critiques et comptes rendus
Ballet National de Bordeaux

28 octobre 2012 : Giselle au Grand Théâtre de Bordeaux


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Oksana Kucheruk (Giselle)Igor Yebra (Albrecht)


Premier ballet d’une saison résolument tournée vers les grands classiques, Giselle nous rappelle à quel point le romantisme allemand a imprégné les arts visuels, s’étendant rapidement dans toute l’Europe au début du dix-neuvième siècle. Théophile Gautier a imaginé l’argument à partir d’une légende populaire germanique. Ces créatures fantasmagoriques qui peuplent les sombres forêts et menacent la nuit venue les voyageurs attardés témoignent de nos peurs ancestrales. Si on y ajoute une amourette à l’issue tragique, et un amour éternel par-delà la mort, on a des ingrédients pour constituer un ballet intemporel, et des thèmes propres à toucher un spectateur d’aujourd’hui.

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Oksana Kucheruk (Giselle)Igor Yebra (Albrecht)

La version qu’en donne le Ballet de Bordeaux, due à Charles Jude, s’inscrit dans cette tradition romantique. Elle respecte les éléments qui nous sont venus de la chorégraphie originale, ou du moins ce que la tradition nous en a transmis plus ou moins fidèlement. On retrouve les cabanes à l’orée du bois, les paysans idéalisés, aux danses enjouées. Seule innovation d’importance, par rapport à ce qu’on peut voir habituellement, le pas de deux des vendangeurs est remplacé par un pas de six, pour quatre danseuses et deux danseurs. On peut remarquer aussi que le rôle de Wilfried, l’écuyer d’Albert, est moins passif qu’à l’accoutumée. Il se révèle un fidèle guide pour l’inconséquent duc de Silésie. Plus anecdotique, l’arrivée de la chasse mettra en scène un véritable lévrier, sagement allongé parmi la figuration.

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Oksana Kucheruk (Giselle)Igor Yebra (Albrecht)

Mais aucune production de Giselle ne saurait valoir sans deux interprètes principaux à la hauteur de leurs personnages mythiques.  Oksana Kucheruk est l’Etoile de la compagnie bordelaise. Et les qualités qu’elle affiche ne démentent pas ce titre. Cou-de-pied à la cambrure parfaite, bras délicats, technique fine et virtuose qui lui permet d’exécuter des manèges de piqués étourdissants. Au deuxième acte ses arabesques sont parfaitement soignées. On doute cependant que Giselle soit le rôle qui convienne le mieux à son tempérament. On aimerait un personnage qui nous touche davantage par sa simplicité que par son trop grand raffinement. N’oublions pas que Giselle est une jeune paysanne naïve au premier acte, qui atteint l’immatérialité après sa mort, tout en conservant des sentiments humains.

En Albert, puisqu’il est nommé ainsi par la production, Igor Yebra, également danseur étoile, est l’exemple même du danseur noble. Physionomie princière, haute stature, mouvements amples et lents, il se montre de plus un partenaire attentionné.

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Oksana Kucheruk (Giselle)Igor Yebra (Albrecht)

Il est toutefois quelque peu éclipsé par le Hilarion de Marc-Emmanuel Zanoli chaque fois que celui-ci entre en scène. Grâce à un jeu sensible et plein de nuances, ce danseur démontre une fois de plus de grandes capacités dramatiques, et sa danse fatale avec les wilis est très spectaculaire.
Yumi Aizawa incarne une Myrtha à l’allure royale et marmoréenne. Elle nous captive dans la longue scène qui ouvre le deuxième acte, et son autorité est renforcée par l’amplitude de ses sauts.
Le corps de ballet, aussi bien dans la fête des vendanges du premier acte, que dans les scènes des wilis au deuxième, présente des alignements parfaits, signe d’une compagnie de niveau international. Il faut noter que pour composer un ensemble de vingt wilis, aux effets de tulles toujours appréciés, il a été fait appel à des danseuses surnuméraires, sans que des défauts d’homogénéité n’apparaissent.

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Igor Yebra (Albrecht)Oksana Kucheruk (Giselle)

C’est Paul Connelly qui dirige dans la fosse l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine. En grand spécialiste, il se montre attentif aux évolutions des danseurs et a bien compris que l’adage du deuxième acte, avec son long solo d’alto si difficile habituellement à faire briller, s’élève bien au-dessus des musiques de ballet de la même époque.




Jean-Marc Jacquin © 2012, Dansomanie

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Oksana Kucheruk (Giselle)Igor Yebra (Albrecht)



Giselle
Musique : Adolphe Adam
Chorégraphie : Charles Jude, d'après Jules Perrot et Jean Coralli
Décors : Giulio Achilli
Costumes : Philippe Binot
Lumières : François Saint-Cyr

Giselle – Oksana Kucheruk
Albrecht – Igor Yebra
Hilarion – Marc-Emmanuel Zanoli
Myrtha – Yumi Aizawa
WilfriedCase Craig

La Mère – Corinne Lanssens
Bathilde – Marie-Lys Navarro
Deux amis –  Guillaume Debut, Davit Gevorgyan
Deux Wilis – Stéphanie Gravouille, Laure Lavisse

Ballet National de Bordeaux
Orchestre National de Bordeaux-Aquitaine, dir.  Paul Connelly

Dimanche 28 octobre 2012,  Grand Théâtre de Bordeaux


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