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Ballet du Capitole de Toulouse
30 mars 2012 : "Le Temps du désir" au Théâtre du Capitole
Juliana Bastos et Takafumi Watanabe dans Allegro Brillante (chor. George Balanchine)
"Le
Temps du désir" ou le désir d’une création
par le Ballet du Capitole. Création d’autant plus
désirable qu’un argument tiré du roman
épistolaire Les Liaisons dangereuses
peut ouvrir le champ à une infinité
d’interprétations encore inédites.
Malheureusement les ennuis de santé de Davide Bombana
n’ont pas permis à ce projet d’être
mené à bien et le programme a été
modifié en conséquence. La déception est
atténuée par la qualité des reprises : un Duato de
haute volée et des Balanchine-Tchaïkovski entrés
dans le répertoire classique.
L’événement était cependant la mise au répertoire de la compagnie de Spazio-Tempo, de Jacopo Godani, créé en 2010 pour le Ballet du SemperOper de Dresde.
L’Italien Jacopo Godani a été soliste principal au
Ballet de Francfort de William Forsythe durant les années
90 et l’influence du grand chorégraphe américain
est immédiatement perceptible. S’appuyant sur le
vocabulaire académique et le style néo-classique, il en
développe les mouvements, exigeant une grande amplitude de la
part des danseurs, ainsi qu’un travail de bras poussé
à l’extrême, où toutes les ondulations,
sinuosités ou torsions sont possibles.
Vanessa Spiteri dans Spazio-Tempo (chor. Jacopo Godani)
Les concepts scientifiques du début du 20ème
siècle ont relié l’espace et le temps. Ces
concepts, dont la théorie d’Einstein est le plus bel
exemple, aussi révolutionnaires qu’en leur temps la loi
sur la gravitation universelle de Newton, ou bien
précédemment la théorie copernicienne, ont
bouleversé notre vision de l’univers, bien avant de plus
récentes découvertes qui mettent en jeu le hasard et les
probabilités. C’est précisément ce
bouleversement que Jacopo Godani a voulu traduire, en se chargeant
lui-même, en sus de la chorégraphie, de la conception du
décor, des costumes et des lumières. En
vérité quel autre art que la danse peut mieux exprimer le
rapport entre l’espace et le temps? A ce stade il faudrait
distinguer le temps physique et le temps musical, ce dernier
étant de toute évidence davantage soumis à la
subjectivité. Mais n’est-il pas plus réel que le
temps mesuré par l’horloge?
Pascale Saurel et Julian Ims dans Spazio-Tempo (chor. Jacopo Godani)
Le décor est formé d’un immense cube anthracite
représentant l’espace, plus ou moins fini selon
l’éclairage, à l’intérieur duquel
évoluent les danseurs. C’est cet univers qui nous
apparaît tantôt immense et vide, tantôt grouillant de
vie. Pas de deux et pas d’ensembles se succèdent sur la
musique d’essence électro-acoustique d’Ulrich
Müller et Siegfried Rössert (à la base du groupe
48nord). Les danseurs réalisent une véritable performance
en se pliant aux difficultés innombrables exigées.
Distinguons pour leur puissance et leur souplesse Ina Lesnakowski,
Lucille Robert, Davit Galstyan ou Demian Vargas. Dans
la lignée d’une création fort remarquée que
Jacopo Godani avait conçue pour le Ballet du Capitole (Scènes de force),
cette œuvre montre l’habileté avec laquelle le
chorégraphe sait manier des concepts philosophiques et
scientifiques.
Por vos muero (chor. Nacho Duato)
La
reprise dans l’écrin du Théâtre du Capitole,
plutôt qu’à la Halle aux grains, de Por vos muero
a permis de magnifier le décor, conçu par Nacho Duato
lui-même. Le ballet est pour l’essentiel inspiré par
l’œuvre de Garcilaso de la Vega, et ses poèmes
d’amour parmi les plus beaux de la littérature espagnole,
ainsi que par la musique espagnole des 15ème et
16ème siècle. Il est à noter que la musique
savante espagnole n’a que peu retrouvé ce niveau
d’inspiration avant le 20ème siècle, alors
qu’au contraire la musique populaire, grâce notamment
à des mélanges culturels savoureux, a toujours
gardé un haut degré de qualité, inspirant en
retour nombre de compositeurs occidentaux.
Demian Vargas et Maria Gutierrez dans Por vos muero (chor. Nacho Duato)
Nacho
Duato s’est placé au cœur de ce brassage culturel,
synthétisant dans une œuvre de moins d’une
demi-heure les origines arabo-andalouses, l’influence
prégnante de l’Eglise pendant et après la
Reconquista, la vitalité populaire, les codes sociaux et les
protocoles courtois de la Cour, un mélange de sensualité
et de retenue qui semble définir et exprimer l’âme
espagnole. La voix envoûtante de Miguel Bosé fait
merveille, ainsi que celle de la regrettée Montserrat Figueras
qui défie le temps et les styles.
Pascale Saurel dans Por vos muero (chor. Nacho Duato)
Les interprètes ont gardé l’engagement total
qu’ils avait mis à s’approprier l’œuvre
en 2011. Maki Matsuoka, Pascale Saurel ou Vladimir Bannikov y sont
particulièrement remarquables, ainsi que Jérémy
Leydier et Takafumi Watanabe dans leur danse des bouffons.
Tchaïkovsky - Pas de deux
est une sorte de «tube» de Balanchine,
interprété par les plus grands danseurs dans de nombreux
galas. Magali Guerry et Davit Galstyan connaissent parfaitement le
style détaché qu’il faut imprimer à ce pas
de deux. Magali Guerry y est cependant moins à l’aise que
dans Stars and Stripes, manquant par trop de souplesse du dos, nécessaire ici, pour rivaliser tout à fait avec Maria Gutierrez.
Allegro brillante
est entré au répertoire du Ballet du Capitole en 1993,
remonté par Nanette Glushak. Celle-ci fut nommé
directrice de la troupe un an plus tard. Quelle plus belle reprise que
ce concentré balanchinien pour signer une saison d’adieux?
Jean-Marc Jacquin © 2012, Dansomanie
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Magali Guerry et Davit Galstyan dans Tchaïkovsky - Pas de deux (chor. George Balanchine)
Spazio-Tempo
Musique : Ulrich Müller et Siegfried Rössert (groupe 48nord)
Chorégraphie, décors, costumes et lumières : Jacopo Godani
Avec : Pascale Saurel - Isabelle Brusson - Juliana Bastos
Lucille Robert - Lauren Kennedy - Ina Lesnakowski
Takafumi Watanabe - Davit Galstyan - Julian Ims
Alexandre Akulov - Konstantin Lorenz - Demian Vargas
Por vos muero
Musiques espagnole des XVe et XVIe siècles
Chorégraphie et scénographie : Nacho Duato
Costumes : Nacho Duato et Ismael Aznar
Lumières : Nicolas Fischtel
Avec : Maki Matsuoka - Solène Monnereau - Nuria Arteaga
Lucille Robert - Juliana Bastos - Pascale Saurel
Alexander Akulov - Takafumi Watanabe - Konstantin Lorenz
Guillaume Ferran - Vladimir Bannikov - Jérémy Leydier
Tchaïkovsky - Pas de deux
Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovsky
Chorégraphie : George Balanchine
Costumes : Barbara Karinska, adaptés par Nanette Glushak
Avec : Magali Guerry - Davit Galstyan
Allegro Brillante
Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovsky
Chorégraphie : George Balanchine
Costumes : Barbara Karinska, adaptés par Nanette Glushak
Avec : Juliana Bastos - Takafumi Watanabe
Ballet du Capitole de Toulouse
Musique enregistrée
Vendredi 30 mars 2012, Théâtre du Capitole, Toulouse
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