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Ballet du Capitole de Toulouse
27 décembre 2011 : Casse-Noisette au Théâtre du Capitole
Davit Galstyan (Casse-Noisette)
Casse-Noisette
est depuis longtemps au répertoire du Ballet du Capitole.
Passage obligé des théâtres de danse au moment des
fêtes de fin d’année, tradition fermement
établie dans le monde anglo-saxon, il n’avait pourtant
jamais été programmé en cette période
à Toulouse. Cette production est la reprise de la
dernière version de Michel Rahn, créée en 2009.
Citons tout d’abord le chorégraphe lui-même, qui
situe très bien son ambition : «Je n’ai pas voulu
faire de Casse-Noisette une
histoire psychologique et torturée ; je l’ai conçue
comme le rêve d’une enfant s’approchant de
l’adolescence et qui, de nombreuses années plus tard, ne
peut toujours pas démêler le rêve de la
réalité».
Rappelons en effet que l’histoire est présentée
sous forme de retour en arrière : un très bref prologue
nous montre à travers le magnifique rideau de scène une
dame vêtue à l’ancienne, qui retrouve dans le
grenier de la maison familiale son vieux jouet d’enfance et
s’endort dans un fauteuil. Après le déroulé
de l’argument traditionnel, la fin laissera subsister une
incertitude sur la vérité toute relative du rêve et
de la réalité, puisqu’on aperçoit fugacement
la dame endormie dans le grenier, observée avec amusement
à travers la lucarne par Clara enfant et son parrain
Drosselmeier.
On peut le déplorer ou s’en réjouir, cette version
perpétue le «péché originel» du ballet
de Petipa, à savoir le déséquilibre entre un
premier acte où domine la pantomime, parsemé de quelques
danses enfantines, et un deuxième acte entièrement
dansé et sans argument, hormis le récit du Casse-Noisette
restitué à l’état de beau Prince. Tel
qu’elle est, cette production n’en constitue pas moins un
spectacle merveilleux, agréablement conçu pour tout
public, et qui satisfait l’esprit par sa logique interne.
Isabelle Brusson (Goutte de rosée)
Par rapport à la création de 2009, quelques modifications
bienvenues ont été apportées. Les décors et
costumes de l’Ecossais Charles Cusik-Smith sont toujours aussi
chatoyants et évocateurs. Mais le décor du
deuxième acte a atténué son aspect
bonbonnière dorée pour s’élargir vers un
paysage plus onirique. Les automates de Drosselmeier sont devenus de
véritables poupées de chiffon, et Clara et son prince ne
voyagent plus sur un vaisseau spatial, mais sur un flocon (spacieux),
davantage en situation. La chorégraphie elle-même
s’est adaptée aux possibilités nouvelles des
danseurs, dans une compagnie où les effectifs sont très
mouvants.
L’événement du côté des
interprètes aurait pu être la participation toute
spéciale du grand Michaël Denard, Etoile de
l’Opéra de Paris, en Drosselmeier. On sait que cet immense
danseur a aussi à son actif une belle carrière
d’acteur dramatique. En l’occurrence son potentiel semble
ici inexploité, dans ce rôle finalement trop lisse
d’ami de la famille, quelque peu magicien, et son apparition en
maître des planètes au début du deuxième
acte ne compense pas ce manque. Michel Rahn, toujours
irrésistible en vieille gouvernante, a dû prendre
conscience de ce déséquilibre puisqu’il se tient
constamment en retrait, sans même venir balayer malicieusement
l’avant-scène pendant l’entracte, comme en 2009.
Maria Gutierrez (Clara) - Davit Galstyan (Casse-Noisette)
Maria Gutierrez est familière du rôle de Clara. Elle en
possède les caractéristiques dramatiques au début
du ballet, présentant une conception très vive et
espiègle du personnage. Dans la scène de la bataille
contre les rats on la retrouve telle qu’elle incarnait
l’Alice de Lewis Carroll, rôle conçu pour elle un an
auparavant. A partir de la métamorphose elle peut
déployer toutes ses capacités de lyrisme et sa technique
brillante dans un pas de deux passionné.
C’est Davit Galstyan qui est devenu le titulaire du rôle du
Casse-Noisette. Sans aucun doute le meilleur danseur classique de la
troupe, il en propose une interprétation pleine de noblesse et
d’élégance, n’ayant pour autant rien perdu
des qualités de fougue qui faisaient naguère sa marque de
fabrique. De plus, il restitue de manière agréable et
captivante son long récit en pantomime du deuxième acte,
agrémenté de grands jetés spectaculaires et
magnifiques.
On attendait beaucoup du couple formé par Tatyana Ten et
Takafumi Watanabe en Fée Dragée et son partenaire Le
Prince Bienfaisant. Il font bien mieux que répondre à nos
attentes et il n’est pas trop de dire que leur pas de deux du
deuxième acte pouvait justifier à lui seul la vision du
spectacle. Dans le grand adage, Tatyana Ten fait montre d’un
legato et d’une musicalité hors du commun. Chaque pas
découle du précédent à tel point
qu’elle semble nous raconter une histoire, dans un rôle
pourtant sans contenu dramatique. Pointes et équilibres
très sûrs ne lui font pas quitter ce ton souverain qui est
le signe des grandes ballerines, et ses traits orientaux ajoutent une
touche de mystère à ce personnage surnaturel.
Après sa prise de rôle saluée dans Giselle
en tout début de saison, puis son Inès de Castro pour
Kader Belarbi, il est bien évident que son avenir
s’inscrit déjà comme soliste principale de la
compagnie. Elle n’est pourtant que membre du corps de ballet.
La Valse des flocons de Casse-Noisette
Takafumi Watanabe est un partenaire parfait dans l’adage, puis
semble ne pas toucher terre dans sa variation. Un soupçon de
force et d’endurance supplémentaires autoriseront
bientôt ce danseur encore très jeune à se
confronter aux rôles les plus exigeants. Parmi les autres
rôles, soulignons la voluptueuse Juliana Bastos dans la Danse
orientale, ainsi que la virtuose Isabelle Brusson dans la Valse des
fleurs.
Quelques petites imprécisions dans les ensembles, notamment au
premier acte, nous font émettre une crainte. Le Ballet du
Capitole n’a-t-il pas atteint ses limites en multipliant le
nombre de spectacles, au détriment des répétitions
? Le public est là, fidèle, mais c’est maintenant
le dimensionnement de la troupe qui ne suffit peut-être plus.
Jean-Marc Jacquin © 2012, Dansomanie
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Davit Galstyan (Casse-Noisette)
Casse-Noisette
Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovsky
Chorégraphie : Michel Rahn
Décors et costumes : Charles Cusik-Smith
Lumières : Paul Pyant
Clara – Maria Gutierrez
Casse-Noisette – Davit Galstyan
La Fée Dragée – Tatyana Ten
Le Prince Bienfaisant – Takafumi Watanabe
Drosselmeier – Michaël Denard
Frau Stahlbaum – Pascale Saurel
Herr Stahlbaum – Fabien Cicoletta
Fritz – Fantin Rolaz
Le Grand-père – Patrick Segot
La Grand-mère – Lucille Robert
Les Automates – Maki Matsuoka, Alexandre Akulov
Le Soldat de plomb – Dmitry Leshchinskiy
Le Roi des rats – Fabien Cicoletta
Danse espagnole – Marina Lafargue, Maki Matsuoka, Dmitry Leshchinskiy, Alexandre Akulov
Danse orientale – Juliana Bastos, Kazbek Akhmedyarov
Danse chinoise – Hugo Mbeng, Raffaele Zarrella
Les Mirlitons – Lauren Kennedy, Lucille Robert, Pascale Saurel
Jérémy Leydier, Konstantin Lorenz, Henrik Victorin
Goutte de rosée – Isabelle Brusson
Ballet du Capitole de Toulouse
Orchestre du Capitole de Toulouse, dir. Dieter Rossberg
Mardi 27 décembre 2011, Théâtre du Capitole, Toulouse
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