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Ballet National de Bordeaux
18 décembre 2011 : Casse-Noisette au Ballet National de Bordeaux
La Valse des Fleurs de Casse-Noisette
Le Casse-Noisette
chorégraphié par Charles Jude pour le Ballet de Bordeaux
en 1997 présente un caractère hybride. Si, à
l’exception d’un bref prologue mettant en scène un
concierge de théâtre qui se métamorphose en danseur
en franchissant le mur du lointain pour se retrouver sous les feux de
la rampe, le premier acte préserve peu ou prou le
caractère féerique du ballet, la seconde partie nous
emmène, elle, dans l’univers de la bande dessinée
et du music-hall, rompant brutalement avec l’esprit de Petipa. Ce
basculement (trop?) radical aura en tout cas conquis le public bon
enfant du Grand Théâtre de Bordeaux, rendu hilare par les
facéties des acrobates «russes» -
évocation de Tintin au Pays des Soviets – et du chameau
rétif de la danse arabe.
Sur le plan de l’interprétation également, les
contrastes étaient de mise. L’acte I fut
indéniablement celui de Yumi Aizawa, presque trop souveraine
dans le rôle de Marie, jeune fille présumée
innocente et censée découvrir la vie au sortir de
l’adolescence, à l’aide du casse-noisette –
talisman offert par un tonton Drosselmeier aux intentions troubles.
Charles Jude s’aventure ici sur le même terrain que Rudolf
Nouréev, même si l’interprétation
«psychanalytique» de l’argument y est
développée de manière moins systématique et
excessive.
Yumi Aizawa (Marie) - Ruslan Savdenov (Le Prince)
La
représentation du 18 décembre était la
première des cinq confiées au soliste kazakh Ruslan
Savdenov. Dans la première partie, cet artiste au physique
très juvénile, et visiblement à la recherche de
ses marques au sein d’une compagnie qu’il découvrait
tout juste, s’est laissé quelque peu dominer par sa
partenaire, qui, paradoxalement, se donnait des airs de «grande
sœur» déjà au fait des choses de la vie, et
bien décidée à déniaiser ce prince –
adolescent, tout juste échappé des jupes de sa
mère.
De manière inattendue, la situation s’est totalement
inversée au second acte, et M. Savdenov y a pris nettement
l’ascendant sur une Yumi Aizawa soudainement beaucoup plus en
retrait. Le grand manège de coupés-jetés fut bien
évidemment l’occasion pour le Prince de faire la
démonstration de ses qualités athlétiques et de
son beau ballon.
Ruslan Savdenov (Le Prince)
Parmi les seconds rôles, on retiendra plus
particulièrement le couple formé par Corinne Lanssens et
István Martin, grands-parents truculents à souhait. Les
danses de caractère du second acte ont remporté un franc
succès, bien qu’elles nous semblent par trop
éloignées esthétiquement de l’univers
imaginé par Hoffmann, Petipa et Tchaïkovsky, et
compromettent un peu l’unité de l’ouvrage. On
louera toutefois la virtuosité des trois moujiks de pacotille,
Vladimir Korec, Ashley Whittle et Alexandre Gontcharouk, qui ont
interprété une danse russe très dynamique.
La Pastorale, très proche de celle de la version de Rudolf
Nouréev, s’inscrit pour sa part bien mieux dans la
continuité du ballet. Alice Leloup et Giada Rossi y sont
apparues pleines de charme, tandis que Neven Ritmanic a su mettre en
valeur sa batterie, très rapide et propre. Curieusement, ses
réceptions étaient parfois un peu brouillonnes, mais ce
petit accès de fébrilité n’obère en
rien les qualités de ce danseur, qui n’est certainement
pas destiné à jouer les comprimari très longtemps.
La Pastorale de Casse-Noisette
Par-delà les solistes, c’est d’abord le corps de
ballet qui fait la valeur d’une compagnie, et on aura pu le
mesurer au travers des deux grands ensembles emblématiques de Casse-Noisette,
tout d’abord la Valse des Flocons, emmenée par
Stéphanie Gravouille et Mika Yoneyama, puis, après
l’entracte, la Valse des Fleurs, marquées par une belle
discipline de groupe et un placement qui ne souffrait d’aucun
défaut rédhibitoire.
Tant du point de vue musical que de celui de la scénographie, on
louera l’excellente idée d’avoir installé le
chœur d’enfants – qui intervient dans la danse des
flocons – dans la loge d’avant-scène
côté cour. La fosse du Grand Théâtre de
Bordeaux était de toute façon trop exiguë pour y
loger les chanteurs ; disposés de la sorte, ils pouvaient
être admirés du public sans être couverts par
l’orchestre. L’effet produit était bien meilleur que
si on les avait disposés en coulisses, auquel cas un dispositif
de sonorisation se serait sans doute avéré
nécessaire. De plus, les jeunes artistes de la Maîtrise du
Conservatoire de Bordeaux pouvaient ainsi observer directement les
départs donnés par le chef d’orchestre, et la
synchronisation entre les instrumentistes et le chœur en
était grandement facilitée.
Au pupitre, Dominic Wheeler s’est démené pour
obtenir de l’Orchestre National de Bordeaux-Aquitaine le meilleur
résultat possible. Il s’est notamment attaché
à bien marquer les articulations, de manière à
donner l’illusion de la vitesse, alors qu’il était
contraint, sans doute tant par la chorégraphie que par les
capacités des instrumentistes, à s’en tenir
à des tempi relativement modérés – du moins
en-deçà de ceux qui font référence dans les
grandes interprétations russes de l’ouvrage de
Tchaïkovsky. Satisfecit en tout cas pour les cordes et les bois.
Seuls les cuivres – exposés il est vrai – sont
apparus un peu faibles ici où là.
R. Feist © 2011, Dansomanie
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Yumi Aizawa (Marie)
Casse-Noisette
Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovsky
Chorégraphie, scénographie et lumières : Charles Jude
Décors : Giulio Achilli
Costumes : Philippe Binot
Marie – Yumi Aizawa
Le Prince - Casse-Noisette – Ruslan Savdenov
Drosselmeier – Alvaro Rodriguez Piñera
Fritz – Alexandre Gontcharouk
Louise – Diane Le Floc'h
Arlequin – Austin Lui
Colombine – Sara Renda
Le Cosaque – Vladimir Korec
Le Président Silberhaus – Ludovic Dussarps
La Présidente Silberhaus – Marie-Lys Navarro
Le Grand-père – István Martin
La Grand-mère – Corinne Lanssens
La Gouvernante – Lolita Lequellec
Deux Vieilles filles – Laure Lavisse, Lucie Peixoto
La Servante – Alice Leloup
Une Amie – Louise Djabri
Les Amis de Fritz – Vladimir Korec, Ashley Whittle
Le Roi des rats – Ludovic Dussarps
Deux Flocons – Stéphanie Gravouille, Mika Yoneyama
Danse espagnole – Juliane Bubl, Davit Gevorgyan
Le Chameau – Walter Maimone, Gabriele Santoni
Danse arabe – Stéphanie Roublot, Kase Craig
Danse russe – Vladimir Korec, Ashley Whittle, Alexandre Gontcharouk
Pastorale – Neven Ritmanic, Alice Leloup, Giada Rossi
Ballet National de Bordeaux
Maîtrise du Conservatoire de Bordeaux - Jacques Thibaud
Orchestre National de Bordeaux-Aquitaine, dir. Dominic Wheeler
Dimancue 18 décembre 2011, Grand
Théâtre de Bordeaux
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