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Ballet d'Europe - Le Temps d'Aimer, Biarritz
12 septembre 2011 : FOLAVI, Un peu plus loin, Comme un souffle de femme.
Comme un souffle de femme (chor. Jean-Charles Gil)
Le
Ballet d’Europe et ses douze danseurs étaient ce lundi 12
septembre invités au par le festival Le Temps d’aimer ;
à cette occasion, la compagnie présentait au
théâtre du Casino de Biarritz trois pièces, deux
chorégraphiées par son directeur, Jean-Charles Gil, et la
dernière (en fait la deuxième selon l’ordre de la
programmation), tout récemment ajoutée à son
répertoire, signée par Christophe Garcia.
La soirée s’ouvre avec FOLAVI
(création en avril 2008), variations sur des concertos de
Vivaldi cherchant à célébrer la
légèreté, la folie et l’énergie
musicale de la vie. Onze danseurs, vêtus comme à
l’échauffement, sont invités à se produire
dans un décor extrêmement dépouillé, sans
coulisses ni même de rideau pour habiller le fond de
scène. Assistons-nous à la représentation
d’une répétition? le parallèle est
aisé, d’autant que les danseurs restent assis à
cour et jardin lorsque ce n’est pas leur tour
d’interpréter un solo ou de participer à un
ensemble – la symbolique par rapport au postulat de Jean-Charles
Gil peut paraître dès lors relativement logique, une fois
que l’on choisit de considérer la vie comme
l’éternelle répétition d’un spectacle
à venir.
Dès les premières minutes, il apparaît
évident que la compagnie est dotée d’excellents
danseurs, à la technique solide et pour certains, aux
qualités interprétatives notables. Les garçons
pêchent un peu au niveau de l’esthétique classique
des bras, mais compensent par une belle élévation et des
mouvements très aboutis. Si ce n’est un ou deux
légers accrochages lors du premier duo, les partenariats ont
été dans l’ensemble équilibrés, avec
un travail de la suspension et du relâché toujours
très ajusté.
Folavi (chor. Jean-Charles Gil)
Cependant, il convient d’apporter un bémol sur la
chorégraphie, qui ne sert pas tellement les qualités des
interprètes (à l’exception des passages
d’ensemble, qui s’avèrent puissants et, par
là-même, réjouissants). Jean-Charles Gil adopte
– notamment dans les solos et duos – un vocabulaire assez
convenu, aux poses très voire trop classiques, qui finissent par
devenir gênantes au sein d’une démarche voulue de
«création contemporaine». Mais le plus
dérangeant est probablement le manque d’audace
vis-à-vis de la musique, qui régit les mouvements
d’une manière bien trop prévisible : les danseurs
n’accélèrent que lorsque le tempo vire allegro,
et les mouvements ne ralentissent qu’à l’occasion
des concertos les plus lents. Cette dépendance devient encore
plus flagrante dès lors que l’on prête attention aux
reprises musicales, puisque les danseurs attendent sagement les
premières notes pour caler leurs mouvements de façon
très littérale.
Les mêmes qualités de travail et défauts de
chorégraphie se retrouvent dans la seconde pièce de
Jean-Charles Gil, Comme un souffle de femme
(création en juin 2009), qui glorifie la femme et son
espérance au travers des poèmes de Dionyssis Karatzas,
chantés par Maria Farantouri. Les danseurs s’y montrent
peut-être plus fatigués mais, si les ensembles s’en
ressentent quelque peu, leur force permet à nouveau à la
chorégraphie de retrouver le souffle qui venait à lui
manquer dans les variations plus individuelles – ravivant ainsi
l’intérêt du spectateur qui aurait tendance à
s’étioler lors des longueurs de certains soli. Encore une
fois, c’est à l’occasion de ces passages de groupe
que s’incarnent les éléments les plus
intéressants de la chorégraphie : dans cette
création notamment, un très beau travail sur la
réponse de danseurs à leurs partenaires, tant sur le plan
de l’esthétique que de l’évocation.
Folavi (chor. Jean-Charles Gil)
Le principal travers de FOLAVI et Comme un souffle de femme,
toutefois, est probablement le manque de force significatrice des
chorégraphies de Jean-Charles Gil. Les mouvements sont
très beaux, certes attendus de temps à autres, mais
indéniablement très esthétisants. La structure des
pièces n’est pas non plus extrêmement originale, et
très semblable d’une pièce à l’autre,
alternant régulièrement travaux d’ensembles et
prestations d’un ou deux danseurs. En quelques mots, l’on
pourrait tout simplement dire que la forme semble avoir
été privilégiée sur le fond : les
variations de Comme un souffle de femme auraient très bien pu s’appliquer à FOLAVI,
et inversement, sans que les pièces en soient
dénaturées. A ce sujet, l’on pourrait citer
l’exemple de cette soliste arborant un léger sourire, qui
paraissait pourtant fort peu adapté au propos de Comme un souffle de femme
; indifféremment de l’expression fermée plus en
accord la musique privilégiée par ses camarades, le
sourire de la demoiselle pouvait tout à fait convenir au type de
chorégraphie interprétée. Assurément, le
spectacle est agréable à regarder, mais le propos
paraît au final un peu vain.
La bonne surprise de la soirée fut finalement le duo d’Un peu plus loin,
première collaboration de Christophe Garcia avec le Ballet
d’Europe. L’entrée des deux hommes se fait dans un
silence absolu, que ne trouble pas une danse pourtant très
masculine, très terrienne ; la rupture, musicale comme physique,
en est par la suite d’autant plus violente. Les corps se
déchaînent, et les deux danseurs, qui peuvent avec cette
pièce enfin montrer toute l’étendue de leur talent
d’interprétation, canalisent une énergie explosive
avec une maîtrise et une justesse qui force l’admiration.
Cette fois-ci très ancrés dans une chorégraphie
contemporaine, nos deux danseurs nouent une magnifique relation, entre
recueillement et tempête, entre contemplation et joutes
gestuelles, alors que trois sacs en tissu se vident inexorablement du
sable qu’ils contiennent. S’agit-il de frères,
d’amants, d’inconnus ? peu importe, ce qui nous
intéresse n’est autre que leur cheminement. Ils apprennent
à vivre, se soutiennent et s’observent, parfois avec
maladresse, mais toujours avec la conscience de l’Autre.
Certes, ce duo n’est pas exempt de défauts : le choix
musical des soli peut sembler hasardeux, le début de la
pièce court sur un moment de silence certainement trop long de
quelques secondes, et la reprise de l’idée introductive en
conclusion était peut-être un peu facile – quant au
décor, était-il véritablement nécessaire?
Mais Christophe Garcia nous offre une très intéressante
réflexion sur les intentions d’un couple d’individus
et sur le corps dédoublé, ainsi qu’un beau travail,
sans prétention, sur le miroir, l’écho et la
déformation du mouvement au sein de la relation d’un
être à un autre ; sans oublier
l’interprétation de ses danseurs, d’une justesse
rare.
Le public biarrot ne s'y est en tout cas pas trompé, et a
réservé des applaudissements nourris à
l'égard de nos duettistes comme, d'ailleurs, de leurs
collègues. Les chorégraphes, venus saluer, ont
été de même chaleureusement félicités.
Anna Imbert © 2011, Dansomanie
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FOLAVI
Chorégraphie : Jean-Charles Gil
Musique : Antonio Vivaldi
Scénographie : Jean-Charles Gil
Avec : Marion Baudinaud, Olivia Deyres Natacha Franck, Sara Lupoli, Marie Shimada,
Jean-Philippe Bayle, Antonino Cérésia, Pierre Henrion,
Ludovick Le Floc’h, Erick Odriozola-Soraluce, Tatsuki Takada
Comme un souffle de femme
Chorégraphie : Jean-Charles Gil
Musique : Mikis Theodorakis
Costumes : Mariane Cat
Avec : Marion Baudinaud, Natacha Franck, Sara Lupoli, Marie Shimada
Antonino Cérésia, Pierre Henrion, Ludovick Le Floc’h, Erik Odriozola Soraluce
Un Peu Plus Loin
Chorégraphie : Christophe Garcia
Musique : Laurier Rajotte
Avec : Ludovick Le Floc'h, Antonino Cérésia
Ballet d'Europe
Musique enregistrée
Lundi 12 septembre 2011, Casino Municipal , Biarritz
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