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Bayerisches Staatsballett (Munich)
20 décembre 2010 : La Belle au Bois dormant par le Bayerisches Staatsballett
Tigran Mikayelyan (Le Prince) et Lucia Lacarra (Aurore)
Parfait ballet de Noël, La Belle au Bois dormant
aurait sans doute fait salle comble avec n’importe quelle
distribution ; la distribution présentée pour cette
représentation avait de quoi renforcer l’attente du
public, tant elle réunissait de solistes de haut niveau autour
de l’étoile incontestée Lucia Lacarra.
La production présentée par le Ballet de Bavière
est à la fois une production récente et une version
ancienne : en 2003, des problèmes financiers l’avaient
empêché de la renouveler entièrement, si bien que
la chorégraphie entièrement revue et largement
recrée par Ivan Liška doit s’accommoder des
décors et costumes de la production précédente.
C’est regrettable, car les décors des deux derniers actes
franchissent allègrement les frontières du kitsch, et le
manque de contrastes dans les costumes met parfois en péril la
lisibilité de l’ensemble, et donc l’affirmation des
personnalités qui trouveraient amplement à
s’exprimer dans les nombreux petits rôles de
l’ouvrage. Il faut donc une troupe forte pour réussir
à surmonter ces lourds inconvénients de départ.
Tigran Mikayelyan (Le Prince)
La chorégraphie d’Ivan Liška n’a pas
l’ambition démiurgique de la version de Rudolf Noureev ;
son grand atout réside dans sa délicatesse pleine de
goût, ses limites dans le manque de brio de certains passages,
par exemple pour les solistes du Pas Fabergé.
On peut d’ailleurs féliciter le Ballet de Bavière
d’avoir eu l’honnêteté trop rare de distinguer
explicitement sur la fiche de distribution les passages
créés par Ivan Liška ou par ses
prédécesseurs Serguéïev et Lopoukhov de ceux
directement hérités de la tradition impériale.
Cyril Pierre (Carabosse)
La distribution de cette soirée n’était pas sans
défaut : le manque d’expérience des fées du
prologue les pousse trop souvent à surjouer au détriment
de la fluidité de la danse, seule Ekaterina Petina parvenant
à rendre vraiment justice au-delà de la technique pure
à sa variation, et le corps de ballet montre à plusieurs
reprises des faiblesses que le système du répertoire
explique sans doute. De même, les scènes de contes de
fées du dernier acte ne retiennent l’attention que par le
Petit poucet très vivace d’Ilia Sarkisov et l’Oiseau
bleu virtuose, mais manquant un peu d’élégance de
Maxim Chashchegorov. Mais les rôles principaux, eux, sont tenus
de façon beaucoup plus efficace. Autour du couple princier, et
même si leurs rôles ne sont pas les plus gratifiants,
Séverine Ferrolier et Cyril Pierre sont parfaits dans le
rôle des deux fées rivales : la Fée Carabosse est
dans cette version moins marquante que parfois, mais Cyril Pierre a
tout l’humour et toute la présence nécessaire ; la
Fée des Lilas, elle, trouve en Séverine Ferrolier une
interprète discrète, qui n’exploite pas toute la
majesté et l’aura du personnage, mais danse avec un style
et un goût exquis.
Lucia Lacarra (Aurore)
Mais même la puissance de Tigran Mikayelyan,
particulièrement frappante dans la variation de Serguéïev au
troisième acte, n’y changera rien : cette soirée
était celle de Lucia Lacarra. Plus souvent associée
à Roland Petit ou au répertoire néo-classique de
Cranko ou de Neumeier, elle a prouvé ce soir comme jamais
l’ampleur de son talent classique. Pour autant, elle n’est
pas devenue une de ces bêtes de scène pour qui tout doit
tourner autour d’elles : les trésors que déploient
Lucia Lacarra sont plus secrets. Pas question, dans
l’«Adage à la rose», de faire sentir
l’exploit que
représentent les nombreux équilibres successifs :
là où d’autres préfèrent les
étendre démesurément quitte à offrir au
public le spectacle de mains qui tremblent et de lui donner
l’impression que, sans les princes, l’étoile se
serait retrouvée le nez au tapis, Lacarra préfère
laisser admirer son exquise musicalité, sa pointe d’acier
et son impeccable naturel : les équilibres durent ce
qu’elle veut, non ce qu’elle peut. L’intelligence
avec laquelle elle fait évoluer son personnage, de la petite
fille du premier acte à la princesse du dernier, est presque
aussi admirable que ce souci du style parfait. Il est toujours plaisant
de voir cette grande danseuse dans son royaume munichois ; que peut-on
encore écrire quand, par chance, la forme ou l’inspiration
d’un soir viennent encore accroître ce qu’on
connaissait déjà de son talent..
Dominique Adrian © 2010, Dansomanie
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Ivy Amista (Florine) et Maxim Chashchegorov (L'Oiseau bleu)
Dornröschen (La Belle au bois dormant)
Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovsky
Chorégraphie : Ivan Liška
Décors et costumes : Peter Farmer
Aurore – Lucia Lacarra
Le Prince – Tigran Mikayelyan
Carabosse – Cyril Pierre
La Fée des Lilas – Séverine Ferrolier
Le Roi Florestan XIV – Vincent Loermans
La Reine – Valentina Divina
La Fée Candide – Monika Hejduková
Fleur de Farine – Zuzana Zahradniková
La Fée des Miettes – Ivy Amista
La Fée Canari – Magdalena Lonska
La Fée Violente – Ekaterina Petina
La Chatte blanche – Lucie Barthélémy
Le Chat botté – Gregory Mislin
La Princesse Florine – Ivy Amista
L'Oiseau bleu – Maxim Chashchegorov
Le Petit poucet – Ilia Sarkisov
Bayerisches Staatsballett
Orchester der Bayerischen Staatsoper, dir. Valery Ovsianikov
Dimanche 20 décembre 2010, National Theater, Munich
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