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critiques et comptes rendus
Bayerisches Staatsballett (Munich)

13 octobre 2010 : Onegin, de John Cranko, par le Bayerisches Staatsballett


onegin munich
Lukás Slavický (Lenski), Marlon Dino (Onéguine), Lucia Lacarra (Tatiana), Ivy Amista (Olga)


John Cranko n’est pas la chasse gardée du Ballet de Stuttgart : même si c’est là que se perpétue la mémoire du chorégraphe trop tôt disparu, Cranko a aussi assuré pendant quatre années, en parallèle à ses responsabilités à Stuttgart, la direction de ce qui était alors le Ballet de l’Opéra de Munich, et le lien établi alors ne semble pas près de se détendre. Cette 231ème représentation munichoise, impeccablement accompagnée par un orchestre et un chef toujours soucieux de tirer le meilleur profit de la partition qui leur est soumise, est l’occasion de le vérifier : faire les pas, respecter la chorégraphie et les intentions ne suffit pas ; l’essentiel est dans le style, dans cette manière de ne jamais abandonner un mouvement sans en avoir tiré tout le sens, de faire naître la narration du jeu des regards et des gestes des mains, mais aussi des pieds, des épaules, de tout le corps.

onegin munich
Lukás Slavický (Lenski), Ivy Amista (Olga)

Ce style, on ne l’a guère aperçu dans les représentations parisiennes d’
Onegin ; ici, même une série de glissades assez malencontreuse au premier acte ne change rien à l’évidence d’une adéquation parfaite entre la troupe et ce ballet qu’ils connaissent si bien. Il ne reste plus qu’à attendre que le Ballet de Bavière ose se lancer dans l’aventure de la création d’un nouveau grand ballet narratif capable de résister comme ceux de Cranko ou de son protégé Neumeier à l’épreuve du temps.

onegin munich
Lucia Lacarra (Tatiana), Marlon Dino (Onéguine)

Pour autant, Onegin est-il la meilleure occasion pour le montrer ? Si on admire comme de juste l’intelligence chorégraphique de Cranko et la manière dont il fond narration et danse en un continuum, Onegin se perd parfois un peu trop dans l’anecdotique et le pittoresque, loin de la richesse et de la variété de son Roméo et Juliette. Même les pas de deux qui assurent le succès du ballet restent assez conventionnels, hors de l’un ou l’autre des portés qui ne sont pas loin de rappeler ceux du ballet soviétique contemporain, ce qui n’est pas nécessairement un grand apport esthétique.

onegin munich
Lucia Lacarra (Tatiana), Zuzana Zahradniková (Madame Larina), Vincent Loermans (Grémine)

Du moins sont-il l’occasion d’admirer l’étoile de la maison, l’insurpassable Lucia Lacarra, et celui qui est désormais son partenaire régulier, Marlon Dino. Il est regrettable que Lucia Lacarra ne soit invitée à Paris que pour les morceaux choisis des Galas des étoiles annuels, qui donnent d’elle l’image d’une machine virtuose à la limite de la gymnastique acrobatique : ce qui fait tout le prix de ses apparitions n’est pas tant sa souplesse apparemment sans limite que l’intelligence de son travail dramatique et chorégraphique. Loin de ne faire qu’enchaîner des situations réduites à leur stéréotype, elle prend toujours la peine de construire un véritable parcours sur l’ensemble de la représentation et n’engage sa virtuosité qu’à bon escient. Face à elle, l’Onéguine de Marlon Dino, dont la grande taille sert le personnage, est assez en retrait, ce qui peut se comprendre : Onéguine est-il autre chose qu’une projection de Tatiana?




Dominique Adrian © 2010, Dansomanie



onegin munich
Marlon Dino (Onéguine), Lucia Lacarra (Tatiana)

Onegin
Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovsky, adaptée par  Karl-Heinz Stolze

Chorégraphie : John Cranko
Décors et costumes : Jürgen Rose

Onéguine – Marlon Dino
Lenski – Kevin Cregan
Madame Larina – Zuzana Zahradniková
Tatiana – Lucia Lacarra
Olga  – Ivy Amista
La Nourrice – Valentina Divina
Le Prince Grémine  – Vincent Loermans

Bayerisches Staatsballett
Orchester der Bayerischen Staatsoper, dir. Myron Romanul

Mercredi 13 octobre 2010,  National Theater, Munich


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