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Le feuilleton de l'été : Marie Taglioni. 3. enfance

 
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haydn
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MessagePosté le: Mar Aoû 03, 2004 2:25 pm    Sujet du message: Le feuilleton de l'été : Marie Taglioni. 3. enfance Répondre en citant

En Suède, 1802


L'an 1802. Mon père Philippe Taglioni alors un des premiers artistes de l'Académie Impériale de Musique à Paris, fut engagé comme premier danseur pour le Théâtre de Stockholm, où il trouva son art fort arriéré. Les chaconnes et sarabandes y étaient encore de mode, les Zéphires étaient costumés de jupes en satin bleu ou rose, culottes courtes et bottines à talon de même étoffe et de même couleur et les ailes attachées par dessus un justaucorps qui avait l'air d'une cuirasse ; aussi peut-on facilement se figurer l'espèce de révolution que produisit sur la scène l'apparition de mon père, vêtu d'une légère tunique à la grecque, les ailes fixées sur un maillot couleur chair paraissant ainsi adhérer aux épaules, sa chaussure fine et légère. La sensation fut tout à son avantage, il faut dire aussi qu'il était très beau, admirablement bien fait, avait un profil parfait, une taille moyenne et très élancée. Tous les artistes (hommes) étaient furieux, ne pouvant disconvenir qu'il ne fut très bien ainsi, mais il prétendaient que ce costume de Zéphire était fort inconvenant, ayant l'air d'avoir mis certain vêtement pardessus son pantalon ; malgré leurs critiques, ils l'imitèrent, mais ne purent imiter sa grâce, sa légèreté et la perfection de sa danse. Mon père avait un charme extrême dans toute sa personne et une grande distinction.

Le Seigneur qui avait été envoyé à Paris pour y engager des artistes avait donné au jeune Taglioni une lettre d'introduction auprès de mon grand-père. Enthousiaste pour tout ce qui arrivait de France, il prit conseil de ce jeune homme pour ses costumes avec d'autant plus de confiance qu'il le savait lié avec le grand tragédien Talma. Monsieur Taglioni, alors âgé de 25 ans, demanda la main de Mademoiselle Sophie Karsten, qui lui fut accordée. Je suis le premier enfant de ce mariage, née le 23 avril 1804. Et le premier mot qui fut dit sur moi fut : "Mademoiselle Taglioni est arrivée. - Vraiment, répondit-on, est-elle jolie, danse-t-elle bien? - Eh, vous m'en demandez trop, je ne suis pas sorcier, elle n'est au monde que depuis quelques heures". Toutes ces questions faites au sujet de Mademoiselle Taglioni se rapportaient à ma tante, il avait été question de la faire venir en Suède, mais cet engagement ne put avoir lieu, d'où le quiproquo.

J'avais à peine un an lorsque mon père et ma mère quittèrent la Suède pour se rendre à Vienne, en Autriche. Le voyage, me disait ma mère, fut des plus pénibles ; à part les soins que mon âge réclamait, elle était de nouveau grosse, les routes détestables, elle se tenait la plus grande partie du jour à genoux pour éviter autant que possible les cahots de la voiture, les auberges où ils s'arrêtaient étaient sans ressources, il fallait aller soi-même à la cuisine pour y accomoder ce qu'on pouvait y trouver. Heureusement que ma mère était habile cuisinière, dans les pays du Nord, en Suède surtout (dans ce temps-là du moins), il entrait dans l'éducation des jeunes filles, qu'importe son rang dans la société, d'apprendre à faire la cuisine afin de devenir bonne ménagère ; ma mère et sa cousine avaient appris chez le cuisinier de la Cour, elles dirigeaient toutes deux le ménage, chacune avait alternativement sa semaine, et mon grand-père, qui était très difficile, dînait chez lui de préférencela semaine de sa fille. mais si un des mets était manqué, il disait au domestique : "Servez ce plat à Mademoiselle Sophie".

Revenos au voyage : il paraît que j'étais insupportable, je voulais toujours avoir ma mère auprès de moi, et lorsqu'elle était obligée de quitter la chambre, je poussais les hauts cris ; mon père cherchait par tous les moyens à m'amuser et à me calmer. C'était peine perdue, je voulais ma mère, enfin, perdant patience, mon père me donna une bonne correction dont je portai, au grand désespoir de ma mère, les marques pendant plusieurs jours. Aussi, à partir de ce moment-là, quoique le coeur bien gros, je n'osais plus pleurer. J'aurais, bien plus tard dans ma vieillesse, l'occasion de reparler de ce fait.


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