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Raymonda [Palais Garnier, du 1er au 30 décembre 2008]
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nabucco



Inscrit le: 14 Mar 2007
Messages: 1462

MessagePosté le: Dim Jan 11, 2009 11:41 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Avec beaucoup de retard, mes impressions rapides sur les 3 Raymonda auxquelles j'ai pu assister:
-24/12 (Letestu/Bullion)
-26/12 (Cozette/Paquette)
-28/12 (Alexandrova/Volchkov)
... j'ai malheureusement été obligé de renoncer pour raison de santé à la représentation du 27 avec Dorothée Gilbert...

Concernant la chorégraphie, et bien que je fasse certainement partie sur ce forum des personnes qui aiment le plus les ballets de Noureev (j'ai du mal avec les autres versions, du coup, que ce soit les Lacs russes vus ces dernières années à Paris ou la Bayadère/Makarova/Scala que je suis en train de regarder en DVD), j'avoue que je ne m'y retrouve pas dans ce spectacle long et mal bâti - et ce à la troisième vision comme à la première, n'en déplaise à ce que m'avait assuré un membre éminent de cet éminent forum Wink : en particulier l'interminable et invertébré premier acte, qui n'est structuré ni narrativement, ni chorégraphiquement, me pose de gros problèmes. Certes, je n'ai guère de compétences dans ce domaine (je n'avais vu que la version Ray Barra/Munich de Raymonda, ce qui équivaut à ne pas l'avoir vu du tout), mais j'ai l'impression que l'intervention de Noureev, cette fois, n'a guère contribué à sauver ce ballet de l'insignifiance. Si on déclassait cette production pour faire place à de nouvelles productions, mieux pensées, de ballets classiques, je crois que cela ne serait pas un mal pour le Ballet de l'Opéra. De Noureev, il suffit de garder le meilleur, et ce n'est pas rien (pour moi le Lac, la Belle et la Bayadère au moins)...

Concernant les différents interprètes, je pense ne surprendre absolument personne ici en disant que des trois distributions que j'ai vus, c'est Mlle Alexandrova que j'ai préféré. Cela s'appelle, je crois, le style... C'est-à-dire un travail acharné pour un résultat qui est l'inverse absolu du spectaculaire, à côté duquel un spectateur peu attentif passerait facilement à côté, mais qui n'en est que plus extraordinaire. Il y a là bien sûr de l'aisance, mais plus que cela, une maîtrise absolue de tous les muscles du corps au service d'une interprétation.
Son partenaire n'a pas très bien commencé sa prestation, si j'ai bien compris par manque de répétitions, mais il s'est montré très honorable dans la suite de la représentation. Cependant j'avoue avoir été, dans l'ensemble, plus séduit par Stéphane Bullion en Jean de Brienne, qui m'a donné ici des satisfactions qu'aucun jeune danseur homme ne m'avait donné lors d'un spectacle classique à l'Opéra depuis bien longtemps (en Abderam par contre, le plaisir de retrouver Yann Bridard aura été le plus fort, avec sa danse élastique qui correspond à merveille à la chorégraphie de Noureev, avec ces variations orientalisantes un peu bizarres mais finalement assez intéressantes).
Agnès Letestu, elle, m'a un peu déçu en Raymonda, surtout évidemment en comparaison avec Alexandrova. Déception toute relative, bien sûr, parce qu'elle reste pour moi l'Etoile absolue pour le classique à l'Opéra aujourd'hui: manque d'enthousiasme pour la chorégraphie?
La représentation médiane dont je n'ai pas encore parlé, elle, ne visait pas les mêmes sommets, et ce qui dominait semblait être le souci de s'économiser, ce qui se comprend un 26 décembre. Chez Emilie Cozette, à ce qu'on m'a dit moins en forme que lors de sa prestation précédente (car je connais quelqu'un qui a vu 2 Raymonda avec Emilie Cozette), cette lassitude se traduisait notamment par la hauteur des sauts, réduite au minimum, et par une sorte d'indifférence, masquée sous un constant sourire très star, face à tout ce qui l'entoure. Elle a en outre posé des problèmes de partenariat constants à Karl Paquette, à tel point qu'il a dû s'y reprendre à plusieurs fois pour la soulever et l'amener sur scène lors du Grand pas de l'acte III... Paquette, sauveur de tant de représentations, était du reste même dans ses propres variations, visiblement, dans un jour sans, sans même la joie de danser qu'on lui voit habituellement: je le dis avec tout mon respect pour ce danseur de très grande qualité qui est finalement, un peu faute de combattants, un des rares danseurs hommes capables de danser jusqu'au bout un rôle classique aujourd'hui à l'Opéra, et je suppose qu'il en est parfaitement conscient et désolé. Merci pour tout, et au plaisir de le revoir en forme la prochaine fois! Du reste, c'est toute la représentation qui était comme cela, avec des problèmes de placement dans le corps de ballet ou entre Henriette et Clémence qui ont failli entrer en collision...

Mais quelle importance quand, à côté de cela, on reste avec le souvenir d'une Alexandrova...


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haydn
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Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26517

MessagePosté le: Lun Jan 12, 2009 1:28 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Merci de ces commentaires, Nabucco, qui, même tardifs, sont toujours les bienvenus.

Je n'ai pas vu Emilie Cozette en Raymonda, mais les échos que j'ai eus de sa prestation étaient plutôt positifs. En tout cas, sa Clémence - que j'ai vue, celle là - m'avait semblé assez réussie.

Je sais qu'une des représentations (et il me semble bien que c'était celle du 26/12) avait été assurée vaille que vaille par Karl Paquette, victime d'une grippe, et qui n'avait finalement annulé qu'un seul spectacle.


Pour Malixia : merci de consulter votre messagerie privée.


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nabucco



Inscrit le: 14 Mar 2007
Messages: 1462

MessagePosté le: Lun Jan 12, 2009 3:24 pm    Sujet du message: Répondre en citant

J'ai oublié de raconter une anecdote relative à la représentation du 28 avec Alexandrova: au premier entracte, les spectateurs du premier rang de ma loge (places de première catégorie), très polis, ont prévenu les autres spectateurs de la loge qu'ils ne reviendraient pas pour la suite. La raison de cette défection? Non, ce n'était pas les défauts de la version Noureev, ou les suites d'une indigestion liée aux fêtes:
"Nous sommes très déçus, il n'y a pas d'étoiles dans la distribution"...

Ce qui, du reste, était rigoureusement exact...


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maraxan



Inscrit le: 24 Nov 2006
Messages: 600

MessagePosté le: Lun Jan 12, 2009 7:50 pm    Sujet du message: Répondre en citant

J’avoue avoir fait le cheminement inverse ou presque… et être parti après le deuxième acte d’une représentation Marie-Agnès Gillot/Nicolas Le Riche/José Martinez… mais ce n’est pas qu’il y avait trop d’étoiles…Laughing mais c’est vrai que souvent, le spectateur occasionnel est un peu polarisé là-dessus comme un repère fiable à défaut d'autre et qui monte aussi le niveau d’exigence. C’est toute l’aura du mot (et du statut), non ? Après les mésaventures de José Martinez avec Aurélie Dupont, une dame à côté de moi a dit très sérieusement à son voisin à la fin "il est tombé, on devrait lui retirer son étoile !"

Sinon, j’ai beaucoup aimé la Raymonda d’Emilie Cozette, très terrestre et humaine, voluptueuse aussi, un autre style qu’Agnès Letestu ou Dorothée Gilbert mais qui est tout aussi agréable. Karl Paquette n’était visiblement pas dans son assiette et je l’ai trouvée paradoxalement plus à l’aise avec Stéphane Bullion… c’est dommage pour elle comme pour lui d’ailleurs…


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Fanchon



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Messages: 378
Localisation: liege

MessagePosté le: Lun Jan 12, 2009 8:04 pm    Sujet du message: Répondre en citant

bonjour,
j'ai vu le couple Emilie Cozette et Karl Paquette le 29 decembre,
et je pense la même chose que Nabucco,difficultés de soulever la danseuse,Emilie Cozette n'etait pas à l'aise dans le 1er et 2em acte,
mais a retrouvé son aisance dans le 3em... comme si elle avait
repeté celui là en particulier...mais comme dit plus haut,la choregraphie
est vraiment difficile,voir même assez "vache" Shocked
alors etait ce le trac???



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Fanchon
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maraxan



Inscrit le: 24 Nov 2006
Messages: 600

MessagePosté le: Lun Jan 12, 2009 8:38 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Oui, les pas de deux sont vraiment difficiles dans ce ballet et je trouve qu’on a tous été un peu durs, et moi en premier, avec les garçons qui s’y sont risqués, alors qu’ils n’ont pas l’habitude de les danser. Ce sont des choses qui se travaillent et pas uniquement en répétition… et j’imagine que Stéphane Bullion et Agnès Letestu ont bossé comme des fous pour nous présenter cette qualité présente dans leur partenariat qui d’ailleurs s’est améliorée au fil des représentations. Je pense aussi à José Martinez qui a dû travaillé dans l’urgence, ce qui n’est pas très satisfaisant pour un artiste… Karl Paquette a sans doute payé un surcroît d'activité dans des rôles principaux et un retour rapide après son micro arrêt. Bon, c'est sûr, les danseurs aiment danser, mais dans les grands rôles, il faut digérer l'intériorisation des interprétations, la concentration, l'influx nerveux, qui sont indépendants de l'effort purement physique…


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Alain



Inscrit le: 25 Déc 2008
Messages: 161

MessagePosté le: Lun Jan 12, 2009 9:52 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Pour prolonger les remarques concernant la soirée du 26 avec Mlle Cozette et Mr Paquette, je confirme que celui-ci devait être épuisé pour alléger son manège au 3ème acte au point de ne faire que des coupés-jetés en lieu et place des doubles sauts de basque - piqués doubles chorégraphiés par Noureev.
Son type de physique "animal" m'a paru très approprié au personnage du sarrazin plutôt qu'au prince quand bien même Mr Paquette dégage une puissance rassurante autant pour ses partenaires que pour les spectateurs qui ne tremblent pas sur leurs sièges à l'approche des acrobaties de ces variations... Very Happy
Par ailleurs même si je suis enclin à penser que la raideur de posture du buste de Mlle Cozette a tendance à limiter grandement son expressivité ainsi que parfois sa technique, elle semblait avoir une puissance du bas de jambe (notamment dans les sautés sur pointe ainsi que dans sa variation du 3ème acte) qui était impressionnante à voir.
De même elle fût, de mon point de vue, une des rares interprètes à véritablement "intégrer" dans sa danse la sensualité développée par Abdéram dans les actes précedents pour en faire au 3ème acte comme un héritage (un souvenir non dissimulé de ces échanges avec Abdéram) visible dans sa propre danse et personnalité : cela m'a renforcé dans l'idée que Mlle Cozette gagne à être distribuée dans des registres de "tempérament" au-delà de ce que peut dégager de juvénile et de virginal son beau visage... Wink
Pour finir je voudrais rappeler que bien que légèrement blessé le soir de la répétition générale Mr Martinez a quasiment assuré à lui seul la moitié des représentations de cette série de Raymonda en tant que Jean de Brienne avec une régularité d'exécution, des fameuses pirouettes attitudes en dedans notamment, qui laisse admiratif Exclamation



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"Toute oeuvre est morte quand l'amour s'en retire." André Malraux
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nabucco



Inscrit le: 14 Mar 2007
Messages: 1462

MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 10:34 pm    Sujet du message: Répondre en citant

maraxan a écrit:
Sinon, j’ai beaucoup aimé la Raymonda d’Emilie Cozette, très terrestre et humaine, voluptueuse aussi, un autre style qu’Agnès Letestu ou Dorothée Gilbert mais qui est tout aussi agréable.

Comme quoi tous les goûts sont sur Dansomanie Wink ...
J'aime beaucoup votre anecdote. En des temps où on parle de réforme du permis de conduire, faudrait-il s'en inspirer? On parle de faire comme dans d'autres pays, avec un permis à repasser à intervalles réguliers - ou on pourrait faire des étoiles à points: 3 points en moins pour une chute Laughing ...


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Ailey



Inscrit le: 24 Aoû 2008
Messages: 70

MessagePosté le: Mar Jan 13, 2009 11:08 pm    Sujet du message: Répondre en citant

On trouve sur Youtube une belle video de Maria Alexandrova dans la variation de "la claque" (le 28-12)
http://fr.youtube.com/watch?v=Bnz-M9kgVw0



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Ailey
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clavigo1980



Inscrit le: 12 Sep 2008
Messages: 30
Localisation: Moscou-Paris

MessagePosté le: Mer Jan 14, 2009 3:23 am    Sujet du message: Répondre en citant

Merci bien a Ailey pour ce message, C'est tres agreable d'avoire le chance regarder ce vidio , avec Maria Alexandrova.Pour moi, elle dance cette variation tres bien,mais il me semble que dans la deuxieme partie,elle ne se sentait pas avec assurance,parce que le temps,lequel a ete donner( si on peut dire comme ca), etait pour elle en peu lent. Et encore a propos des claques. J'ai lu, que un, des membres ,a ecrit que Melle Alexandrova n'a fait pas les claques sonores.Je dois dire que en tradition russe faire les claques sonores c'est le signe d'un mauvais gout.Voila pour quoi, on ne fait pas les claques ni a Mariinsky, ni a Bolchoi.

Et a la fin, Bonne année à tous))))))( un peu tard, mais...)et encore merci a Haydn,pour ce beau forum, et joyeux anniversaire a DANSOMANIE( et pardon, mon francais est vraiment terrible)


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Monica



Inscrit le: 17 Jan 2006
Messages: 327
Localisation: Madrid

MessagePosté le: Mer Jan 14, 2009 11:01 am    Sujet du message: Répondre en citant

Merci beaucoup Ailey! Very Happy

J'ai encore le souvenir de Maria Alexandrova à Madrid, éblouissante dans son tutu bleu, dansant la même variation en version Grigorovich et je dois dire que j'ai beaucoup apprécié de la voir dans la version Noureev! C'est une si grande artiste qu'elle est là pour mettre en valeur la danse et la musique sur laquelle celle-ci s'appuie et non pas que des exploits techniques (et ils sont là...) mais de la danse et de l'art! Magnifique!

(et je préfère mille fois la variation sans "claque sonore" Wink )


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maraxan



Inscrit le: 24 Nov 2006
Messages: 600

MessagePosté le: Mer Jan 14, 2009 8:32 pm    Sujet du message: Répondre en citant

nabucco a écrit:
maraxan a écrit:
Sinon, j’ai beaucoup aimé la Raymonda d’Emilie Cozette, très terrestre et humaine, voluptueuse aussi, un autre style qu’Agnès Letestu ou Dorothée Gilbert mais qui est tout aussi agréable.

Comme quoi tous les goûts sont sur Dansomanie Wink ...


Je ne crois pas être le seul à avoir apprécié Emilie Cozette ici ? Enfin de toute façon, j’assume assez bien ce genre de choses. Smile
J’ai trouvé sa variation de la claque "habitée" avec charme et une sensualité inégalée chez les autres Raymonda… maintenant je n’ai pas dit que je ne préférais pas la Raymonda d’Agnès Letestu… Very Happy

clavigo1980 a écrit:
Je dois dire que en tradition russe faire les claques sonores c'est le signe d'un mauvais gout.Voila pour quoi, on ne fait pas les claques ni a Mariinsky, ni a Bolchoi.

Par curiosité, j’aimerais savoir pourquoi c’est de mauvais goût de taper dans ses mains ? Pour moi, cela détermine comment Raymonda va danser sa variation, sensuelle, glamour, dominatrice, sèche, etc… et donc ça n’a pas de signification indépendamment de cela… et d’ailleurs, pour en revenir à Agnès Letestu Very Happy, elle semble s’être beaucoup amusée avec ça en modifiant son entrée dans la variation selon les soirées, tapant parfois très fort, parfois non…


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clavigo1980



Inscrit le: 12 Sep 2008
Messages: 30
Localisation: Moscou-Paris

MessagePosté le: Mer Jan 14, 2009 9:51 pm    Sujet du message: Répondre en citant

a Maraxan
Vous avez dit:"...pourquoi c’est de mauvais goût de taper dans ses mains ..." parce que il faut bien commprendre que dans la tradition russe la partie de Raymonda, c'est une partie lirique et vraiment aristocratique ,et a la vercion de Nouriev, nous voyons sur la scene une famme fatale, peut etre audacieuse .Et encore les stiles de la danse francaise et russe sont differents.Et les danceures russes peuvent faire les claques sonores seulement dans les parties du caracters, et on ne fait pas jamais ca dans les parties liriques. Wink


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Glinka !



Inscrit le: 15 Sep 2007
Messages: 84

MessagePosté le: Jeu Jan 15, 2009 5:03 am    Sujet du message: Répondre en citant

Cher Clavigo1980 ! Vous vous lamentez parfois de l'insuffisance de votre français... Ne l'améliorez jamais ! Wink Car cela vous a permis, voir ci-dessus, d'employer un adjectif qu'un parfait francophone, cherchant le bon parmi tous ceux que la langue correcte autorise pour la réalité donnée, n'aurait sans doute jamais écrit : « audacieuse »... Raymonda (version Nouréev) « peut-être audacieuse... »

Plusieurs commentaires ont souligné que certaines interprètes avaient fait de Raymonda une fiancée fidèle dont la paupière se levait sur d'étranges lueurs... Une chaste fiancée de Jean rien moins qu'effrayée d'Abderam, et même le voyant comme à regret périr... Mais aucun mot (sauf à tout relire plus attentivement et à en trouver un) n'a été aussi merveilleusement évocateur que cet adjectif à priori surprenant, presque impropre : « audacieuse »...

Il entrouvre en effet, comme un couteau d'écailler la clôture de l'huître, l'âme hermétique de l'esseulée en attente, et y révèle un monde étrange, et scintillant de victoires à venir, inscrites dans cette audace pour l'heure un peu enfermée ; inscrites dans le double sens de cette audace -courage sans frein, insouci des morales ici à seul usage de répression du féminin- dont ne se laisse paraître que le « peut-être »... De cette audace, on pressent qu'Abderam, tout puissamment félin qu'il soit sous les traits de tel ou tel danseur, aurait été mué vite en matou diminué...

La Raymonda de Nouréev (le personnage ; non la chorégraphie, dont je suis bien sûr incapable de dire quoi que ce soit) est effectivement « peut-être audacieuse » parce que son esprit, son intelligence historique, précède, ou plutôt anticipe, sur le mode de l'hypothèse à faire devenir vraie, la réalité dont est certaine la Raymonda de Petipa... Celle de Nouréev n'est certes dupe ni du croisé ni du Sarrazin, ni des deux réunis sous le genre masculin... D'où son « audace », qui veut signaler, d'abord d'elle à elle-même, les deux vaincus proches... Mais elle ne sait pas encore avec certitude, elle pressent seulement l'échec des croisades comme l'achèvement triomphant de la Reconquista – et l'avènement final (pas encore advenu, mais il viendra ! Il viendra !) du féminin...

Si tout cela n'apparaît, au moment où se danse la Raymonda version Nouréev, que dans le seul esprit de l'héroïne, invisible à des yeux autres, elle s'en autorise pour manifester -comprenne qui pourra son audace- qu'elle sera la triomphatrice ultime. Et surtout pour faire de son pressentiment, audacieusement, de son esprit au sien propre, une certitude, comme si l'avenir inéluctable ne pouvait venir d'un déterminisme inscrit dans les astres, mais devait résulter d'une impulsion humaine, la sienne : le claquement de mains se doit donc, ici, d'être effectivement sonore (au degré que la ballerine veut selon sa liberté d'interprète).

La Raymonda russe est, dans sa conscience, celle déjà d'après deux victoires. Elle est déjà, sans le moindre doute dans son esprit, celle du moment où « l'échec de la troisième croisade contribue à remettre en question l'éthique guerrière chrétienne. (...) Alors que l'érotique féodale était un amour à dominante masculine, l'homme se subordonne [maintenant] à la volonté de la femme, qui le séduit par sa beauté et des qualités reconnues comme supérieures. Le lien d'amour, ce service de la Dame, qui est un véritable culte de la Femme, représente une sorte d'inversion du lien vassalique. » (Marcel Durliat, L'Art roman, Mazenod, p. 48 )

La Raymonda russe est déjà, avec certitude dans sa propre conscience, la Dame, la Femme (avec d'autant plus de certitude qu'au temps de Petipa la ballerine était Reine...), et, nécessairement, le geste qui manifeste sa suzeraineté (si la chorégraphie l'impose -elle pourrait s'en passer, tant il n'est alors qu'un attribut secondaire et presque superflu de l'habitus de la suzeraine) sera limité à son signe, à sa figuration symbolique -qu'il soit autre serait incongru, malséant même, comme d'un monarque qui devrait affirmer : je le suis. C'est pour cela qu'une ballerine russe à Moscou ou Saint-Pétersbourg ne fera jamais de claquement sonore, et même le réduira, comme Ulyana Lopatkina*, à un effleurement à peine...

*Si j'avais les vingt sous qui me manquent pour faire trois francs, j'aurais volontiers enchéri pour le "tableau-alphabet" d'elle qui va être mis en vente... Afin de l'offrir à une personne de Dansomanie.. Mais il va aller à quelque oligarque... J'en suis malade...

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PS du 17/01-Ajouté (ici et pas à la suite du fil) par simple nécessité « endogène » (comme le serviteur du roi Midas chuchote à la terre...), sans le but de tenter de poursuivre une discussion (qui de toute façon serait peut-être « sans fin »), encore moins de « polémiquer », et en profitant surtout, maintenant, de ce qu'une page tournée ne se retourne jamais dans sa tombe et repose en paix...

Une question a été posée plus loin (avec d'ailleurs l'adjuvant tonal -surprenant- d'une sorte de petit diable aux yeux rouges...) : pourquoi donc lyrisme et audace ne cohabiteraient-ils pas ?...
Certes l'Histoire est pleine d'exemples de lyrisme accompagnant l'audace. L'histoire littéraire aussi. Phèdre est après tout lyrique et audacieuse. Le héros (l'héroïne) romantique est souvent un (une) lyrique audacieux (audacieuse).

Haydn a répondu en mettant en relief l'implicite, dans l'indication de Clavigo1980 qui sans doute avait motivé la question : la convention, propre à une tradition. Mais, pour moi, cette convention est aussi fondée sur un impératif psychologique -impératif latent dans ce que disait Clavigo1980.

On peut admettre que « lyrisme » avait bien en premier, dans ce contexte, le sens qu'il a habituellement en art : expression de son être selon l'axe émotif/conatif (« j'exprime au mieux ce que je ressens pour agir au plus fort sur tes émotions et sur ta conduite »). Mais de toute évidence le mot s'effaçait, s'absorbait dans le concept qui, ici, l'englobe : celui de « noble ». L'antinomie n'était pas tant entre « lyrisme » et « audace » qu'entre « audace » et « noble ».

Et surtout, l'audace (avec son « peut-être ») était selon moi de l'audace : c'est-à-dire un mot pour un autre... L'italique faisant passer du sens net et précis au sens « tremblé » (comme celui de Mallarmé pour Barthes), où l'on voit un scintillement de significations multiples, de connotations en fait, et au fond de ce brouillard évocateur, peut-être le mot : « provocante » (pour « audacieuse »), mot proche alors de la deuxième acception de l' « audace »...

Raymonda/Nouréev peut être audacieuse (provocante...) et lyrique (au sens strict). Mais Raymonda/Petipa, forcément "noble" au plus haut point (puisqu'en esprit suzeraine de Jean de Brienne -et même, si l'on veut, de son historique compagnon d'armes André roi de Hongrie), bien sûr lyrique dans sa danse, ne peut absolument pas être audacieuse, au-delà même d'une simple convention de style : ce serait tout simplement une incongruité (comme j'ai essayé -sans doute mal- de l'expliquer au-dessus), parce que cette notion est pour elle impensable -l'idée de claquer audacieusement des mains ne peut pas davantage lui venir à l'esprit qu'à Jeanne d'Arc celle de faire la catin...




Dernière édition par Glinka ! le Sam Jan 17, 2009 5:15 am; édité 3 fois
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haydn
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Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26517

MessagePosté le: Jeu Jan 15, 2009 4:40 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Glinka ! a écrit:
Si j'avais les vingt sous qui me manquent pour faire trois francs, j'aurais volontiers enchéri pour le "tableau-alphabet" d'elle qui va être mis en vente... Afin de l'offrir à une personne de Dansomanie.. Mais il va aller à quelque oligarque... J'en suis malade...



Pourriez-vous éclairer ma lanterne, Glinka !? Peut-être la réponse se trouve-t-elle sur Dansomanie, mais je ne lis pas toujours le forum avec assez d'attention Embarassed .


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