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Nouvelles du Royal Ballet / News from the Royal Ballet
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paco



Inscrit le: 28 Oct 2005
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MessagePosté le: Mer Mai 03, 2017 12:44 am    Sujet du message: Répondre en citant

Salle comble pour la reprise époustouflante du Mayerling de Mc Millan ce soir, avec un Edward Watson complètement halluciné, dans un état second, et techniquement souverain. A ses côtés, une distribution de luxe : Natalia Osipova dans une forme éblouissante, complètement transportée dans le Pas de Deux du dernier acte, se livrant aux abandons "Mc Millaniens" avec une force et une folie qui emportent tout sur leur passage. Et comme si cela ne suffisait pas, le plateau réunissait également rien moins que Yanowsky, Lamb, Nunez (dans le rôle très bref mais difficile de Mitzi Caspar), Hayward, ... toutes fantastiques, tant sur le plan dramatique que pour la qualité superlative de leur danse.

Seul petit bémol, le Bratfisch d'Alexander Campbell, fortement ovationné mais à mon avis un peu hors sujet : dans ce rôle on attend quelque chose de plus "angélique", plus aérien, ce qui correspond peu à la maturité physique et intellectuelle de Campbell à ce stade de sa carrière (c'est curieux de voir à quel point il a changé en deux saisons, des rôles auparavant évidents pour lui ne semblent plus lui convenir. Ce n'est pas la technique qui est en cause, juste un besoin d'évoluer en termes de répertoire).

Une reprise qui confirme encore une fois la forme superlative du Royal Ballet en ce moment. Quand on pense qu'ils ont même aligné des Matthew Ball et Valentino Zucchetti juste pour 2 minutes de danse de comparses...

A l'ouest de la Russie, je ne connais aujourd'hui aucune compagnie européenne capable d'aligner un tel plateau de personnalités superlatives et de provoquer de tels frissons dans des rôles qui, par ailleurs, sont éprouvants techniquement.
Et dire que, parallèlement à ces rôles épouvantablement difficiles, les mêmes Principals alternent avec un Mixed Bill...


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sophia



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MessagePosté le: Mer Mai 03, 2017 9:14 am    Sujet du message: Répondre en citant

Merci Paco.

Le ROH vient de publier la liste (provisoire) des danseurs qui vont rejoindre la compagnie la saison prochaine, parmi lesquels figure William Bracewell, du BRB, engagé comme soliste (ce fut aussi le cas d'Alexander Campbell il y a quelques années, il me semble).
Stanislaw Wegrzyn est la recrue "Prix de Lausanne", mais tous les autres danseurs viennent de l’École du Royal Ballet. Un recentrage sur l'école qui se confirme donc.
http://www.roh.org.uk/news/new-dancers-to-join-the-royal-ballet-for-201718-season

A noter également, ce soir, 19h15 (20h15 en France), une répétition en direct, à suivre sur la chaîne Youtube, des pièces qui composent la prochaine soirée Ashton.
Avec Zenaida Yanowsky pour Marguerite et Armand, Marcelino Sambé et Francesca Hayward pour The Dream.
http://www.roh.org.uk/news/watch-live-rehearsals-for-the-royal-ballets-forthcoming-programme-of-works-by-ashton



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paco



Inscrit le: 28 Oct 2005
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MessagePosté le: Ven Mai 19, 2017 9:27 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Première, hier soir, d’un Quadruple Bill assez dense (2 pièces de 45 minutes auxquelles s’ajoutent la Tarentella de Balanchine et le Vertiginous Thrill of Exactitude de Forsythe, un spectacle de 3h au total entractes compris), incluant une nouvelle création de Liam Scarlett et réunissant une grande partie des stars actuelles de la compagnie : Osipova, Yanowsky, Nunez, Hayward, Bonelli, McRae, Watson, Hay, Ball, Muntagirov, Sambé, ...

Disons-le d’emblée, la soirée fut globalement excitante, même si non exempte de « oui mais » … Une soirée où l’émotion a joué aux montagnes russes : tripes bouleversées à la sortie après la prestation grandiose de Zenaida Yanowsky dans le Scarlett, joie de vivre à l’entracte après le duo explosif de drôlerie de Hayward-Sambé dans la Tarentella, …

Cette soirée avait un petit air d’avant-première des adieux de Yanowsky (prévus le 7 juin dans Marguerite & Armand lors d’un autre Quadruple Bill), tant la création de Scarlett semblait sculptée sur mesure pour cette artiste hors du commun, ce qui donna d’ailleurs lieu à un triomphe personnel où les tonnerres de vivats du public, mêlés aux immenses bouquets de fleurs apportés sur scène par les régisseurs, revêtaient déjà une allure d’hommage.


Liam Scarlett était très attendu, après un parcours chorégraphique prometteur mais inégal, ponctué notamment par sa très intéressante et imaginative contribution au spectacle Lest we forget pour l’ENB, mais aussi par son ratage dans l’univers du narratif lors de Frankenstein la saison passée au RB.

Son nouveau ballet, « Symphonic Dances », basé sur la partition éponyme de Rachmaninov, s’inscrit incontestablement dans les réussites. Il y renoue avec une approche plus abstraite, tournant le dos à la narration, pour construire un triptyque bien ficelé, dont on ne peut nier la force dramatique même si, évidemment, chez Scarlett il ne faut pas s’attendre à de l’avant-garde, son langage restant solidement ancré dans le néo-classique. Mais il maîtrise tellement bien ce langage qu’il réussit à rendre tous les mouvements évidents, naturels, parfaitement en phase avec l’émotion qu’il veut susciter, s’imposant en orfèvre de la dimension théâtrale d’un ballet.

Dans des tons rouge, blanc et noir, son ballet est construit autour de la plastique sculpturale et magnétique d’un personnage féminin central, ici personnifié avec une aura électrique par Zenaida Yanowsky, dont le charisme ravageur, sachant alterner fougue et fragilité selon les moments, transforme notre émotionnomètre en bouillie (cardiaques s’abstenir…). Dès son entrée en scène elle impose une présence, comme Maria Callas le faisait dans un opéra, par une autorité dramatique, une précision millimétrée des mouvements, qui campent immédiatement un personnage.

Articulées autour de ce personnage, trois parties distinctes : la première la met aux prises avec un jeune homme aux atours félins, séducteur aux attitudes qui ne sont pas sans rappeler un faune (ce qui fait parfaitement écho aux bois de l’orchestration à cet instant). Leur rencontre inversera progressivement les rôles, la « Femme » dominant progressivement le séducteur jusqu’à ce que celui-ci en soit complètement désemparé. Dans le personnage du « faune », d’une redoutable complexité par son mélange de virtuosité et de lyrisme « félin », James Hay fut un partenaire particulièrement convaincant, quasiment idéal tant ce rôle semble le miroir de sa personnalité artistique.

Le second tableau a, esthétiquement, un petit côté « déjà vu » avec un groupe d’hommes vêtus de larges jupes, ce qui semble devenu le nouveau tic à la mode en danse contemporaine. Mais passé l’agacement initial, le brio avec lequel les « ensembles de jupes » rouges sont menés finit par dégager une beauté visuelle assez irrésistible, sur fond d’éclairages tantôt blafards tantôt argentés. Dans cette inversion des rôles la « Femme » prend des atours d’aigle conquérant, impérial, inquiétant, non dénué de noirceur.

Noirceur qui disparaît au troisième tableau, où réapparaissent les hommes cette fois en tenue gymnique rouge blanc noir, tandis que la Femme mêle à la puissance des tableaux précédents une fragilité toute nouvelle, en phase avec les tons mineurs de la partition à ce moment-là. Le tout se conclut par une danse d’ensemble très syncopée, assez irrésistible dans ses agitations sauvages, où tous les danseurs sont amenés à exécuter des figures d’une grande virtuosité.

Ce qu’il ressort de tout cela, c’est qu’en réalité le synopsis de ce ballet est fort maigre et pas d’une grande créativité, les inversions homme/femme dans la danse n’ayant rien de nouveau. Par ailleurs je mets au défi quiconque d’y comprendre le moindre message, la moindre pensée. Probablement Scarlett lui-même n’en sait-il trop rien… ça, c’est pour le côté « oui mais », que l’on ne peut omettre en toute objectivité (et qui vaudra sûrement des critiques mitigées dans la presse, avide de surprises et d’éclats de génie) …

Et pourtant cela marche incroyablement bien ! Car Scarlett maîtrise admirablement ce qui fait l’essentiel d’une œuvre réussie : la capacité à dégager une émotion, à toucher notre sensibilité. Ainsi on ressort de cette œuvre remué, ému, touché, sans que l’on sache pourquoi, mais incontestablement il s’est passé quelque chose.
Techniquement la chorégraphie est d’une difficulté redoutable : on sent que Liam Scarlett s’est fait plaisir à écrire un ballet taillé sur mesure pour la virtuosité désormais superlative du Royal Ballet. Et bien entendu il dispose avec Yanowsky de la personnalité idéale pour composer le personnage principal.


En première partie de soirée, le Forsythe fut un peu hétérogène, probablement en raison du remplacement de dernière minute de Sarah Lamb et Lauren Cuthbertson par Beatrice Stix-Brunell et Akane Takada, ce qui n’a pas permis au quintette de danseurs un temps suffisant de répétitions/ réadaptation pour caler les ensembles. En ressort une démonstration de virtuosité et de panache incontestable (avec Nunez, McRae et Muntagirov le contraire eût été étonnant 😉 ), mais il a manqué, à mon goût, ce petit truc capable de transformer cette pièce en autre chose qu’une démonstration.

Suivait la Tarentella de Balanchine, qui fut, avec le Scarlett, l’autre belle surprise de la soirée, et quelle surprise ! Loin d’en faire une « pièce de gala », Francesca Hayward et Marcelino Sambé ont construit un moment de drôlerie irrésistible (j’ignorais que l’on pouvait faire rire 2 200 spectateurs avec 10 minutes de Balanchine !), s’amusant ostensiblement en se jouant des difficultés techniques pour transformer le duo en bulles pétillantes. Aucune démonstration dans leur virtuosité, tout étant au service d’une musicalité innée et d’une volonté assumée, quasiment mimée, de s’amuser. Le sourire radieux, ensoleillé de Hayward et le regard malicieux de Sambé furent irrésistibles. Je n’avais jamais vu cette Tarentella sous cet angle, qu’est-ce que cela change des numéros de galas !!


Entre ces deux ballets et le Scarlett, le Royal Ballet reprenait, en 2e partie du programme, Strapless, un ballet narratif de Christopher Wheeldon, dont j’avais rédigé un compte-rendu quelque peu perplexe lors de sa création la saison passée (voir page 111 de ce fil). Est-ce le recul ? Ou est-ce dû à la maturité des interprètes (les mêmes qu’à la création) ? Toujours est-il que cette pièce m’est apparue sous un jour meilleur hier soir, plus fluide, moins démonstrative, plus théâtrale, moins carte postale. Dans le rôle principal, Natalia Osipova fut particulièrement engagée et crédible, avec un solo final très dramatique. On ne cesse d’admirer l’évolution de cette artiste, désormais parvenue à une synthèse parfaite entre ses dons d’actrice et sa technique hors pair. Aujourd’hui, Osipova est véritablement au zénith et on ne peut que se réjouir du sérieux avec lequel elle s’implique dans la compagnie (cette saison elle aura été distribuée dans quasiment tous les spectacles, qu’elle aura chaque fois préparés avec un professionnalisme sans faille).

A ses côtés, Bonelli et Watson sont quasiment surdimensionnés pour des rôles où ils ont peu à danser. Dans le rôle bref de Belleroche, l’apparition de Matthew Ball, à la plastique tout droit sortie d’un univers Pasolinien, fascine … et l’emporte à l’applaudimètre !

L’ensemble de la soirée a bénéficié d’un bel écrin musical, avec un orchestre en bonne forme, dirigé par un Koen Kessels qui réussit à aborder ces partitions de Schubert, Turnage et Rachmaninov comme ‘il dirigeait un concert symphonique, ne donnant jamais l’impression de se cantonner à un rôle d’accompagnateur. Finalement, sa délocalisation de l’ONP au Royal Ballet lui réussit plutôt bien, il y fait ressortir une personnalité d’interprète que l’on ne soupçonnait pas lorsqu’il dirigeait à l’ONP.


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Alexis29



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Messages: 1244

MessagePosté le: Ven Mai 19, 2017 9:40 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Merci Paco, un plaisir de vous lire !


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paco



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Messages: 3557

MessagePosté le: Sam Mai 20, 2017 10:29 am    Sujet du message: Répondre en citant

Premiers retours presse :

Le Guardian est comblé par la prestation de Yanowsky et semble avoir globalement apprécié le Scarlett, et partage mon point de vue que Strapless passe mieux cette année qu'à sa création :
https://www.theguardian.com/stage/2017/may/20/royal-ballet-mixed-bill-review-scarlett-and-yanowsky-deliver-a-mesmerising-melodrama

Critique positive du Scarlett également dans The Arts Desk :
http://www.theartsdesk.com/dance/symphonic-dances-royal-ballet-review-truly-interesting-creation


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paco



Inscrit le: 28 Oct 2005
Messages: 3557

MessagePosté le: Lun Mai 22, 2017 12:28 am    Sujet du message: Répondre en citant

Même Mr Crisp est enthousiaste Wink
https://www.ft.com/content/d81dbcec-3c81-11e7-821a-6027b8a20f23


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sophia



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Messages: 22086

MessagePosté le: Jeu Mai 25, 2017 5:49 pm    Sujet du message: Répondre en citant

paco a écrit:
La véritable "bad news" est que ce Triple Bill était très bien distribué dans les 3 casts et pour tous les ballets prévus dans la soirée, c'était un véritable feu d'artifice qui clôturait brillamment la saison.
Or, si O'Hare ne parvient pas à débaucher un "Guest" pour ce rôle (Shklyarov à tout hasard, qui connaît bien le rôle, mais il y en a d'autres), le RB devra puiser dans ses ressources internes, ce qui va entraîner des modifications profondes sur l'ensemble du Triple Bill (réallocation des différents rôles) pour les 3 casts...


Il suffisait de demander. Vladimir Shklyarov remplace Serguei Polounine dans Marguerite et Armand les 5 et 10 juin.
http://www.roh.org.uk/news/cast-change-marguerite-and-armand-on-5-and-10-june-2017


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paco



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Messages: 3557

MessagePosté le: Mar Juin 06, 2017 12:40 am    Sujet du message: Répondre en citant

sophia a écrit:
paco a écrit:
La véritable "bad news" est que ce Triple Bill était très bien distribué dans les 3 casts et pour tous les ballets prévus dans la soirée, c'était un véritable feu d'artifice qui clôturait brillamment la saison.
Or, si O'Hare ne parvient pas à débaucher un "Guest" pour ce rôle (Shklyarov à tout hasard, qui connaît bien le rôle, mais il y en a d'autres), le RB devra puiser dans ses ressources internes, ce qui va entraîner des modifications profondes sur l'ensemble du Triple Bill (réallocation des différents rôles) pour les 3 casts...


Il suffisait de demander. Vladimir Shklyarov remplace Serguei Polounine dans Marguerite et Armand les 5 et 10 juin.
http://www.roh.org.uk/news/cast-change-marguerite-and-armand-on-5-and-10-june-2017

En tous cas, vue la Première ce soir, on y a très probablement gagné au change... Vladimir Shklyarov était sur un petit nuage... Compte-rendu plus détaillé demain.

Je profite de ce post, avant mon compte-rendu de demain, pour rappeler la retransmission au cinéma mercredi soir (réseaux habituels UGC et CGR), de la distribution qui réunira Yanowsky et Bolle. Il s'agira de la soirée d'adieux de Yanowsky, et la presse qui a assisté à leur prestation de la semaine dernière en parle avec beaucoup d'émotion...


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sophia



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Messages: 22086

MessagePosté le: Mar Juin 06, 2017 12:45 am    Sujet du message: Répondre en citant

Merci du rappel! Smile


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paco



Inscrit le: 28 Oct 2005
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MessagePosté le: Mar Juin 06, 2017 11:35 am    Sujet du message: Répondre en citant

Le Triple Bill Ashton (The Dream, Symphonic Variations, Marguerite & Armand) qui conclut la saison 2016-2017 était très attendu principalement en raison des 3 distributions réunies pour Marguerite & Armand, un véritable feu d’artifice de stars et de prises de rôles : Osipova-Shklyarov, Yanowsky-Bolle, Ferri-Bonelli. Ce spectacle est également celui sur lequel Zenaida Yanowsky fera ses adieux, mercredi prochain (spectacle retransmis au cinéma). A en juger par le délire qui a accueilli celle-ci lors de sa première prestation la semaine dernière, l’ambiance mercredi promet d’être à la fête !...

Triple distribution d’autant plus attendue qu’il s’agit de personnalités très différentes : pas grand-chose de commun, en effet, entre Osipova, Yanowsky et Ferri, si ce n’est que l’on a là trois charismes décapants et trois artistes exceptionnelles, capables de « recréer » à leur façon ce ballet narratif. On est également curieux de voir ce que donnera la version « Cougar » de cette adaptation de la Dame aux camélias (Ferri-Bonelli) …

Hier soir avait lieu la première prestation de Natalia Osipova et Vladimir Shklyarov, tandem particulièrement idiomatique : lui d’une jeunesse idéale en Armand passionné, fougueux, tel qu’on se le représente. Un Armand à peine sorti de l’adolescence, comme sur un petit nuage, au regard dévorant sa bien-aimée. Quant à elle, pas besoin de forcer sa nature pour incarner avec naturel cette Marguerite tour à tour simple séductrice devenant progressivement amoureuse, puis sombrant dans une passion sans limite.

Cà et là on retrouve les « marques de fabrique » auxquelles Natalia nous a habitués, comme ces petits pas sur pointe esquissant, au 3e tableau, le choc émotionnel résultant de l’insulte publique reçue par Armand, hoquets hallucinés qui ne sont pas sans rappeler sa Giselle morbide du 2e acte.
Natalia Osipova dessine une Marguerite relativement retenue : en comparaison, celle de Sylvie Guillem paraîtrait expressionniste. On n’a pas ici ces grands jetés corps et âme, ces précipitations vers le canapé bras tendus vers le ciel. Les sentiments s’expriment ici davantage à travers des petits gestes, un regard, une respiration, un abandon – pas sûr d’ailleurs que cette interprétation « passe » aussi bien à l’amphithéâtre que dans les premiers rangs d’orchestre…-. Ce n’est que dans la scène finale avec Armand que la passion la dévore, comme si la mort était le seul moment où cette Marguerite était enfin libre de ses sentiments. Une scène plus sensuelle que morbide, portée à ce moment-là par un Shklyarov complètement dévoré par le drame, donnant lieu à une scène très poignante.
Au global, une interprétation magnifique, subtile, très émouvante par de simples détails, sans tomber dans le drame caricatural.

De l’Armand de Shklyarov, à la technique superlative et au charisme incontestable, j’ai un peu regretté l’approche trop uniformément juvénile. Il m’a manqué cette progression psychologique aux 2e et 3e tableaux que Nicolas le Riche savait mettre. On a ici davantage un Roméo qu’un Armand. La scène de « l’insulte », par exemple, est assez lisse, trop « joliment dansée », il y manque cette violence désespérée dont le personnage est sensé faire preuve à cet instant-là. Mais je pinaille et, à en juger par la fête que le public de Covent Garden lui a réservée au rideau final, nul doute que l’on aimerait bien que Shklyarov soit plus souvent invité au Royal Ballet. D’ailleurs, le long baiser échangé avec Natalia Osipova lors des saluts laisse à penser que nous ne sommes pas les seuls à caresser cet espoir …

En première partie je découvrais The Dream, que je n’avais pas encore vu. Mouaich, bof… A vrai dire, aucune adaptation du Songe d’une nuit d’été ne m’a convaincu jusqu’ici, celle-ci ne déroge pas à la règle. L’intrigue est finalement très mince malgré sa complexité, et la danse réussit mal à restituer la truculence de la langue de Shakespeare, seule à même de faire passer une simple comédie en chef-d’œuvre. Les tragédies telles Roméo se prêtent bien au ballet, cela ne me semble pas le cas du Songe, malgré son aspect féérique permettant de beaux effets et de belles images. Sans doute la partition de Mendelssohn, assez monotone, ne facilite-t-elle pas les choses : passé l’effet de surprise de ces merveilleux frétillements des cordes, comme autant de zéphyrs caressant les ramures, on finit par tourner en rond dans une sorte de bande-son finalement assez fade, en tous cas peu propice aux effets de contrastes nécessaires pour maintenir la tension d’un ballet narratif d’une heure.

Ceci étant la production du Royal Ballet est visuellement magnifique, avec ces trompe l’œil dignes de ce que l’on imagine être les superproductions de l’Opéra des années 1900, ses éclairages subtils combinés à des costumes pastel … On se laisse volontiers emporter dans un doux rêve, magnifié par la beauté des mouvements aériens du corps de ballet du Royal Ballet. Mercredi, Obéron sera interprété par Steven McRae, dont la presse a dit beaucoup de bien. Hier c’était Alexander Campbell, honorable mais assez effacé face à la Titiana lumineuse de Laura Morera. Luca Acri s’est quant à lui très bien sorti des difficultés virtuoses du rôle de Puck, avec notamment ces séries de toupies très rapides enchaînées avec beaucoup de rapidité et de légèreté.

Suivait Symphonic Variations, un court ballet non narratif de Ashton, très balanchinien dans ses lignes, sur la musique de César Franck. 6 danseurs magnifiques (Nunez, Naghdi, Choe, Muntagirov, Hay, Dyer) pour 20 minutes de danse trop vite passées !

A la tête de l’Orchestre du Royal Ballet, Emmanuel Plasson est le chef idéal pour souligner la beauté des partitions de ce Triple Bill. Quant aux pianistes, sollicités dans le Franck et le Liszt, ils ont fait mieux qu’une prestation « de fosse », c’étaient de véritables concertistes !
Prochain compte-rendu après la représentation de mercredi…


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Florestiano



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Messages: 1802

MessagePosté le: Mar Juin 06, 2017 4:09 pm    Sujet du message: Répondre en citant

paco a écrit:
Suivait Symphonic Variations, un court ballet non narratif de Ashton, très balanchinien dans ses lignes, sur la musique de César Franck. 6 danseurs magnifiques (Nunez, Naghdi, Choe, Muntagirov, Hay, Dyer) pour 20 minutes de danse trop vite passées !

À noter que Nela et Munti triomphaient la veille-même à Vienne dans Le Lac de Noureev.


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paco



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Messages: 3557

MessagePosté le: Mar Juin 06, 2017 11:22 pm    Sujet du message: Répondre en citant

La presse UK semble conquise par ce Triple Bill et les deux distributions qui ont précédé la représentation d'hier (Yanowsky-Bolle et Ferri-Bonelli). 5 étoiles partout... :

https://www.ft.com/content/50c76c46-49d0-11e7-919a-1e14ce4af89b

https://www.theguardian.com/stage/2017/jun/06/frederick-ashton-royal-ballet

http://www.independent.co.uk/arts-entertainment/theatre-dance/reviews/frederick-ashtonroyal-ballet-royal-opera-house-london-review-a7773401.html

http://www.standard.co.uk/goingout/arts/royal-ballet-triple-bill-dance-review-a-wonderful-swansong-for-zenaida-a3557726.html

http://www.theartsdesk.com/dance/ashton-triple-bill-royal-ballet-review-%E2%80%93-fond-farewell-zenaida-yanowsky


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paco



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Messages: 3557

MessagePosté le: Jeu Juin 08, 2017 12:43 am    Sujet du message: Répondre en citant

Et voilà, ils étaient tous sur le plateau pour offrir leur bouquet de fleurs à Zenaida Yanowsky pour sa soirée d'adieux au Royal Ballet : Carlos Acosta, Monica Mason, Federico Bonelli, Roberto Bolle, et quantité d'autres artistes actuels et passés de la compagnie. Pluie de fleurs interminable évidemment, beaucoup d'émotion. Si Zenaida avait encore un doute quant à sa popularité auprès du public londonien, il est probablement levé ce soir après les 20 minutes de standing ovation hystérique qui ont salué à la fois sa prestation en Marguerite et ses adieux.

Etonnante artiste, évidemment très douée et d'un niveau superlatif dès le début de sa carrière, mais qui a véritablement su tisser un lien affectif avec son public à partir de prises de rôles dans les quelques dernières années. Moi-même j'avoue que ce n'est que récemment que je suis devenu quasiment inconditionnel de ses prestations. Dans de nombreux rôles, notamment ceux qui demandent une personnalité artistique de premier plan, elle nous manquera. D'ailleurs, la question qui est sur toutes les lèvres dès à présent : qui pourra lui succéder dans le rôle de la Dame de Coeur dans Alice cet automne ??

Je reviendrai plus en détails demain sur le déroulement de cette soirée, où ont brillé l'Oberon de Steven McRae et surtout, l'ahurissant Roberto Bolle qui, du haut de ses 42 ans, est un défi à la nature tant sa forme physique, sa technique et son aisance sur le plateau sont un mystère dans l'Histoire de la Danse. Techniquement c'était encore supérieur à ce qu'a fait le jeune Shklyarov lundi, et même en termes de maturité d'interprétation. Un jour on écrira un livre sur ces deux extraterrestres que sont Nicolas le Riche et Roberto Bolle : "De la longévité d'une carrière de danseur classique"...


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haydn
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Messages: 26513

MessagePosté le: Jeu Juin 08, 2017 10:53 am    Sujet du message: Répondre en citant

On attend avec impatience la suite, Paco, merci pour ces comptes-rendus. Smile



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frederic



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Messages: 976

MessagePosté le: Jeu Juin 08, 2017 1:33 pm    Sujet du message: Répondre en citant

On ne peut pas vraiment dire Paco que le rôle d'Armand soit techniquement exigeant. Il requiert avant tout des qualités artistiques.


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