Nouvelles du Royal Ballet / News from the Royal Ballet

[maraxan]

Je reconnais volontiers que la musique et la chorégraphie de Pierrot Lunaire vont bien ensemble, mais personnellement, j’ai beaucoup de mal avec le sprechgesang… cela ne m’empêche pas d'y retourner à chaque fois qu'il passe… parce que la plastique du ballet reste ancrée dans ma tête alors que la musique, j’oublie un peu combien j’ai souffert…
Quand au reste, je n’ai pas voulu être sévère avec le Tuckett parce que le thème m’avait braqué dès le départ et je n’aime pas trop me laisser influencer par des a priori. Et puis, c’était un peu raté du point de vue du chant et de la mise en scène trop confuse mais les danseurs étaient précis et techniquement impressionnants. La Fin du Jour est plus problématique mais je rêvais encore à Pierrot…

[laurence]

J'avais perdu ma plume...
Des danseurs qui s'ecoutent les uns les autres et qui chacun dans un registre différent reflètent parfaitement un cortège d'émotions...un Carlos un peu moins aérien mais quel moelleux dans les déplacements En fait je voudrai bien voir Acosta et Putrov échanger leur role...il me semble que ce serait plus étonnant La chorégraphie date de 1962 Tetlley fait venir tant d'images différentes tant de danses différentes:la comédia les danses de caractères le kabuki le classique le contemporain et surtout une sorte d'art du statuaire qui enroule les corps sur cet échfaudage et ils sont beaux...Quel chorégraphe subtile Il est mort en janvier ...
Mac Millan ,qui a trés souvent toute mon admiration m'a paru sans intérét à coté redite assez plate d'un merveilleux concerto de Ravel qui donnait aux danseurs finalement peu de relief
Je remercie vivement l'ami qui m'a indiqué cette échappée au clair de lune...

[nabucco]

J'ai vu aussi ce spectacle, visiblement dans la même distribution que Maraxan. Je n'ai guère apprécié non plus le Tuckett, qui ne fait pas grand-chose du chef-d'oeuvre de Brecht et Weill. Je précise d'ailleurs que l'oeuvre en elle-même est un ballet chanté où la chanteuse est forcément sur scène. En effet la vision de l'oeuvre est assez sommaire et la soliste principale ne fait pas grand-chose d'intéressant. Le pire est cela dit cette chanteuse pop à deux sous, incapable de restituter correctement la partition malgré une sonorisation hideuse (dommage que le Royal Ballet se laisse aller à ce genre de racolage). Mieux vaut en rester au ballet de Scozzi à Paris, que ce soit avec Anne-Sofie von Otter comme lors de la création ou avec Ursula Hesse ensuite.
Je ne connaissais pas Tetley et ce ballet m'a énormément séduit, surtout avec une distribution pareille. J'aime pour ma part beaucoup la partition merveilleuse de Schoenberg, avec son ironie douce-amère, son humour délicat (et évidemment son travail délicat sur les timbres), et au moins nous avons cette fois une chanteuse (Linda Hirst) qui sans être géniale est au moins capable d'interpréter la partition! La chorégraphie est d'une remarquable cohérence: j'ai craint au début que les évolutions de Pierrot sur les agrès qui constituent le seul élément de décor indiquent un ballet uniquement athlétique, mais il y a toujours une articulation intéressante entre l'athlétique et l'expression.
Enfin, le MacMillan est agréable. Je ne saurais pas en dire beaucoup plus: ça n'est pas très marquant, mais enfin ça ne dure que 23 minutes, c'est joli à voir, sans prétention. Il est bien évident que, si l'ONP devait en mettre une à son répertoire, ce serait à mon goût le Tetley...

[laurence]

Tout à fait d'accord...

[maraxan]

Swan Lake ? Puisque les compagnies londoniennes s’engagent dans une série assez conséquente dans les 6 ou 7 prochains mois avec quatre productions différentes, une de plus ou de moins… Intérêt principal de cette reprise printanière du Royal Ballet étant d’y voir les deux solistes du 15 mai.
Rupert est beau. Il est grand, il est élancé et élégant dans son art. Il est parfait pour jouer les princes avec sa mèche rebelle et son air mélancolique.
Mais bon, sur la scène de la ROH il fait la moue. On lui a dit qu’il fallait qu’il tombe amoureux d’Odette pour que le public reste jusqu’à la fin. Mais là, pas une minute il y arrive. Et dire qu’il aurait pu y échapper s’il ne s’était pas remis de sa blessure… Son regard triste (mais impérial) jamais ne s’illumine lorsqu’il regarde sa partenaire. Il faut dire qu’elle fait la gueule. On l’a maquillé comme une vieille bique et elle a le tutu le plus moche de toute la production, qui pourtant est renommée pour ses somptueux costumes. Pas de chance ! Peut-être est-elle punie ? Elle regarde ses collègues volatiles et se dit qu’elle commence demain l’anorexie. Mais là, elle profite de sa position de reine pour accaparer mollement l’épaule du beau Rupert.
Oui mais, Swan Lake, c’est maintenant, et lui, avec lassitude, la tripote de loin (il a des grands bras mais le dit tutu fait plus que parapluie, parasol) et morose exécute son boulot : sauteur souriant (mais pas trop, c’est souvent triste, ça tombe bien). Il est grand donc, il a de la prestance, et de la technique aussi (ouf !) Il est silencieux mais on sent qu’il retient, pas trop assuré quand même.
Bref, on critique quelquefois les productions de Noureev mais celle du lac des cygnes est à mon avis plutôt réussie, surtout si on la compare à celle-ci, même s’il faut reconnaître qu’hier, elle a déclenché parfois des fous rires (involontaires, j’en ai peur). Et puis avec le Wolfgang/Rothbart de Noureev, on comprenait mieux pourquoi Siegfried était incapable de faire la différence entre Odette et Odile, c’est parce qu’il en pinçait (inconsciemment ou non) plutôt pour Rothbart et on lui pardonnait (presque) d’avoir pris deux heures (et même plus) de ce Tchaikovski pour le raconter.
Next one…

[sophia]

Maraxan, précisons quand même qu'il s'agissait d'une double prise de rôle pour Lauren Cuthbertson et Rupert Pennefather, si je ne m'abuse.

[haydn]

Je n'ai pas vu le spectacle, mais vous semblez sévère Maraxan... Veillons à éviter des attaques trop directes envers les artistes tout de même

[maraxan]

Justement, je les avais (presque) pas cités exprès, car je les aime bien tous les deux... et je pense qu'ils ne sont pas entièrement responsables de mon ennui... cette production est vraiment...
Les voilà en photo puisque Sophia les a outés

[sophia]

Merci Maraxan pour la photo!

Le Lac des cygnes est monté au Royal Ballet dans la production de Sir Anthony Dowell, avec des décors et costumes signés Yolanda Sonnabend. Les tutus des cygnes, notamment, sont longs (mais pas à la manière romantique), et pas forcément très flatteurs...
Mais bon, quand on a vu Le Lac de Bourmeister version manga à l'Opéra de Paris, tout cela est d'un goût extrême...
Il est vrai que cette production (celle du RB) ne jouit pas d'une grande réputation, mais en ce qui me concerne, je ne peux rien en dire, je ne l'ai jamais vue...

Je pense toutefois, et de manière générale, que la danse doit rester le sujet essentiel, et la chorégraphie également, si celle-ci est discutable... D'ailleurs, c'est un des reproches que l'on peut faire aux productions Noureev (d'aucuns penseront peut-être que je crache dans la soupe, mais tant pis!), c'est de centrer l'attention du spectateur au moins autant sur les costumes et les décors somptueux que sur la danse elle-même... Au moins autant, sinon plus, car l'écrin est, je l'ai noté, ce que les gens retiennent avant tout de ses ballets (cela dit, ce Lac m'a l'air, d'après les photos, bien pompeux aussi! ) ... C'est assez pervers, car après, on ne supporte plus de voir un ballet monté avec davantage de simplicité. Le ballet nous parle tout de même d'abord de musique et de danse!


Pour en revenir au Lac du Royal Ballet et en avoir une idée, quelques photos signées John Ross sur www.ballet.co.uk avec Marianela Nunez et Thiago Soares:
http://www.ballet.co.uk/gallery/jr_rb_swanlake_0207

Et le site dédié tout spécialement à cette production:
http://info.royaloperahouse.org/ballet/index.cfm?ccs=1008&cs=2954

[laurence]

Le "Lac" de Noureev est incomparable ; d'une élégante simplicité tant dans la chorégraphie qui flamme les "chevaliers" ensorcèle la symètrie des cygnes avec ici et là qq pointes d'humour tout en respectant les danses de caractère sans toutefois oublier d'injecter du sens...par ce personnage de Rothbart incarnant la magie du "mal"(e)
En comparaison la production du Royal Ballet qui se veut à la fois "mode" d'un gothique grand guignol mais aussi" art déco" quant au plumage ("qui veut faire l'ange fait la bête" a dit un certain Pascal qui lui aimait l'extase dans la rigueur comme vous Sophia...)La chorégraphie portée par Acosta beaucoup et Rojo un peu moins a une fin heureuse mais le délice n'est il pas "d'essuyer une larme et de partir ainsi quoiqu'on fasse d'ailleurs sans en prendre soucis..."

[maraxan]

Sophia, le lac de Noureev à l’Opéra de Paris, c’est les puces de Montreuil à côté de la production –royale- de Covent Garden… et pas uniquement du point de vue des costumes…
Ceci dit, au sujet de « qu’est-ce qu’un ballet ? » (ou quelque chose comme ça) je ne suis pas d’accord avec vous, soit on fait un ballet (full length) et faut que ça se tienne, soit on fait des shows où l’on montre juste des morceaux de bravoure. Lorsqu’on on est coincé trois heures dans une salle, c’est assez légitime d’attendre plus (et d’ailleurs, beaucoup de gens autour de moi sont partis avant la fin- 4 actes-4 pauses, c’est mortel) Pour les ballets qui existent déjà, ça pose un problème, s’ils sont anciens, datés, adaptés aux goûts et possibilités d’une époque. On ne peut pas passer son temps à se dire qu’il faut historiciser (Il faut plutôt archiver). Je trouve que Noureev a beaucoup fait dans son lac pour le rendre regardable des nos jours, dans la chorégraphie bien sûr et aussi la scénographie, ce qui est partie prenante de la danse.
Enfin, je fais amende honorable, je commente rarement ce que je n’aime pas mais là, j’ai craqué. Je m’étais dit que je n’irai plus voir ce lac mais c’est un peu difficile quelquefois de dire non… je n’avais pas réalisé à quel point mon taux de saturation était atteint, maintenant c’est fait, je renonce à Ivan Putrov et Sarah Lamb demain.

[sophia]

Entre le plein et le vide, le trop et le pas assez (bien qu'en l'espèce, la pompe et l'excès ne s'opposent pas au minimalisme des mises en scène de ballet), il y a peut-être place pour autre chose...

Bref.

Evidemment, un ballet, c'est un tout et c'est aussi une scénographie et autant qu'elle ne soit pas faite au rabais (et les ballets de Noureev nous rappellent l'époque - lointaine - où la France avait encore de l'argent à dépenser pour des futilités artistiques!... ), qu'on ait de jolis costumes et de beaux décors... Mais encore une fois, c'est la danse comme art d'exécuter et d'interpréter, la chorégraphie et la musique qui doivent être mises au premier plan, sinon à trop en faire sur le reste (comment éviter la pompe? déjà en habillant les protagonistes du Don Quichotte autrement que comme des princes et des princesses!), on tombe justement dans le "show" (que vous opposez justement aux productions de danse dignes de ce nom) et dans le pur divertissement touristico-culturel. Oui, j'adore la scénographie de Bayadère, Raymonda est prodigieux..., et je peux continuer d'énumérer ces oeuvres théâtrales splendides et délirantes et décadentes (au sens esthétique du terme et sans connotation péjorative) que sont les ballets de Noureev, mais pourtant ce n'est pas là l'essentiel... Et je sais que je préfèrerai toujours voir un Lac "poussiéreux" ou "vieillot" (je mets des guillemets bien sûr) avec des interprètes sublimes, que des danseurs sans brio évoluant dans un écrin majestueux.

Sur Le Lac de Noureev précisément, les actes blancs sont en effet une pure merveille, les plus beaux qu'on puisse rêver peut-être, en revanche, pour les danses de caractère et les scènes de palais, je reste plus que dubitative, personnellement, je n'y vois que froideur clinique et sans âme... Ne regrettez-vous pas, Laurence, la fabuleuse danse russe de la version de Grigorovitch (très criticable par ailleurs - notamment pour son dernier acte - mais pas sur le plan des danses de caractère, me semble-t-il)?

[laurence]

merci Sophia

[paco]

N'ayant pas eu de place pour les représentations avec Rojo et Acosta, je suis allé voir la soirée avec Lauren Cuthbertson et Rupert Pennefather, le long article qui leur avait été consacré par le magazine des Friends of ROH ayant aiguisé ma curiosité.

Je partage assez l'opinion de Maraxan, globalement j'ai trouvé la soirée un peu poussive et sans flamme. Pas tellement à cause des solistes en question (encore qu'il est vrai que ça manquait d'engagement) mais plutôt en raison de la production. Comparé à celle de Nureyev, elle manque complètement de fluidité et de conception dramatique. On a une sorte d'enchaînement de numéros bien exécutés, mais pas un instant on n'est pris. Evidemment c'est peut-être différent les soirs avec Acosta, je ne sais pas, n'ayant jamais vu cette production du Lac auparavant.

La production de Nureyev a plus de "rythme", les scènes s'enchaînent avec fluidité, là où la production du Royal Ballet se traîne à n'en plus finir.

Cela faisait longtemps que je n'avais pas vu un grand ballet romantique dans une production "non-Nureyevienne", et je dois dire que j'ai du mal...

[sophia]

Le Royal Opera House vient de racheter Opus Arte, la célèbre maison de production de DVD de musique classique et de ballet d'origine néerlandaise. La distribution sera désormais entièrement contrôlée par le ROH.

L'information est sur le site de Opus Arte: http://www.opusarte.com/