Le Nederlands Dans Theater au Palais Garnier, mai 2006

[Azulynn]

Un thread pour les deux programmes que va donner le Nederlands Dans Theater au Palais Garnier cette semaine.

Premier programme (NDT II-III)
Sleepless (Kylian), Postscript (Lightfoot/Leon), Birthday (Kylian)

Second programme (NDT I)
Silent screen (Lightfoot/Leon), Toss of a dice (Kylian)

De courtes descriptions des pièces sont disponibles sur le site du Nederlands Dans Theater. Quelqu'un les connaît-il ? Ces programmes valent-ils le déplacement ?

Egalement, j'ai trouvé sur Internet un extrait vidéo de Toss of a dice, sur un site canadien.

[haydn]

Merci Azulynn.


Je ne pourrai vous en dire plus sur ces pièces, mais ce sera l'occasion ou jamais de combler ces lacunes dans ma "culture chorégrahique".


Au guichet, on trouvait assez facilement des billets pour le second programme, alors que pour le premier (représentations du 9 et du 10), toutes les places correctes et pas trop chères avaient été vendues très rapidement. J'ai été moi-même un peu surpris ; je m'attendais plutôt à l'inverse, puisque le premier programme est interprété par la troupe des jeunes et par celle des danseurs "en fin de carrière", alors que le second l'est par le groupe principal.

[haydn]

Un conseil : foncez acheter les places qui restent pour demain soir, c'est absolument magnifique!

Je vous en dirai davantage un peu plus tard!

[haydn]

En attendant les commentaires, quelques souvenirs d'un des plus jolis spectacles de danse contemporaine que j'ai pu voir depuis longtemps :




Sleepless (Jiri Kylian, NDT II)

[haydn]

Postscript (Paul Lightfoot / Sol Leon, NDT II)

[haydn]

Birth-Day (Jiri Kylian, NDT I) : A ta santé, Wolfie - Amadé!

















(Vidéo projetée en même temps que le ballet)



(Vidéo projetée en même temps que le ballet)



(Vidéo projetée en même temps que le ballet)

[haydn]

Le NDT fait la couverture du FigaroScope, avec en prime une double interview (non accessible en ligne malheureusement) des chorégraphes Paul Lightfoot et Sol Leon :

[haydn]

Comme promis, je reviens en quelques mots sur le premier programme du Nedelands Dans Theater, qui nous a proposé une très belle soirée, variée, où alternaient esthétisme et humour.


La représentation s'ouvrait sur Sleepless, de Jiri Kylian, sur une musique de Dirk Haubrich, inspirée par les pièces pour Glassharmonica de Mozart. Au-delà des sonorités fascinantes de cet étrange instrument, la chorégraphie elle-même évoque, par son côté diaphane, presque immatériel, la transparence, l'insaississable magie du verre.

Les postures arachnéennes, les portés d'une incroyable légereté participent de ce raffinement extrême, et l'oeuvre de Kilyan est servie à la perfection par les "jeunes" danseurs du NDT II, qui sont de toute évidence déjà des professionnels aguerris.


On retrouve pareille adéquation entre tous les éléments du spectacle - scénographie, éclairages, musique (même si les pièces de Philipp Glass tendent parfois à confondre minimalisme et simplisme) et chorégraphie - dans l'ouvrage de Sol Leon et Paul Lightfoot, Postscript, dont c'était la première représentation en France.

Postscript est, par le choix du noir et blanc pour les décors et costumes, peut-être un discret hommage à Kylian, bien que les personnalités de Sol Leon et Paul Lightfoot s'y affirment pleinement. Plus encore que dans Sleepless, l'intérêt principal de l'oeuvre réside dans les portés, variés à l'infini et seulement encadrés de quelques pas de liaison. Se succèdent ainsi tout une série de tableaux dont la poésie est soulignée par les éclairages subtils, reproduisant chez le spectateur les états intimes, intérieurs qui ont été les stimuli des créateurs.


En contraste radical avec cette expérience introvertie, suivait Birth-Day, divertissement bondissant signé à nouveau de Jiri Kylian, et qui célébrait de manière ludique le 250ème anniversaire de la naissance de Mozart.

Les "anciens" du NDT III célébraient l'événement par un improbable banquet, dont l'invité principal était évidemment absent. L'on avait ici affaire à des performances d'acteur, plus qu'à de la danse proprement dite, et les convives commentaient par le mime un film totalement déjanté, mais qui épousait pourtant parfaitement tous les accents de la musique du Maître de Salzbourg, au travers de cinq extraits judicieusement choisis.

La farce allait assez loin, dans la mesure où, çà et là, les séquences filmées et la pantomime constituaient en elles-mêmes de joyeux détournements des oeuvres de Mozart. Ainsi, l'ouverture de l'L'Enlèvement au sérail nous montrait un bretteur velléitaire, sorte de Belmonte sénile tentant pathétiquement de reproduire les exploits de sa jeunesse qui lui avaient permis de tirer sa Constanze bien-aimée des griffes du Pacha Sélim et de son sinistre sabreur Osmin. Quant aux Noces de Figaro, c'était un peu la Folle journée qui tournait à la Cage aux folles.

Même si certains ont pu en être choqués, la grivoiserie légère et la dérision ne sont pas si éloignés de l'esprit de Mozart, tel qu'il transparait dans la correspondance - et l'oeuvre aussi parfois - du compositeur. Nombre de lettres qu'il adressait à sa soeur et confidente - sont truffées d'allusions lestes, voire scatologiques, et même si le trait est parfois forcé, le portrait que brosse Kylian du musicien autrichien est finalement assez réaliste, et constitue un hommage moins compassé à son génie que les ennuyeux discours officiels.

Zum Wohl, Herr Kapellmeister!

[haydn]

A noter que le magazine allemand Ballettanz faisait sa couverture du mois de mars dernier avec une scène tirée de Birth-Day, de Kylian :





En pages interieures, Ballettanz proposait un dossier consacré aux chorégraphies basées sur des musiques de Mozart, avec notamment un long article sur la reconstitution des Petits riens par Thierry Malandain et le Ballet Biarritz.

Autre texte fort intéressant, celui de la musicologue Sibylle Dahms, qui évoque les liens entre Mozart et le ballet : la première apparition public du jeune musicien le fut en qualité de ... danseur, lors d'un spectacle donnée en 1761 au Théâtre de l'Université de Salzbourg. Wolfie était alors âge de cinq ans! Autre contribution de Mozart au ballet - hormis les Petits riens, la grande Chaconne qui fut insérée dans Idoménée pour servie d'intermède dansé lors de la création de l'opéra à Munich en 1781, et que l'on omet systématiquement aujourd'hui.

Le fait qu'Idoménée ait comporté un ballet ne doit d'ailleurs rien au hasard. Rappelons qu'il s'agit d'une tradition typiquement française. Or le commanditaire de l'oeuvre n'était autre que Carl Theodor, le Prince électeur de Mannheim, qui venait d'accéder au trône de Bavière. Carl Theodor était un francophile passionné, qui n'avait pas hésité à faire venir à la cour de Mannheim chorégraphes (dont Noverre lui-même) et danseurs français, et il n'est guère étonnant qu'une fois installé à Munich, il ait demandé à Mozart de sacrifier à cette pratique des plus parisiennes...

[paco]

j'ai adoré !!!!

merci merci merci, Haydn et le forum, de m'avoir donné envie d'aller voir ce spectacle, au début je ne l'avais pas mis ds mes priorités, mais quelle erreur c'aurait été de le rater !

tout particulièrement Birth-Day. Rien de choquant, c'est au contraire très subtil. Voilà du vrai modernisme professionnel, autre chose que la supercherie que Bastille nous offre pendant de temps avec un Simon Boccanegra calamiteux (sorry je deviens hors sujet).

C'est une chorégraphie très construite, travaillée, pensée, fluide, amusante, captivante, bref j'ai passé un super super moment.

Heureusement qu'il y a le Ballet pour nous donner encore de bons spectacles à l'Opéra de Paris, ça compense les catastrophes lyriques... Merci Brigitte !

[sophia]

Bon, je n'irai tout de même pas jusque-là... Sachons raison garder!
Je partage néanmoins sans réserve aucune l'enthousiasme délirant de Paco et Haydn pour ce spectacle du NDT2 et 3, dont on peut simplement regretter qu'il n'ait eu droit qu'à deux représentations. Sans publicité ni battage médiatique, cette soirée a peut-être été la plus belle soirée de ballet, tout du moins l'une des plus belles, qu'il m'ait été donné de voir cette saison à l'Opéra..., et cela sans que je m'y attende vraiment. C'est peut-être ça la vraie "surprise de l'amour"!!!
Face au néant gallottien, à la méprisable fumisterie embastillée de ce Nosferatu (chacun les siennes, Paco! ) vraiment indigne des danseurs de l'Opéra (et qui m'a tellement mise en colère que j'ai préfèré ne pas en parler plus avant, désolée mais on a aussi ses limites... ), les trois ballets qui nous ont été proposés ainsi que le talent de ces excellents danseurs jeunes et vieux ont été une vraie bouffée d'air frais en ce printemps renaissant.
La première pièce signée Kylian, Sleepless, a suscité en moi, qui suis pourtant assez imperméable à l'abstraction contemporaine, des frissons face à tant de beauté. Un air de déjà-vu dans les éclairages et l'habillage de la pièce et pourtant un génie déconcertant pour échapper aux clichés par une chorégraphie unique, des portés splendides sans oublier un humour et un sens de la théâtralité qui permettent d'éviter toute lourdeur et toute prétention. Vraiment un très très grand moment qui m'a laissée proprement déconcertée.
La pièce de Paul Lightfoot et Sol Léon, si elle est peut-être un peu plus conventionnelle, n'a certainement pas à rougir face aux oeuvres du maître Kylian, à l'évidence un modèle pour ces deux chorégraphes. Et je dois dire que j'ai beaucoup aimé la musique pour piano de Phil Glass.
Birth-day enfin, interprété par les "anciens" du NDT3, joue sur un tout autre registre, celui du théâtre et de la pantomime, inséparables de l'amour que Kylian porte à la musique de Mozart. Et revoici les perruques, les poudres, les crinolines et les corsets très XVIIIème entr'aperçus à travers "le verrou" du merveilleux Il faut qu'une porte... et les si réussies Six Dances, toujours avec humour et un sens maîtrisé de la parodie. Manifestant là son goût pour le miroir, les apparences et la métamorphose, goût ô combien baroque qui nous rappelle une fois encore ses origines pragoises si prégnantes, Kylian a concocté là, loin des commémorations sinistres et empesées, le seul gâteau d'anniversaire vraiment digne de la folie mozartienne. Et si des ovations et de nombreux rappels enthousiastes (et peu courants à l'Opéra) ont salué la prestation de ces danseurs-acteurs, on ne peut tout de même s'empêcher de déplorer les quelques sifflets qui leur ont été adressés de la part de spectateurs ne supportant probablement pas de voir autre chose sur scène que des corps souples, jeunes et frais...

[sophia]

Et une fois n'est pas coutume (attention tout de même... ), Le Monde et Rosita Boisseau communient à la même passion que nous pour célèbrer le spectacle du NDT2 et 3 à l'Opéra Garnier: "Birth-Day", le vaudeville chic du Nederlands Dans Theater

[haydn]

Le deuxième programme, interprété par les danseurs du NDT I, a été à la hauteur des espérances qu'avait fait naître la première soirée donnée par la troupe néerlandaise, et Sol Leon, Paul Lightfoot et Jiri Kylian ont été ovationnés comme ils le méritaient.




Avant des commentaires plus détaillés, voici les habituels souvenirs en images :



Silent Screen (Sol Leon / Paul Lightfoot)

[haydn]

Toss of a dice (Jiri Kylian)

[haydn]

Pierre Combescot - Luc Décygnes, du Canard enchaîné, ne tarit pas d'éloges sur les deux programmes présentés par le NDT, mais semble avoir été beaucoup moins convaincu par Gallotta & Co., qui fait quasiment l'unanimité contre lui...