Soirée Robbins - Ratmansky [ONP Garnier - 19/06-07/07]

[sophia]

Soirée Robbins / Ratmansky
Dances At A Gathering / Psyché
19 juin

Dances at a Gathering est à bien des égards un ballet d'un autre temps. Ce n'est pas un reproche - venant de moi tout particulièrement (à vrai dire, ce serait même plutôt un compliment ) -, mais force est de constater que cette conversation impressionniste, qui s'étire durant plus d'une heure, sans nulle trame narrative, sans nulle progression, sans nul moment de tension, sans grand moment de virtuosité (exception faite de la partie de l'Homme en brun), et dont les interprètes en sont presque à tourner le dos aux spectateurs, est aux antipodes de ce qu'attend notre monde toujours si grave, notre monde habitué de l'instantané et de l'effet facile. Il ne raconte rien, ne délivre aucun message, n'est porteur d'aucune grande idée, ne revendique pour propos que sa légèreté et son insouciance - celle de sa jeunesse aux couleurs passées. Encore le terme conversation est-il dans le cas de ce ballet un peu trop fort. Dances at a Gathering ressemble plutôt à un babillage, voire à un cabotinage, second degré inclus. Certaines séquences, comme celles de l'Homme en brun, ont même de faux airs de répétition devant un miroir, une répétition dont nous serions comme les témoins intrusifs. A l'instar de la musique de Chopin, le ballet de Robbins ne peut que s'éprouver - par le plaisir ou par l'ennui. Rien n'étant jamais noir ou blanc, l'alternance, voire la coexistence, des deux sentiments est aussi possible. Un peu comme dans la vie, quoi...

La réussite de cette heure musicale appartient évidemment aux interprètes et à leur capacité à donner vie à ces différentes figures, à esquisser une histoire à travers elles. Sans incarnation, sans couleur si l'on peut dire, Dances at a Gathering devient vite un pensum dont on attend la fin avec impatience. Pour cette première, l'Opéra avait aligné un casting de danseurs solides et bien expérimentés. Pas de faux pas donc, mais des couleurs qui irradient plus ou moins et des jeux de séduction auxquels on se prend - pas souvent - ou pas - trop souvent. Car il ne suffit pas de dérouler un pied parfait ni d'articuler parfaitement les pas pour rendre la chose intéressante... On est surtout frappé de voir comme ce ballet sans drame devient une mise à nu de chacun, révélant les personnalités, pour le meilleur et pour le pire : le perfectionnisme radical de Ludmila Pagliero, peut-être un peu trop grave et démonstrative, à l'instar d'Amandine Albisson, laquelle peine à participer à l'alchimie du groupe, l'humour très "jeune homme" de Josua Hoffalt, en adéquation parfaite avec le style Robbins, l'élégance sérieuse de Mathieu Ganio, la bonhommie rassurante de Karl Paquette, la fraîcheur de Charline Giezendanner, le détachement aristocratique de Christophe Duquenne, lui aussi très Robbins boy.. et au milieu de tout cela, Aurélie Dupont, incarnation du "less is more" - dommage que ses moyens ne soient plus vraiment ce qu'ils étaient... Au petit jeu de la séduction, ce sont à vrai dire surtout Nolwenn Daniel, d'une légèreté délicieuse (et bien plus jeune que bien des jeunes danseuses...), et Emmanuel Thibault qui ont réussi à retenir mon attention, en donnant un vrai piment théâtral au duo qui les réunit.

Psyché est un The Dream d'aujourd'hui, une féerie du XXIème siècle, à la fois visuelle et sonore, jusque dans son côté ouvertement kitsch et paillettes, semble-t-il insupportable à certains. Personnellement, j'adore les bruits de cascade qui nous installent dans l'ambiance sylvestre dès l'entracte et cette atmosphère bleu nuit, un peu mystérieuse, qui baigne une bonne partie du ballet et s'accorde parfaitement avec la musique très mimétique de César Franck. Le ballet a malheureusement pâti (et pâtit toujours) d'un dispositif scénographique trop lourd, qui tend à étouffer la chorégraphie et les interprètes, presque mis au second plan, alors qu'ils valent bien mieux que lui. Ratmansky adore jouer avec les codes de l'histoire du ballet (et de ses propres ballets, ainsi des deux Soeurs burlesques tout droit sorties de Cendrillon), mais ici, trop d'effets superposés ou croisés tuent parfois l'effet. On a parfois du mal à circuler dans la boutique à brocantes! Un certain nombre de costumes ont toutefois été revus cette année et vont globalement dans le sens de la sobriété, qui libère la danse. On compte aussi de très jolis effets de voiles, de la blancheur et des pastels éthérés en veux-tu en voilà, utilisés de manière décalée, comme pour rappeler avec humour la féerie d'antan. La Vénus a troqué l'or pour le rouge sang et si les femmes-fleurs (charmantes) sont toujours là, les moumoutes animaux en peluche (qui ne me dérangeaient pas) ont disparu au profit d'académiques stylisés plutôt sympathiques. Côté chorégraphie, on n'est certainement pas dépaysé après le Daphnis et Chloé de Benjamin Millepied, dont Psyché a les qualités des défauts et inversement. Par-delà le thème mythologique, on reste dans une même veine stylistique (avec beaucoup plus de variété toutefois chez Ratmansky), qui travaille avec et dans la musique. Ratmansky ne construit pas tant un drame (la narration est moins lisible pour le coup que dans D&C) qu'une sorte de vague chorégraphique qui se déploie sans pause aucune, tout en ménageant des contrastes et des contrepoints. La danse ne s'arrête jamais, sans doute plus technique et virtuose que chez Millepied, mais avec ce même mélange de lyrisme et d'énergie, de poésie et d'athlétisme, d'onirisme et d'humour. Silhouette gracile et rêveuse, Laetitia Pujol semble être entrée de tout son être dans ce ballet qui lui va bien et de fait, elle joue avec beaucoup de charme et d'expressivité le jeu de la féerie. Marc Moreau est un ludion tout en légèreté qui s'accorde fort bien avec elle. Son partenariat est en très net progrès, même s'il faut bien dire par ailleurs qu'il doit lutter pas mal avec la chorégraphie et les pas de bravoure concoctés par Ratmansky. Quoi qu'il en soit, c'est une énorme chance qu'on lui donne là... et j'ai comme l'impression qu'on le verra de plus en plus. Alice Renavand est idéale dans le rôle de la Vénus rouge, à la fois cruelle et bienveillante. Ce n'est certes pas encore complètement ça, mais de manière générale, l'esprit ludique du ballet me semble mieux digéré par la compagnie qu'à la création.

Pas la soirée du siècle, mais indéniablement un programme qui se laissera revoir, surtout le second ballet, avec d'autres interprètes.

[Dimago]

Merci Gimi
Dans ma tête, j'étais resté sur une parité 9/9 pour les étoiles
J'ai la honte au front.
Pour les costumes, les explications ne nous avancent guère effectivement
De cette soirée, je garde le défilé... qui curieusement a fortement agacé mes voisins de derrière, alors que à côté et devant, les spectateurs disaient en attendant dances at... "c'est magique"

[marc]

Mercredi 25 juin, autrement dit après demain :

A 19h30, Palais Garnier, Ballet de l'Opéra de Paris pour une soirée "Robbins / Ratmansky" (que j'ai déjà vue lors d'une saison précédente et que je me régale de revoir) ; puis, à peine sorti du "Grand Opéra", direction un café muni d'un écran de télévision pour assister à un autre ballet, celui que danseront, à partir de 22h00, l'équipe de France de football avec l'équipe de football de l'Equateur. Oui, mercredi soir prochain, de 19h30 jusqu'à plus d'heure tout sera réuni pour une soirée mémorable !

[Ritournelle]

En attendant la diffusion sur Mezzo vendredi soir, l'ONP a mis en ligne un extrait de Psyché avec un pas de deux entre Laetitia Pujol et Marc Moreau, probablement capté pendant la générale.
http://www.operadeparis.fr/saison-2013-2014/ballet/robbins-ratmansky

Pour ma part, ce ballet que je découvrais m'a littéralement transportée! J'ai été surprise en bien par les deux danseurs principaux, notamment l'interprétation de Laetitia Pujol, et l'apparition d'Alice Renavand en Vénus m'a donné des frissons. Et quelle belle musique...

[doudou]

Suite au retrait de Vincent Chaillet dans NDdP, modification des distributions des 29 juin et 7 juillet.
Audric Bezard le remplace à ces deux dates et est lui même remplacé par PA Raveau en vert le 7 juillet.
https://www.operadeparis.fr/saison-2013-2014/ballet/robbins-ratmansky?genre=2

[Ornella]

Il y a aussi eu d'autres modifications puisque je devais voir Héloïse Bourdon le 4 et elle est remplacée par Muriel Zusperreguy. Et je ne devais pas voir François Alu, eh bien il semblerait qu'il remplace Daniel Stokes !

[sophia]

Roslyn Sulcas, de passage à Paris, a fait le périlleux voyage du Théâtre de la Ville, où elle a vu Palermo Palermo de Pina Bausch, à l'Opéra de Paris, où elle a assisté au double bill des deux R. C'est essentiellement Psyché qui semble avoir retenu son attention, le ballet de Robbins étant expédié en une ligne cinglante ("Jerome Robbins’s “Dances at a Gathering” performed with some inconsistent flair and patchy partnering on Friday").

Amid Strikes in Paris, Somber Bausch and a Hopeful ‘Psyché’

[haydn]

Pour la représentation du 04/07, il y aura quelques changements dans la distribution de Dances at a Gathering. Mathieu Ganio remplacera Josua Hoffalt en Brun, et Josua Hoffalt remplacera lui-même Pierre-Arthur Raveau en vert. Chez les dames, c'est Muriel Zusperreguy qui passe en vert et se substitue à Héloïse Bourdon. L'affiche de Psyché reste quant à elle inchangée.


Dances at a Gathering
Rose : Albisson
Violette : Hecquet
Jaune : Bourdon
Verte : Zusperreguy
Bleue : Lévy
Brun : Ganio
Mauve : Bezard
Vert : Hoffalt
Brique : Alu
Bleu : Paul

Psyché
Psyché : Giezendanner
Eros : Raveau
Venus : Laffon
Deux soeurs : Robert + Granier

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[Ornella]

Et donc, plus de François Alu en rouge brique ?

[haydn]

Pardon je corrige c'est bien F. Alu en Brique, pas Daniel Stokes (qui sera sur la dernière, le 16).

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[Ornella]

Ce sera la première fois que Muriel Zusperreguy interprète la danseuse en vert ?

[sophia]

C'est une révolution - ou un miracle - à chacun de choisir selon ses options philosophiques! L'Opéra nous sort une page spéciale sur Diana Vichneva et Evan McKie, les deux danseurs invités de la soirée des 2R.

http://www.operadeparis.fr/blogopera/diana-vishneva-et-evan-mckie

[Ornella]

Représentation de ce soir annulée...

Je suis ravie d'avoir fait le voyage exprès.

L'Opéra de Paris, le seul endroit où le préavis de grève est de 6h

[Pink Lady]

Je pense que les amoureux de Pina Bausch qui étaient parvenus à obtenir des places et avaient fait le déplacement pour la matinée de dimanche dernier au Théâtre de la Ville ont dû ressentir la même frustration... sans parler de tous ceux qui ont fait le déplacement à Montpellier ou Avignon cette année.

[haydn]

Pas un mot sur le compte Twitter de l'ONP, juste une annonce laconique sur le site :