Dansomanie Index du Forum
Connexion S'enregistrer FAQ Liste des Membres Rechercher Dansomanie Index du Forum

Danse baroque / Danses anciennes
Aller à la page Précédente  1, 2, 3, 4  Suivante
 
Poster un nouveau sujet   Répondre au sujet    Dansomanie Index du Forum -> Tout sur la danse
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant  
Auteur Message
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Ven Aoû 27, 2010 2:20 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Métamorphose(s)
Compagnie L'Eventail
Festival de Sablé-sur-Sarthe
24 août 2010


On se souvient du Voyage en Europe, de Marie-Geneviève Massé, qui avait clos dans le parc du château le dernier Festival de Sablé... Fil conducteur imaginaire entre deux éditions, le « voyage en Europe » se retrouve à sa manière au coeur de Métamorphose(s), création présentée par la troupe de l'Eventail pour l'ouverture du 32ème Festival, dédiée comme de coutume à la « belle danse ».

Métamorphose(s) s'offre à bien des égards comme une oeuvre de synthèse pour sa créatrice, Marie-Geneviève Massé. Fruit de rencontres personnelles et d'une réflexion engagée il y a plusieurs années, elle cristallise, de l'aveu même de la chorégraphe, tous ses rêves d'enfant et d'adulte. On y rencontre ainsi, non seulement les danses savantes - ces danses de cour que l'on a coutume de désigner sous l'épithète commode de « baroque » -, mais aussi les danses populaires, appréhendées au travers d'un prisme musical et chorégraphique européen. A la diversité des danses « anciennes », réinventées par une mémoire d'aujourd'hui et volontiers associées ici aux arts du cirque, se superpose naturellement celle des musiques, qui regroupent aussi bien des airs de Telemann et de Vivaldi que des musiques puisées dans le répertoire traditionnel de France, d'Irlande, des pays d'Europe du Nord et de l'Est. Signalons que ces choix musicaux éclectiques, Marie-Geneviève Massé les a effectués en collaboration avec les Musiciens de Saint-Julien, un jeune ensemble dirigé par François Lazarevitch, formé de cinq instrumentistes et d'une chanteuse, mis en scène aux côtés des danseurs durant tout le spectacle et partie intégrante de celui-ci.

A l'image de son titre, aux résonances profondément baroques, les dix tableaux qui composent le ballet disent la transformation de la danse populaire en danse savante - leur imbrication complexe aussi. Métamorphose(s) s'ouvre ainsi sur un cercle symbolique, celui de la ronde paysanne, bientôt suivie par d'étranges danses de corde, aussi éloignées que possible de l'air de cour, mais au fond, la combinaison des différentes scènes chorégraphiques - leur succession aussi - ressemble davantage à un rêve éclaté qui se déploierait dans le temps et dans l'espace, à une suite mouvante d'images fantasmées, régie par le principe d'une association libre et subjective, qu'à une recomposition rétrospective et raisonnée d'une hypothétique histoire de la danse, qui nous conduirait – par paliers successifs - d'un village à une cour royale, de la simplicité archaïque d'une danse paysanne au paroxysme de sophistication de la danse louis-quatorzienne.

On a beau glisser imperceptiblement d'un style de danse à un autre, y compris au sein d'un même tableau, au point de les voir quasiment se dissoudre l'un dans l'autre, c'est malgré tout la danse populaire qui semble apparaître davantage, par sa richesse de couleurs et de sons et les possibles qu'elle ouvre à la créativité chorégraphique contemporaine, comme la marque visuelle et stylistique du ballet que la mémoire retient. Au fil des métamorphoses chorégraphiques que dessine l'ouvrage, cette tonalité « folklorique », disséminée en diverses contrées, semble en effet s'imposer au détriment de la pureté du langage académique décliné dans les danses de cour, comme si celles-ci avaient besoin d'un certain apparat formel pour exister pleinement, là où le présent ballet préfère opter pour un certain dépouillement scénographique et des costumes certes historicisants, mais essentiellement symboliques. Si l'on retient plus particulièrement, au sein de cet ensemble, la très sonore et très spectaculaire danse irlandaise, avec ses étonnantes claquettes déployées comme un jeu sur un plancher improvisé, le recours fréquent, dans un espace ouvert et non contraint, à des accessoires empruntés au monde du cirque, comme les cordes, les ballons ou les trapèzes, voire les marionnettes, contribue sans doute aussi à suggérer en filigrane cette emprise plus générale du populaire sur le noble, du jeu sur le cérémonial.

Paradoxalement, la plus belle réussite du spectacle réside dans le fascinant tableau central, « Reflets », écrit dans un langage délibérément académique, décliné dans un clair-obscur très travaillé, en rupture avec la lumière vive et colorée qui nimbe la plupart des tableaux. Les éléments scénographiques – une succession de miroirs alignés, identiques et mobiles – parviennent ici à faire sens, sachant aller au-delà de l'effet purement décoratif qui guette parfois ailleurs, notamment dans le recours passablement régressif aux ballons, ou encore, dans le leitmotiv insistant de la poupée animée, qui ouvre et ferme le ballet, non sans longueurs ni mièvrerie. Cette scène des miroirs est du reste sublimée par la présence d'une formidable soliste, Emilie Bregougnon, rejointe ensuite par le « corps de ballet », dans un effet spéculaire de déformation et de démultiplication des êtres et des corps. Si l'ensemble de la troupe de l'Eventail, parvenue aujourd'hui à un excellent niveau, possède une harmonie et une précision technique tout à fait digne d'éloges, il y a là une personnalité scénique qui mérite d'être plus particulièrement mentionnée, autant pour son naturel très théâtral, sa générosité bondissante, que pour sa virtuosité technique proprement jubilatoire dans le déploiement de la grammaire baroque. Un phénomène rare, il faut bien le dire, dans l'univers quelque peu figé des danses anciennes, où la pureté de l'exécution n'est pas toujours rehaussée par une interprétation apte à toucher. De ce point de vue, l'expression faciale, et plus largement le jeu des regards entre les danseurs et avec le public, manquent de cette émotion ou de cette chaleur nécessaires pour faire vivre un spectacle dans le coeur et la mémoire du spectateur, au-delà de la perfection intrinsèque des tableaux qui le composent.

En marge de la question de l'interprétation, le ballet mérite également d'être retravaillé dans ses liaisons entre les différents tableaux. On peut regretter que la mise en scène, très étudiée par ailleurs, souvent ingénieuse, et très peu avare en accessoires de toutes sortes, n'ait pas su construire de véritables ponts entre ceux-ci, transformant pour le coup les « noirs » dans lesquels se retrouve plongée la scène dans ces moments-là en véritables « blancs » pour le spectateur. Le ballet semble alors se contenter de juxtaposer des images, figées alors par cette "extinction des feux", plutôt que d'en approfondir la dimension kaléidoscopique et mouvante, ainsi que le suggèrent le titre et l'esprit de l'ouvrage. Cette légère impression d'inachevé ne vient cependant pas ternir la sensation de plaisir que ce spectacle très poétique procure dans son ensemble.


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Dim Aoû 29, 2010 12:12 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Rencontre avec Bruna Gondoni, danseuse, chorégraphe et professeur spécialisée dans les danses de la Renaissance italienne


En parallèle au Festival de Sablé, dédié au répertoire baroque, se déroule chaque année l'Académie Internationale de Danses et Musiques Anciennes de Sablé. Celle-ci accueille durant dix jours chanteurs, musiciens et danseurs venus du monde entier pour des stages de formation et de perfectionnement dans la discipline qui leur est propre, mais aussi dans les disciplines annexes. La spécificité de l'enseignement de cette Académie s'est en effet développée autour de la relation, caractéristique du monde baroque, entre la musique et la danse, souvent perdue aujourd'hui. A côté des traditionnels ateliers instrumentaux ou de chant sont ainsi proposés un cours de gestuelle et de déclamation baroques, ainsi que divers enseignements chorégraphiques autour du répertoire spécifiquement baroque (XVIIème siècle) et celui de la Renaissance italienne (XVème et XVIème siècles).

Bruna Gondoni est danseuse, chorégraphe, et à Sablé, elle enseigne les danses de la Renaissance italienne – la Renaissance française, avec notamment son fameux « branle », étant encore une autre affaire. Dans le continent méconnu et souvent peu considéré des « danses anciennes », nul doute que la Renaissance fait figure de monde encore plus marginal et lointain. Pourtant, les danses qu'elle transmet possèdent non seulement de quoi séduire un oeil d'esthète contemporain, mais permettent aussi de lui faire appréhender au plus près – et de manière assez troublante, il faut bien le dire - ce qui fait l'essence de la danse dite « classique », souvent réduite en France au seul académisme versaillais, dont le langage n'a pourtant été structuré et théorisé qu'au XVIIème siècle.

Dans son cours, qui débute par un lent échauffement comportant quelques postures de yoga, on entend des mots charmants tels que « basse-danse », « gaillarde », « canarie », « pavane », « spagnoleta »..., autant de noms de danses oubliées, que l'on ne connaît plus guère aujourd'hui que par la musique. La grammaire des pas, si lointaine et si proche à la fois, est entièrement déclinée en italien. La « basse-danse », une danse apparue au début du XVème siècle, longuement abordée dans le cours du matin, est la chose à la fois la plus simple et la plus noble qui soit : une marche lente, solennelle et majestueuse, qui esquisse ce qui deviendra le « relevé ». Les pas de base, toujours identiques, peuvent être combinés à l'infini selon différentes mesures. Peu à peu, les danses de cour se complexifient, s'ornent de pas virtuoses, s'imprègnent d'influences espagnoles, avec notamment des frappés et des battus, pour apparaître au fond bien différentes au XVIème siècle de ce qu'elles étaient au siècle précédent.

Mais laissons Bruna Gondoni, personnalité lumineuse à l'image de l'esprit de la Renaissance qu'elle transmet à travers ses danses, nous en dire plus là-dessus...



Quelle est la spécificité de votre enseignement des danses anciennes?

J'enseigne spécifiquement les danses de la Renaissance italienne, c'est-à-dire les danses des XVème (Quattrocento) et XVIème (Cinquecento) siècles. Les danses du XVème et celles du XVIème n'ont d'ailleurs rien à voir entre elles : elles reposent sur des conceptions, des rythmes et des pas différents. Ce qu'il faut savoir, c'est tout d'abord que ces danses sont écrites : c'est à ce moment-là que débute l'histoire écrite de la danse. D'autre part, ce sont des danses de cour, exécutées par les nobles, à distinguer donc des danses populaires qui ne sont pas écrites. Ces danses sont nées et se sont développées dans les différentes cours italiennes : Florence, Milan, Rome, Ferrare, Mantoue...

Il n'y a pas encore de danseurs professionnels en ce temps-là?

Vers la fin du XVIème siècle, on peut dire que des danseurs professionnels commencent vraiment à apparaître. Dans les cours italiennes cependant, il y a toujours eu, au moins dès le XVème siècle, un maître de danse capable d'exécuter des choses plus difficiles, comme par exemple la moresque (moresca), une danse qui comportait des mouvements complexes que tous les nobles ne pouvaient pas faire. Mais normalement, ces danses sont quand même écrites pour pouvoir être dansées par les nobles. On dit à l'époque en italien que ces danses sont « dignes d'être dansées par les dames de la cour, et non par la plèbe » – degno d'essere ballate da nobile dame, e non plebei.

Quelles sont les sources qui nous permettent de connaître ces danses?

Les premiers danseurs et maîtres de danse, également auteurs de traités, sont Domenico da Piacenza [auteur de De arte saltandi et choreas ducendi, ndr.], qui a vécu à cheval entre le XIVème siècle et le XVème siècle, et son élève, Guglielmo Ebreo [auteur de De pratica seu arte tripudii vulgare opusculum, ndr.], dont le nom veut dire « Juif », qui, lui, a vécu un peu plus tard, au XVème siècle. Ce sont les maîtres les plus importants de cette période. Avant eux, la transmission des danses se faisait de manière exclusivement orale.

Ces maîtres de danse ont rédigé des traités dans lesquels on trouve à la fois des règles et la manière d'exécuter les pas. Au nombre des règles, on compte notamment la mémoire (memoria) [la faculté de se souvenir des pas appris, ndr.], la mesure (misura) [la capacité de maintenir le tempo, ndr.], la manière (maniera) [la capacité de coordonner les mouvements des bras et ceux du reste du corps, ndr.], l'air (aire) [la présentation ainsi que la présence du danseur, ndr.], l'espace (compartimento di terreno) [la capacité d'évoluer dans l'espace, ndr.], et la diversité des choses (diversita di cose) ; pour cette dernière règle, il s'agit en quelque sorte d'éviter la monotonie dans la danse. Pour l'exécution des pas, il y a deux principes de base : onde giare et ombre giare. Au XVème siècle, on écrit ainsi que le pas doit être comme une vague, une onde (onde giare) : c'est en fait l'idée de descendre et de monter, de monter et de descendre - toujours. Il doit également comporter une opposition avec les épaules (ombre giare), qu'on appelle aussi contraposto : c'est tout simplement l'idée de l'épaulement – autrement dit, marcher en faisant de l'ombre.

Ces traités sont également chorégraphiques : ils décrivent des enchaînements de pas, en utilisant un vocabulaire spécifique italien. Pour la basse-danse, par exemple, cela donne : passo semplice (un pas simple), passo doppio (un double), continenza (la contenance), ripresa (la reprise), riverenza (la révérence).

Le vocabulaire de la danse renaissante est très différent de celui de la danse baroque qui deviendra plus tard celui de la danse classique. Est-ce qu'il existe des pas équivalents au-delà de la terminologie différente?

Oui, bien sûr. Par exemple au XVIème siècle, on a quelque chose qui s'appelle seguito finto. Seguito, c'est un pas, qui comporte ici trois appuis, finto, c'est-à-dire feint, parce qu'on n'avance pas dans le mouvement, on reste sur place, et cela deviendra plus tard l'emboîté... ou bien le pas de bourrée.

Ce qui frappe dans ces danses, c'est qu'elles semblent toujours être « en-dedans », contrairement aux danses baroques...

En effet, il n'y a pas de recherche spécifique d'une ouverture au niveau de la position des pieds. L'en-dehors des pieds, cela viendra plus tard, sous Louis XIV. Il y a au moins une raison pratique à cela. A la Renaissance, le public est partout, pas seulement face aux danseurs. Par conséquent, la danse doit pouvoir se développer dans toutes les directions, être visible de partout, même s'il arrive qu'elle comporte des moments d'arrêt devant le roi ou devant un personnage noble quelconque, auquel on souhaite s'adresser en particulier. On danse alors dans des salles, dans des salons, pas dans des théâtres à proprement parler. La danse de la Renaissance développe bien sûr parfois de petits moments de théâtralité, mais l'opéra n'existe pas encore comme un genre à part entière. L'amorce se fait surtout avec Monteverdi.

Quelles fonctions revêt la danse à la Renaissance? A-t-elle seulement une vocation festive?

Non, je crois qu'on danse d'abord pour exposer sa noblesse, en montrant une certaine posture et en développant une certaine manière de bouger. On danse aussi pour affirmer son pouvoir. Détail important, les hommes dansent en armes, l'épée au côté. Ensuite, à la Renaissance, et plus particulièrement au XVème siècle, on considère qu'il existe une géométrie propre à la danse, miroir de la géométrie de l'âme, qu'il s'agit de mettre en valeur par le mouvement. En fait, il faut toujours revenir à la philosophie du temps. Cette époque est celle qui a vu à Florence le développement de la pensée de Platon, sous la forme du néo-platonisme. Cette pensée philosophique se doit d'être reflétée partout, et notamment dans l'art de la danse. La danse, par les dessins géométriques qu'elle construit, doit permettre à l'homme de la Renaissance de se rapprocher des idées, des archétypes, c'est-à-dire de la forme de tout ce qui existe dans l'univers : le carré, le triangle, les quatre éléments, etc... Il s'agit en réalité de prendre possession de l'univers par la danse – et par un ancrage précis dans le sol. De ce fait, la danse du XVème siècle a une fonction véritablement cosmogonique.

Est-ce qu'on cherche à traduire une émotion par le biais de la danse ou bien est-ce là une notion moderne, voire contemporaine?

La basse-danse, qui est une danse du XVème siècle, est à mon avis d'essence plus abstraite. Il s'agit d'exposer la géométrie de la danse, plutôt que d'exprimer des humeurs ou des émotions. Dans les danses du XVIème siècle, la perspective est déjà différente. La danse s'extériorise davantage et se complexifie sur le plan technique. On cherche à montrer sa virtuosité, notamment dans le travail des pieds, et sans que cet aspect disparaisse tout à fait, on est un peu moins dans la recherche de la perfection géométrique. La canarie, qui est une danse d'origine espagnole, comportant notamment des claquements de pieds, est une danse de couple qui exprime la séduction. La gaillarde, comme son nom l'indique, est une danse gaie et joyeuse. Sans pour autant parler de danse de déploration, la pavane, qui se présente comme une promenade, est une danse plus ancrée dans le sol, plus contenue, plus posée, plus grave aussi.

Du XVème au XVIème, qu'est-ce qui détermine les évolutions de la danse?

Je crois qu'il faut toujours penser aux costumes d'une époque, en ce qu'ils déterminent aussi la forme des danses. Au XVème siècle, les femmes portent des robes marquées au niveau de la poitrine, qui ne montrent donc pas la taille. Ce sont alors surtout les épaules qui apparaissent, le reste du corps est en fait dissimulé par l'ampleur du vêtement. Plus tard, la forme des robes change : en révélant la taille, on donne aux femmes la possibilité de montrer autre chose, de développer d'autres mouvements, notamment au niveau du dos, et au fond de bouger davantage.

Comment se fait le lien entre les danses de la Renaissance italienne et le baroque français?

A la même époque, il existait déjà des danses françaises, comme le branle, qu'a recueillies Thoinot Arbeau [dans l'Orchésographie, traité de danse publié en 1589 qui répertorie toutes les danses pratiquées au XVIème siècle, ndr.]. Les danses italiennes sont introduites en France par Catherine de Médicis et les maîtres de ballet italiens qui l'accompagnent, et c'est à partir de la France que la danse noble se développe ensuite avec la danse académique. Le mouvement correspond en fait à celui d'une professionnalisation de plus en plus grande de la danse engagée au fil du temps. Au XVème siècle, le maître de ballet se rend à la cour, au XVIème siècle, il a son école, que les nobles se mettent à fréquenter pour apprendre à danser, et au XVIIème siècle, Louis XIV fonde l'Académie Royale de Musique et de Danse. On trouve alors des chorégraphies écrites par des maîtres de ballet pour des danseurs en particulier. Cela signifie qu'il y a alors des danseurs qu'on peut qualifier de professionnels.

Revenons à aujourd'hui... Comment s'est passée la redécouverte de ce répertoire chorégraphique? Quelle place en particulier tient la Renaissance dans l'intérêt plus général porté aux musiques et aux danses anciennes?

Je pense qu'il y a toujours eu plus ou moins des recherches, et ce, à toutes les époques. Mais le mouvement qui a véritablement cherché à connaître et à approfondir ce qu'il pouvait y avoir au-delà de Bach ou de Beethoven, n'a que trente ou quarante ans. Concernant les danses de la Renaissance en particulier, il existe quelques groupes, qui pratiquent d'ailleurs surtout les danses françaises. Ils organisent des fêtes, en l'occurrence des bals, de temps en temps, mais cela reste essentiellement un monde d'amateurs, et c'est vrai aussi pour la recherche. Moi-même quand je danse, je ne me trouve pas au centre d'un spectacle, je participe en tant que danseuse à un concert ou à un festival de musique ancienne [Lors du Festival de Sablé en 2009, Bruna Gondoni était apparue pour une danse aux côtés de Marco Bendoni dans la Rappresentatione di Anima et di Corpo d'Emilio de Cavalieri, ndr.]. Mais de toute façon, il faut savoir qu'à la Renaissance, la danse n'était jamais isolée des autres arts. Au sein du spectacle, on pratiquait l'harmonie des arts.

Quelle a été votre parcours de danseuse et comment est né votre intérêt pour les danses de la Renaissance?

J'ai été formée à la danse à Florence. Comme tout le monde, j'ai commencé par la danse classique, même si je n'en ai pas fait beaucoup. J'ai également dansé pendant quatre ans dans une compagnie de jazz. Par la suite, j'ai été amenée à rencontrer Andrea Francalanci, un grand chercheur, connu internationalement, qui est décédé en 1994. Cet homme n'était pas danseur, il jouait de la flûte, et surtout, il s'intéressait de très près aux danses de la Renaissance. C'est lui qui m'a fait découvrir toutes ces danses et tous les traités de cette époque. Il a notamment enseigné à la Sorbonne l'histoire des danses de la Renaissance. Il a travaillé également beaucoup avec Francine Lancelot. J'ai moi-même fait un peu de baroque et dansé au sein de sa troupe, Ris et Danceries, mais pas très longtemps. Andrea Francalanci a par ailleurs fondé une compagnie de danse [Il Ballarino, ndr.], que je dirige depuis sa mort. Aujourd'hui, je m'efforce de poursuivre son travail en tant que danseuse et chorégraphe. Je donne des cours et je dirige des stages en France, en Pologne, en Angleterre... Il faut dire aussi que nous sommes très peu dans ce domaine à travers le monde. Je considère que j'ai beaucoup de chance de monter sur scène et de pouvoir montrer ces danses.

Qu'est-ce qui vous a attirée plus particulièrement dans ces danses oubliées?

La noblesse. J'ai grandi à Florence et j'ai aussi étudié la sculpture à l'Académie des Beaux-Arts de Florence. Quand j'ai découvert ce répertoire, j'ai compris que c'était là mon chemin et c'est celui que j'ai pris. Ces danses de la Renaissance, c'était l'air que je respirais depuis toujours. Cela résonnait – et cela résonne - simplement en moi. Il y avait la danse bien sûr, mais aussi le costume que l'on revêtait pour danser. J'avais ainsi l'impression de retrouver quelque chose que j'avais toujours connu. C'était soudain comme rendre vivant un tableau de Botticelli.


Interview réalisée à Sablé-sur-Sarthe le 25 août 2010.




Dernière édition par sophia le Jeu Sep 02, 2010 11:48 am; édité 1 fois
Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Lun Aoû 30, 2010 8:48 am    Sujet du message: Répondre en citant

Je signale que Métamorphose(s), de Marie-Geneviève Massé, sera représenté (accompagné par les Musiciens de St Julien, de François Lazarevitch) :
- le 13 septembre 2010 à Biarritz dans le cadre du Festival le Temps d'Aimer,
- le 25 janvier 2011 au Théâtre de Poissy.


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Alain



Inscrit le: 25 Déc 2008
Messages: 161

MessagePosté le: Jeu Sep 02, 2010 10:56 am    Sujet du message: Répondre en citant

Merci Sophia pour toutes ces informations et commentaires de spectacle... fort intéressants.
Je me permets juste une remarque quant au nom de famille de Bruna qui est Gondoni me semble-t-il et non Gandoni.



_________________
"Toute oeuvre est morte quand l'amour s'en retire." André Malraux
Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Jeu Sep 02, 2010 11:49 am    Sujet du message: Répondre en citant

Oui, pardon... Embarassed Embarassed Embarassed C'est corrigé.


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
haydn
Site Admin


Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26512

MessagePosté le: Lun Sep 06, 2010 3:47 pm    Sujet du message: Répondre en citant

L'interview de Bruna Gondoni est en ligne sur le site de Dansomanie :




25 août 2010 : rencontre avec Bruna Gondoni, danseuse, chorégraphe et professeur spécialisée dans les danses de la Renaissance italienne.


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
haydn
Site Admin


Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26512

MessagePosté le: Lun Sep 06, 2010 7:29 pm    Sujet du message: Répondre en citant

La critique du spectacle Métamorphose(s) est également en ligne. Les photos sont celles fournies par la Cie L'Eventail :




24 août 2010 : Métamorphose(s) par la Compagnie l'Eventail (Marie-Geneviève Massé).


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Mar Sep 07, 2010 8:23 am    Sujet du message: Répondre en citant

Il me semble que les photos ne donnent pas une idée très exacte du spectacle... Rolling Eyes


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
haydn
Site Admin


Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26512

MessagePosté le: Ven Sep 10, 2010 11:07 am    Sujet du message: Répondre en citant

Pour celles et ceux qui voudraient se lancer...



Citation:
La rentrée de Fêtes Galantes et Béatrice Massin

Un moment de rencontre et de réflexion passionnant :


20 au 24 septembre SEMINAIRE DE L'ATELIER BAROQUE en partenariat avec la Médiathèque d'Alfortville

Un séminaire qui s'adresse à tous les curieux : danseurs, amateurs, chercheurs, comédiens, musiciens, enseignants, étudiants, voire passants….

Cette année on s'interrogera sur : « Ces fous de chorégraphes ».
A partir du questionnement historique de la naissance du métier de chorégraphe, le séminaire cherchera toutes les orientations que peuvent prendre ce métier. Comment fonctionne un chorégraphe quand il travaille au théâtre (dès Beauchamp avec Molière), avec des metteurs en scène de cinéma, d'opéra … ou quand il lance des propositions insolites (Luc Petton et ses oiseaux, Daniel Larrieu dans une piscine, Kitsou Dubois et l'apesanteur…) ?

Un joli nombre de participants, fous ou non, chorégraphes ou non, en débattrons. Fatou Traoré et le cirque, Nathalie Lecomte, historienne et chercheuse, Kitsou Dubois et l'apesanteur, Dominique Brun et son travail sur le Sacre pour le film « Coco et Igor », Dominique Rebaud et Zoopsie Comedi, d'ailleurs qu'est ce qu'une comédie musicale ?, Alain Perroux « Comédie musicale mode d'emploi », Luc Petton et ses oiseaux, Nathalie Pernette et la musique d'Opéra, Lia Rodrigues et son travail dans les favelas, Qu'est-ce qu'une compagnie militante ?, Béatrice Massin, film et opéra (Le Roi danse, Atys)….

Ateliers, projections….



Informations pratiques : Compagnie Fêtes Galantes – Atelier baroque

2bis rue des Camélias – 94140 Alfortville

Contact : 01 43 96 22 23 – atelier.baroque@wanadoo.fr

Participation : tarif normal : 100 €, étudiant : 70 €


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
haydn
Site Admin


Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26512

MessagePosté le: Ven Jan 14, 2011 12:44 pm    Sujet du message: Répondre en citant





Citation:
Béatrice Massin / Compagnie Fêtes galantes




La Belle Dame

DISTRIBUTION

Chorégraphie :

Béatrice Massin

Recréation de chorégraphies de Francine Lancelot

La Gavotte et ses doubles (extraite de la Sarabande pour Jean-Philippe)
Les Caractères de la danse (extraits de Bal à la cour de Louis XIV)
Raoul Auger Feuillet & Louis-Guillaume Pécour :
Choix de danses de bal & de théâtre publiées entre 1700 & 1712

Musique :

- Jean-Baptiste Lully

- Jean-Philippe Rameau

- Jean-Ferry Rebel


Danseurs :

- Danseurs de la compagnie Fêtes galantes :
- Bruno Benne
- Sarah Berreby
- Laura Brembilla
- Laurent Crespon
- Adeline Lerme

Avec la participation de Sylvain Boruel du Ballet du Rhin

Musiciens :

- Florence Malgoire & Tami Troman : violons
- Charles Limouse : flûte
- Guido Balestracci : viole de gambe
- Blandine Rannou : clavecin
- Marie-Ange Petit : percussions

Lumières : Evelyne Rubert
Régie costumes : Marie-Claude Garcin


" La Belle Dame scelle les retrouvailles de Béatrice Massin avec le répertoire des danses baroques. Ce répertoire, la langue commune des interprètes de la compagnie, doit ici se révéler sous un nouveau jour. Eloignons nous de la « sacralisation historique » et repartons ensemble vers le plaisir de la danse. Allons chercher les touches d’humour, redonnons un caractère de gaîté à toutes ces danses, plus belles les une que les autres. Amusons nous avec ce que nous aimons le plus. Francine Lancelot avec ses grands éclats de rire était la première à savoir trouver dans ces danses le goût essentiel de la surprise.

Danseuse, chorégraphe, pédagogue et chercheuse, Francine Lancelot a joué un rôle majeur dans la redécouverte en France de la « belle danse » du XVIIe siècle. Ce spectacle évoque son œuvre essentielle dans l’histoire de la danse. Il invite à cheminer parmi certaines de ses chorégraphies (La Gavotte et ses doubles, extraite de La Sarabande pour Jean-Philippe ou Les Caractères de la danse, extraits de Bal à la cour), à découvrir le répertoire qu’elle admirait tant : danses de bal (Le Passepied de Pécour, La Matelotte de Feuillet...) ou danses de théâtre (La Passacaille d’Armide de Pécour).

Animée par les costumes de Cauchetier, La Belle Dame fait donc revivre la personnalité pétillante de Francine Lancelot, son rire, son plaisir à danser, sa bonne humeur qui illuminait son enseignement, son appétit incessant de découverte. Avec elle le savoir était toujours une matière en question, rien n’était certitude et ce sont ses interrogations incessantes qui ont donné à Béatrice Massin le goût de la matière baroque et de ses questionnements."


Infos : service de presse


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Ven Jan 14, 2011 1:03 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Il y aura aussi la recréation d'Atys en mai prochain, à l'Opéra-Comique.

http://www.opera-comique.com/fr/atys/atys.html


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
haydn
Site Admin


Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26512

MessagePosté le: Lun Avr 18, 2011 11:04 am    Sujet du message: Répondre en citant




Béatrice Massin / Compagnie Fêtes galantes
Atys et La belle Dame


Béatrice Massin remonte les ballets d’Atys pour sa reprise
à l’Opéra Comique du 12 au 21 mai 2011.

En 1986, William Christie, Jean-Marie Villegier, Patrice Cauchetier, Francine Lancelot révèlent au public Atys, opéra de Lully datant de 1676. Un quart de siècle après, la même équipe se reforme. Béatrice Massin qui était alors l’assistante de Francine Lancelot, décédée en 2003, assurera la partie chorégraphique du spectacle

Atys sera ensuite donné pour 4 représentations au Théâtre de Caen (29 mai au 3 juin), 3 au Grand Théâtre de Bordeaux (16 au 19 juin), 3 à l’Opéra Royal du Château de Versailles et 5 à la Brooklyn Academy of Arts (BAM) de New-York du 18 au 24 septembre 2011.


http://www.opera-comique.com/fr/atys/atys.html





Et au même moment, Béatrice Massin a voulu aussi monter un spectacle hommage à Francine Lancelot,
La Belle Dame, crée au CND en février dernier
et qui sera donné dans les décors d’Atys, le 17 mai à 14h30 et 20h à l’Opéra Comique



La Belle Dame

Chorégraphie : Béatrice Massin

Chaconne de Phaëton pour femme – Lully – Pécour
Passepied – Anonyme – Pécour
Matelote d’Alcione pour couple – Marin Marais – Feuillet
La Lorraine Rigaudon de Provence - Anonyme –Balon
Sarabande de Tancrède – Campra – Pécour
La Gavotte et ses doubles – Rameau – Francine Lancelot
La Passacaille - Armide – Lully – Pécour
Les Contrefaiseurs – Furstemberg c/o Philidor – Pécour
Entrée des Divinités infernales – Persée Lully – Pécour
Gigue - Alcide – Marin Marais – Pécour
Chaconne de Phaëton pour homme – Lully – Pécour
Gavotte - Atys – Lully – Pécour
La Matelotte - Solo pour homme– Alcione - Marin Marais – Feuillet
Musette de Callirhoé – Destouches – Pécour
Passacaille de Persée – Lully – Pécour
Chaconne d’Arlequin – Lully – Mr de la Montagne
Les Caractères de la Danse – Rebel – Francine Lancelot


http://www.opera-comique.com/fr/atys/la-belle-dame.html






En prélude, le 21 avril au CND à Pantin
Béatrice Massin donnera une conférence dansée à 19h sur
Les 25 ans d’Atys – Autour d’une nouvelle reprise
avec les danseurs de la compagnie Fêtes galantes :
Bruno Benne, Sarah Berreby, David Berring, Laura Brembilla, Olivier Collin,
Estelle Corbières, Laurent Crespon, Claire Laureau, Adeline Lerme, Akiko Veaux,
et Gil Isoart de l’Opéra national de Paris.
suivie d’une projection, rencontre à 20h30 sur Francine Lancelot


http://www.cnd.fr/agenda/214446/les-25-ans-dune-nouvelle-reprise/


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
haydn
Site Admin


Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26512

MessagePosté le: Ven Avr 22, 2011 6:08 pm    Sujet du message: Répondre en citant

doudou a écrit:
Gil Isoart assurera la partie soliste à l'Opéra Comique dans la reprise d'Atys de Lully prévue en mai.

Site de l'Opéra Comique.


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Mar Mai 03, 2011 7:35 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Atys sera retransmis le 21 mai à 19h30 sur Mezzo en direct de l'Opéra Comique.


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Sam Mai 21, 2011 5:47 pm    Sujet du message: Répondre en citant

La Belle Dame
Hommage à Francine Lancelot
Paris, Opéra-Comique
17 mai 2011


Programmé en marge des représentations d'Atys, l'hommage à la chorégraphe Francine Lancelot, La Belle Dame, fait a priori un peu figure de lot de consolation pour ceux qui n'ont pas réussi à en être - de la recréation de l'opéra-ballet de Lully dans sa version de 1987 ou de l'événement culturo-mondain de ce printemps parisien qu'il constitue incidemment. Pour ce bref hommage d'une heure, la salle de l'Opéra-Comique est loin d'être pleine, on a convoqué les scolaires survoltés pour occuper le poulailler (on avait pourtant cru comprendre que la version « jeune public » - avec sous-titres explicatifs? - c'était pour la matinée...), et malgré tout, l'on sent l'enthousiasme du public, composé principalement du petit monde des afficionados de la danse baroque, un brin forcé dans ses bravos nostalgiques.

Faut-il le rappeler, Francine Lancelot, décédée en 2003, fut, dès la fin des années 70, la grande pionnière - en France tout au moins - de la redécouverte de la « belle danse », en accord avec un vaste mouvement qui affectait parallèlement l'interprétation musicale. Exploratrice d'un répertoire chorégraphique oublié et gommé littéralement par le romantisme, celui des danses de cour des XVIIème et XVIIIème siècles, Francine Lancelot créa également Ris et Danceries, compagnie qui s'occupa de faire revivre, par divers biais théâtraux, la langue baroque sur scène, perpétuée aujourd'hui, avec des fortunes diverses, par ses anciennes élèves et interprètes.

Béatrice Massin, qui fut l'une d'entre elles, reprend ainsi pour l'Opéra-Comique, en complément de la « résurrection de la résurrection » d'Atys, le flambeau de la restitution du répertoire baroque, délaissant là son écriture chorégraphique, située au confluent de la danse ancienne et de la danse contemporaine, pour régler cet hommage à la « Belle Dame » - autant qu'à la « Belle Dance » -, en forme de « morceaux choisis ». Cinq danseurs de sa propre troupe, Fêtes Galantes, y participent, accompagnés de Sylvain Borruel, danseur du Ballet de l'Opéra du Rhin, qui, il faut bien le dire, est le seul à sublimer de manière véritablement personnelle l'exécution de ces danses, à la virtuosité indéniable mais jamais démonstrative. Pas de bavardages pieux ni de paroles superfétatoires durant cette petite heure, mais un spectacle qui décline un choix de solis, duos ou danses collectives, interprétés en costumes d'époque, pour la plupart traduits des notations chorégraphiques contenues dans les recueils de Pécour et de Feuillet, les deux principaux maîtres de ballet de la fin du règne de Louis XIV. Un extrait de la Sarabande pour Jean-Philippe Rameau, « La Gavotte et ses doubles », ainsi que « Les Caractères de la Danse », tiré du Bal à la cour de Louis XIV et choisi comme conclusion au spectacle, viennent toutefois rappeler que Francine Lancelot régla elle-même, « dans le style de », ses propres chorégraphies. Un petit montage sonore, fait de rires et de paroles brouillées, laisse de temps à autre entendre sa voix, sans vraiment perturber le cours du spectacle et le flot musical. Côté mise en scène, on ne passe pas non plus par quatre chemins : le plateau s'offre immédiatement au regard du spectateur dans la perfection hiératique du merveilleux décor d'Atys, cette antichambre d'un palais « Grand Siècle », assortie de deux mystérieuses portes en fond de scène, ouvertes à toutes les métamorphoses poétiques. Un écrin symbolique, mêlant simplicité et sophistication, destiné à exalter le plaisir conjoint de la musique et de la danse seules, à la manière d'un récital ou d'un concert de gala - le meilleur du baroque en quelque sorte.

Peut-être est-ce d'ailleurs sur ce dernier aspect que le spectacle en tant que spectacle démontre ses limites – le répertoire chorégraphique baroque, si peu spectaculaire pour un regard moderne, se prêtant mal à une démarche laissant prévaloir « la danse pour la danse ». Si les danses qui composent le programme – certaines beaucoup plus que d'autres – conservent individuellement leur capacité formelle à charmer l'oeil, l'esprit et l'oreille, on peine en effet à y voir autre chose, lorsqu'elles se trouvent énumérées de la sorte une heure durant, qu'un florilège luxueux, mais un peu poussif, de beaux morceaux - une collection d'objets de musée mis en catalogue, ressortis à l'occasion d'une exposition de prestige - la recréation de la production mythique d'Atys. Les extraits se succèdent par ailleurs sans véritable pause ni transition, au point que l'on perd rapidement le fil de leurs origines respectives, malgré l'appui du programme. Traités comme des objets autonomes, ils souffrent finalement d'être privés du contexte spectaculaire et théâtral, voire féerique, qui les a fait naître et leur donne encore à l'occasion beauté et sens. Cette heure dédiée à la mémoire de Francine Lancelot, hommage certes, et sans prétention, simple petit espace réservé dans la programmation « concentrique » de l'Opéra-Comique, sonne alors à plus d'un titre comme dispensable, sinon comme anachronique, au regard de la conception générale du spectacle baroque. Faire revivre Atys dans sa splendeur originelle était sans doute largement plus probant.


Revenir en haut
Voir le profil de l'utilisateur Envoyer un message privé
Montrer les messages depuis:   
Poster un nouveau sujet   Répondre au sujet    Dansomanie Index du Forum -> Tout sur la danse Toutes les heures sont au format GMT + 2 Heures
Aller à la page Précédente  1, 2, 3, 4  Suivante
Page 2 sur 4

 
Sauter vers:  
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous pouvez voter dans les sondages de ce forum


Nous Contacter
Powered by phpBB © phpBB Group
Theme created by Vjacheslav Trushkin
Traduction par : phpBB-fr.com