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Alain
Inscrit le: 25 Déc 2008 Messages: 161
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Glinka !
Inscrit le: 15 Sep 2007 Messages: 84
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 12:24 am Sujet du message: |
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Simple parenthèse entre les vrais commentaires d'authentiques balletomanes.
Pedro a écrit: |
mais excusez la nostagie d'un vieil esthète qui a vu ce ballet dans toutes ses distributions depuis l'origine, il y a un gabarit Lifar, le même que pour Petipa, qui exclut les trop grandes danseuses qui sont nombreuses parmi les étoiles. La Cigarette a été créée par Mlle Solange Schwartz (1m 55) puis confiée à des Tanagras: Pontois, Vyroubova... |
Il semble qu'il y ait en art (bien davantage que dans le « politique » qui, vite refroidi -dès le journal d'hier...-, semble illico devenir Histoire) tout un long moment de limbes, du présent vieilli plus que du passé, un temps d'entre deux points de vue où l'œil accommode mal, mais fascinant pourtant, un peu « magique » comme dit l'époque, parce que temps de l'Histoire de l'art en train de « prendre » ; et que l'on peut tenter d'observer comme enfant l'eau devenant glace, mais seulement si le truchement d'un regard l'ayant vu vif l'amène à la portée du nôtre, qui ne pouvait le percevoir ni dans le présent réel où il n'était plus, ni dans les livres d'Histoire où il n'est pas encore vraiment...
C'est précisément cette « magie » que suscite -à mon avis- la phrase de Pedro citée au début, sur laquelle j'ose me permettre non d'attirer l'attention (car nul ici n'a besoin pour cela des services du rédacteur de ces mots), mais de la retenir un peu...
Cette phrase (tout comme celles aussi de « Nesle » dans un autre fil, un des textes les plus émouvants que j'aie lus ici ces derniers temps) sonne à mon esprit comme le « Clair de lune » de la Suite bergamasque, c'est la même tonalité de « nostalgie rêveuse »...
Le rare Pedro ne fait pas seulement penser à ce personnage type des romans de Modiano -d'ailleurs dans l'un d'eux surnommé « Pedro » par les « si braves garçons » du livre-, l'homme d'âge (puisque Pedro s'indique « vieil esthète ») cultivé, dilettante, esthète précisément, un peu désabusé -par ailleurs toujours bienveillant-, et nostalgique. Il se trouve aussi, on le sait sans doute, que « Pedro » est le nom générique de tout hélicoptère veillant les pilotes de l'aéronavale : tant qu'un « Pedro » est là, nul équipage à la mer ne sera englouti...
Entre le présent dont elle est loin et l'Histoire où elle n'est peut-être pas vraiment encore pour chacun, Solange Schwartz ne sera pas engloutie par le temps des limbes -Pedro était là...
C'était juste une parenthèse -qui, je l'espère, ne gênera personne (sinon elle peut être effacée en entier...).
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Lacdescygnes
Inscrit le: 10 Mar 2006 Messages: 118
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 11:08 am Sujet du message: |
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Je crois comme Alain que ce programme a surtout pour but de réunir trois oeuvres de chorégraphes certes très différents mais emblématiques du 20ème siècle. Les deux plus tardifs sont très populaires, le Boléro remportant le palme et faisant se déplacer un public peut-être moins amateur de danse.
Moi aussi, je me déplace avant tout pour Suite en blanc. Question de goûts mais également de la rareté de la chorégraphie par rapport aux deux autres.
En tout les cas, si Béjart fait bien partie des chorégraphes consacrés, il n'est en rien un classique à mes yeux, mais un néo-classique (ex: Serait-ce la mort ?) ou un contemporain (songeons en effet à aux Variations sur la "musique" - avec de gros guillemets - de Pierre Henri), qui à la création de ces pièces apparaissait comme un véritable novateur, et y compris je pense avec le Boléro.
Le Boléro de Ravel, pièce également ultra-célèbre. Qu'il s'agisse aussi d'une oeuvre de commande, Pedro, en fait-il nécessairement "un navet"? N'est-ce pas un peu réducteur ?
On a cependant le droit de ne pas l'aimer, comme on a le droit de ne pas apprécier et de ne pas être sensible à La Joconde (ce qui est mon cas).
Citation: |
Et on pourrait se demander si la musique du lac des cygnes de Tchaikovsky, tellement populaire, n'a pas aussi un peu vieilli et si ce romantisme débridé n'est pas destiné à attirer les masses et faire pleurer margot. Et si la chorégraphie de Petipa et Ivanov n'est pas au fond qu'un réceptacle pour faire briller les ballerines. |
Je connais des gens qui, hélas, pensent cela. Mais je crois qu'ils n'ont pas compris ce qu'était la Danse Classique, ni réalisé la profondeur qu'on pouvait y trouver. Et la musique de Tchaïkovky, "vieillie" ? Non, tout cela est im-pos-si-ble!
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nabucco
Inscrit le: 14 Mar 2007 Messages: 1462
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 12:15 pm Sujet du message: |
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maraxan a écrit: |
nabucco a écrit: |
Pour en revenir au Boléro et aux réactions du public qu'il suscite (et qui sont dues en effet en partie à la musique trop célèbre de Ravel), je ne peux que repenser à Artifact Suite de Forsythe et à sa réflexion sur la manipulation et l'embrigadement : là où Forsythe joue avec le public pour dénoncer de tels procédés, en les interrompant par de constantes douches froides, Béjart les utilise sans vergogne, au premier degré. Oui, ça marche, et c'est bien triste. C'est peut-être bien, hélas, le ballet parfait pour notre époque. |
On pourrait dire la même chose de Béjart, c'est simplement plus subtil, il faut faire le travail de réflexion sans le rappel à l'ordre... C’est le propre des œuvres hypnotiques et les différents niveaux de lecture... |
Qui parle de rappel à l'ordre ? Forsythe s'adresse à l'intelligence du spectateur, Béjart à son bas-ventre... Aujourd'hui, évidemment, il vaut mieux le second que le premier, apparemment.
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haydn Site Admin
Inscrit le: 28 Déc 2003 Messages: 26534
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 12:29 pm Sujet du message: |
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Je pense qu'il convient de maintenir cette discussion dans les limites de la correction, Nabucco. Vous n'aimez pas Boléro, c'est votre droit ; d'autres peuvent apprécier cette chorégraphie, qui est à mon avis loin d'être ce que Béjart a fait de plus mauvais. Cela requiert évidemment des interprètes d'exception. Pour cause de Prix de Lausanne, je n'ai pas encore pu revoir ce spectacle. Je me souvient cependant, lors de la précédente reprise, que la performance de Nicolas Le Riche avait été - c'est du moins mon opinion - vraiment exceptionnelle et surpassait celle de Jorge Donn.
Une oeuvre n'est pas forcément mauvaise parce qu'elle est populaire. Certes, on peut reprocher à Maurice Béjart d'avoir, dans les dernières années de sa vie, cédé aux sirènes du commerce et ses ultimes chorégraphies ne sont pas ce qu'il a fait de mieux. Mais il a aussi produit, surtout dans les années 1960 - 1970, de grandes choses, et Boléro est - toujours selon mon avis personnel - une pièce à la fois efficace sur le plan émotionnel et réussie d'un point de vue chorégraphique. Un ballet peut "prendre aux tripes", pour reformuler autrement vos propos, sans qu'il en devienne pour autant simpliste ou vulgaire.
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akhmatova
Inscrit le: 27 Mar 2007 Messages: 341
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 2:57 pm Sujet du message: |
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Un Wagner peut aussi "prendre aux tripes" et pour le moment, on n'a pas encore qualifié Wagner de vulgaire ou simpliste. L'art n'est pas un cours magistral de philo.
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Ambrine
Inscrit le: 10 Déc 2008 Messages: 297
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 3:08 pm Sujet du message: |
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Citation: |
Lacdescygnes a écrit :
Et la musique de Tchaïkovski, "vieillie" ? Non, tout cela est im-pos-si-ble! |
Ma fille de 10 ans s’est arrêtée de jouer alors que j’écoutais Tchaïkovski.
Elle s’est arrêtée pour écouter la harpe … et a juste dit : « c’est beau ! ».
Elle écoute bien sûr les airs actuels de sa génération mais elle revient régulièrement à Tchaïkovski et aux autres classiques qu’elle découvre.
Idem pour mon fils, 14 ans, alors que je regardais le Boléro sur Arté dansé par Le Riche.
Il écoute le Boléro de Ravel en boucle depuis …
Alors, faciles Tchaïkovski et Ravel ?
Vieillie, la musique de Tchaïkovski ? Certes non.
Intemporel : OUI.
Il s’agit juste d’une question de goût …
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Vanille
Inscrit le: 12 Sep 2008 Messages: 101
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 3:31 pm Sujet du message: |
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Représentation du 02/02/09:
Suite en blanc:
Une superbe interprétation de "la flûte" par Clairemarie-Osta, une leçon magistrale de fouettés (d'une propreté et d'une netteté impressionnantes) par Aurélie Dupont.
Stéphanie Romberg, qui était distribuée dans le thème varié, a semble-t-il eu plus de difficultés, et effectué plusieurs descentes de pointe - j'espère que cela n'était pas dû à une douleur au pied ou à la cheville, d'autant qu'il s'agit d'une danseuse à la technique d'ordinaire très solide. J'espère vraiment que tout va bien pour elle.
Personnellement, j'aime beaucoup Suite en blanc, mais je pense qu'il faut avoir soit pratiqué soi-même la danse, soit être très au fait de la technique classique pour véritablement l'apprécier. Il s'agit d'une démonstration éblouissante de danse classique académique, et, visionné en vidéo, un arrêt sur image à chaque seconde mettrait en évidence placement des corps, en-dehors, épaulements, lignes des corps... A condition qu'il soit interprété par des danseurs chevronnés, ce qui est bien entendu le cas à l'Opéra de Paris.
L'Arlésienne:
A chaque fois que je la vois sur scène, je suis époustoufflée par les qualités physiques de Delphine Moussin (Vivette), notamment par son coup de pied, son en-dehors et la souplesse de son dos. Une danseuse que j'ai personnellement rarement eu l'occasion d'admirer dans des rôles de premier plan, et je le regrette.
Benjamin Pech (Frederi) s'est avéré éblouissant, très investi par son rôle, et les ovations et applaudissements ayant salué sa prestation étaient, à mon avis, amplement mérités.
Benjamin Pech a par ailleurs eu une geste très sympathique en saluant le chef et l'orchestre, rappelant par ce geste que la danse et la musique s'enrichissent mutuellement.
Boléro:
Marie-Agnès Gillot en était l'interprète principale.
Je ne connaisais jusqu'ici que l'interprétation de Nicolas Le Riche. L'approche de Marie-Agnès Gillot est très différente, la danseuse ayant une approche finalement très simple de la chorégraphie, privilégiant un contact très souple avec le sol. Cela fonctionne puisque Marie-Agnès Gillot rayonnait véritablement hier, et élipsait tous les autres danseurs présents sur scène - ses bras interminables avaient un effet quasiment hypnotique, et son engagement psychologique était certain. Au moment des saluts, Mlle Gillot semblait véritablement épuisée et il lui a fallu plusieurs minutes pour se désinvestir du rôle.
Une petite mention pour le chef d'orchestre, Kevin Rhodes, que je trouve toujours aussi sympathique, et qui sait transmettre son énergie et sa joie de vivre aux musiciens, aux danseurs, et au public.
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nabucco
Inscrit le: 14 Mar 2007 Messages: 1462
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 7:46 pm Sujet du message: |
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Je ne reviendrai pas ici sur ce que je pense du Boléro, mais je voudrais quand même mettre les points sur les I en ce qui concerne ce que j'ai dit et surtout ce que je n'ai pas dit.
-J'ai écrit que l'aspect manipulateur de la pièce me révulsait (je ne l'ai pas dit comme ça, mais en résumé...).
-Je n'ai dit, ni écrit, ni pensé que le Boléro de Béjart était une mauvaise pièce parce que populaire [édité par la modération : pas d'attaques ad hominem, merci de votre compréhension]
-Je n'ai pas dit que je détestais systématiquement tout ce qui prenait aux tripes (Wagner, pourquoi pas - compositeur que j'aime énormément, mais ce n'est pas, lui non plus, à mes tripes qu'il s'adresse, je trouve). Laisser entendre cela, c'est sous-entendre que je serais en quelque sorte inaccessible à l'émotion: je vous laisse volontiers les vôtres, et je garde les miennes...
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maraxan
Inscrit le: 24 Nov 2006 Messages: 600
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 8:07 pm Sujet du message: |
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Je crois que toute œuvre d'art est manipulation...
Personnellement, je n’aime pas Ravel en général, et par conséquent certainement pas plus le Boléro, je ne suis pas non plus un fan de Béjart. Je me sens donc assez libre de discuter sur ce sujet pour défendre cette œuvre, car justement, elle m’interroge.
En revanche, j’apprécie énormément certaines œuvres de Forsythe, et j’adore Bach, mais le didactisme de l'art est souvent de la bonne conscience et c'est quelquefois un peu fumeux... Je respecte tout à fait les intentions de l’auteur, car c'est le propre de l’artiste de communiquer ses idées avec son art mais je suis parfois assez sceptique, en particulier au sujet d'Artifact Suite car je ne suis pas certain que ceux qui ne se posent pas de questions en fassent vraiment l’interprétation souhaitée, ce qui d'ailleurs n'est pas très grave...
Je suis tout autant intéressé à analyser a posteriori, pourquoi Nicolas Le Riche me fascine dans le Boléro (et pas Marie-Agnès Gillot hier par exemple) alors qu’il bouge sur une musique que je n’aime pas et que d’ailleurs je n’entends presque plus… C’est une chimie qui me fait continuer à penser… on peut dire que c'est de la manipulation... OK, c'est justement ce qui me fascine dans la danse et chez les danseurs.
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haydn Site Admin
Inscrit le: 28 Déc 2003 Messages: 26534
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 8:09 pm Sujet du message: |
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En ce qui me concerne, nabucco, il n'y a jamais eu le moindre sous-entendu, et je ne vous prêtais certainement pas une insensibilité générale aux œuvres qui jouent d'abord sur le registre émotionnel ; je ne parlais que du cas précis du Boléro, où, personnellement, je ne vois aucune forme de manipulation.
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LucyOnTheMoon
Inscrit le: 18 Nov 2008 Messages: 984
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 8:29 pm Sujet du message: |
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Si la danse ne devait s'adresser qu'à la tête et non aussi au coeur et au ventre (plutôt qu'au bas-ventre ) on pourrait diviser par 10 le nombre de spectateurs.
Quant à la manipulation, me permettrez-vous une comparaison avec Alfred Hitchcock ? "Maître du suspense" certes, car maître de la manipulation du spectateur poussée à l'extrême ! Fortement critiqué de son vivant, il reconnaissait lui-même se ficher pas mal de l'intrigue et que pour lui, seule la manière de filmer (pour chatouiller les sens du spectateur et générer l'angoisse) comptait. Et aujourd'hui, des cinéastes parmi les plus "intellectuels" se réclament de Hitchcock ! Le spectateur du 21e siècle est averti de la manipulation, un "manipulé consentant" pourrait-on dire, et il en redemande Eh bien pour moi, le Boléro de Ravel/Béjart c'est exactement la même chose, et c'est TRES bien comme ça
[édité par la modération : pas d'attaques ad hominem, bis ]
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haydn Site Admin
Inscrit le: 28 Déc 2003 Messages: 26534
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dusuau
Inscrit le: 30 Mar 2007 Messages: 325 Localisation: Paris
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 11:04 pm Sujet du message: |
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je vous laisse deviner de qui est cette citation.
"Il n'y a qu'un seul public : celui qui vient pour aimer. Si les gens viennent pour s'aimer eux-mêmes ou chercher le reflet d'anciennes amours, le contact n'a pas lieu."
_________________ "Quand un cachalot vient de tribord, il est prioritaire. Quand il vient de bâbord aussi. "
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paco
Inscrit le: 28 Oct 2005 Messages: 3572
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Posté le: Mar Fév 03, 2009 11:12 pm Sujet du message: |
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haydn a écrit: |
Je ne pensais pas que Béjart allait soulever de telles passions! |
je trouve ça génial, c'est une preuve que c'est une oeuvre encore très vivante.
A part ça je rejoins maraxan sur l'emprise très forte de l'niterprétation de Nicolas le Riche dans cette oeuvre. Mis à part Jorge Donn dont je n'ai pas souvenir car je l'ai vu à Brussels alors que j'étais encore un bouchou, j'ai vu dans ce Boléro M.A. Gillot (Bastille), Sylvie Guillem (Versailles) et N. Le Riche deux fois (Bastille puis Garnier cette année). Si ses deux illustres consoeurs sont aussi remarquables et charismatiques dans ce ballet, Nicolas le Riche a ce petit + hypnotique dans son engagement, une sorte de transe très communicative qui produisent une électricité indescriptible et font, pour moi, de son interprétation de très loin la référence, ou à coup sur un jalon "historique" de l'histoire de ce ballet.
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