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Raymonda [Palais Garnier, du 1er au 30 décembre 2008]
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Cléo



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MessagePosté le: Sam Nov 08, 2008 3:31 pm    Sujet du message: Répondre en citant

julien a écrit:
c'est cohérent avec le côté pseudo médiéval du "livret" qui lui est, objectivement, d'un intérêt très relatif.

D'autant que le son "médiévalisant" de la musique, qui peut paraître aujourd'hui une redite, était, à l'époque tout à fait original. Même cette variations du 2e acte, que je n'aime pas, tente d'évoquer le cornet à bouquin médiéval au travers des cuivres. La légende du lac des cygnes était aussi une légende médiévale pourtant, il n'y a pas de sonorité qui font penser, de près ou de loin, à la musique du Moyen-âge. c'est de la -très- pure musique symphonique du XIXe siècle."Raymonda" nous parait très "musique de film" aujourd'hui, mais c'est parce que cela a été imité dans l'industrie du cinéma.

Pour le livret, c'est vrai, il y a plus à redire! Les anachronismes sont par trop flagrants.
En même temps, à la décharge de Lidia Pashkova, la situation de Raymonda pouvait paraître bien scabreuse pour un spectateur du XIXe siècle. Une femme partagée entre un fiancé légitime et un outsider insistant n'était pas sans poser quelques problèmes de convenance. Et il faut reconnaître que c'est cette indécision sur le personnage d'Abderam qui a ouvert la porte à la relecture de Rudolf Noureev. Pour ma part, je n'aime pas, dans la version Grigorovitch de ce ballet, le parti pris de faire apparaître Jean de Brienne au premier acte. Dans la version de l'Opéra de Paris, le chevalier chrétien souffre peut-être de cette apparition tardive dans le ballet, mais il recentre l'enjeu sur le choix de Raymonda". Dans la version Bolshoï, on a un peu le sentiment que l'héroïne papillonne d'un prétendant à un autre, ou pire, qu'elle reste anormalement froide aux attraits d'Abderam.
Il me semble, en outre, que, si le livret avait pris des décisions plus fermes en 1898, l'action de "Raymonda" serait irrémédiablement entachée aujourd'hui de colonialisme et donc difficilement présentable sur un scène. La faiblesse du livret a peut-être lesté longtemps le ballet. Sans doute aussi l'a-t-elle préservé (avis personnel).




Dernière édition par Cléo le Sam Nov 08, 2008 11:46 pm; édité 1 fois
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sophia



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MessagePosté le: Sam Nov 08, 2008 7:59 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Raymonda avait été conçu par Petipa comme une sorte de prolongement de La Belle au bois dormant, et la parenté entre les deux ballets est au fond assez frappante. Cadre grandiose, caractère aristocratique des personnages, intrigue de cour avec mariage à la clé... La Dame Blanche rappelle par sa dimension protectrice et bienfaisante la Fée des Lilas, l'entrée de Raymonda est calquée sur celle d'Aurore, on y retrouve le motif des fleurs offertes en l'honneur de l'héroïne... Beaucoup d'éléments sont ainsi réutilisés, tout en subissant des transformations. Ce qu'il y a peut-être d'inédit dans Raymonda, surtout par rapport à La Belle au bois dormant, c'est le mélange de la danse aristocratique et du grand style académique avec le caractère et un style inspiré des danses nationales (essentiellement magyare). La présence des danses de caractère n'est évidemment pas une nouveauté en soi, puisqu'on les trouve insérées dans la plupart des ballets du XIXème siècle, mais ici, on ne peut pas les considérer comme de simples divertissements annexes (comme c'est le cas pour la danse espagnole et la danse sarrazine), elles inspirent aussi l'écriture chorégraphique des variations réservées aux héros nobles. On le constate par exemple dans le Grand pas classique hongrois (le titre est significatif de cette dualité) de l'acte III, avec les ports de bras et les mouvements des mains notamment.

Le cadre médiéval, ou pseudo-médiéval, du ballet est un rêve, un fantasme d'artiste. C'est le Moyen-Age gothique tel que l'imaginaient et le reconstruisaient les romantiques, à la manière de Victor Hugo ou de Viollet-le-Duc. Ce Moyen-Age de carton-pâte, Petipa l'associe du reste à un autre rêve, le rêve oriental, avec le personnage d'Abderrahman, symbole de crainte certes, mais aussi de fascination pour l'Européen du XIXème siècle. Pour Raymonda, il est à la fois l'interdit et le désir ultime, inavoué...
Bref, ce ballet me paraît un objet hybride, un mélange hétéroclite de toutes les mythologies romantiques, et comme un condensé de tout l'art de Petipa. Ce côté "auberge espagnole" le rend sans doute assez déroutant et explique peut-être pourquoi il est moins célèbre et moins souvent programmé (y compris en Russie) que Le Lac des cygnes, La Bayadère, La Belle au bois dormant... Le livret est en effet d'une efficacité dramatique et symbolique limitée et semble surtout un prétexte pour aligner des numéros et des danses... Des tableaux vivants en quelque sorte.

Quant à la musique, je la trouve absolument envoûtante, autant que du Tchaïkovsky. C'est elle qui possède la force dramatique dont le ballet, dans sa progression, manque étrangement. Certes, j'ai un goût déplorable (j'aime Minkus, et aussi Drigo, Pugni, Delibes..., cauchemars de tous les mélomanes), mais là, j'avoue que je peux l'écouter les yeux fermés. Je dois dire que si la danse m'avait laissée de marbre en avril dernier (et la chorégraphie n'est nullement en cause), en revanche, la musique, bien soutenue par l'orchestre de l'ONP, donnait vraiment des frissons... C'est vrai, elle a un côté "pré-hollywoodien" évident.
Une question à ce sujet, Glazounov a-t-il été revendiqué ouvertement comme source d'inspiration par des compositeurs de musiques de films?


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akhmatova



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MessagePosté le: Sam Nov 08, 2008 10:31 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne sais pas si un quelconque compositeur hollywoodien l'avait dit ouvertement.
Par contre, quand on connait les origines d'une grande partie de ces compositeurs (je parle des années 20-30-40), tout laisse à croire qu'ils connaissaient Glazounov et sa musique. Glazounov était professeur au conservatoire de Saint-Peterbourg et beaucoup étaient ses élèves de composition et orchestration. Je peux citer un élève de Glazounov : Dimitri Tiomkin qui a fait carrière à Hollywood. On lui doit la musique de : High Noon, The Alamo, The Guns of Navarone, The Old man and the Sea et autres (140).


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Cléo



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MessagePosté le: Sam Nov 08, 2008 11:44 pm    Sujet du message: Répondre en citant

La musique de Tcherepnin pour "le pavillon d'Armide" présente des similitudes troublantes dans l'orchestration avec la musique de Glazunov. Ce dernier était en effet son professeur. Ce ballet a été l'un des premiers présentés par la compagnie de Diaghilev et a pu faire connaitre le style du maître et pédagogue.
D'autant que Glazunov a passé les 8 dernières années de sa vie en France (il meurt en mars 1936) où il a continué à créer, enseigner et présider de nombreux concours européens. Son style était donc beaucoup plus familier aux apprentis compositeurs de la décennie des années 30 qu'il ne l'est aujourd'hui.

Pour ce qui est de son influence posthume dans l'industrie du cinéma, il est fort probable que la diaspora russe de l'après octobre 17, qui a essaimé dans les théâtres de Broadway à NYC, a donné également quelques compositeurs au cinéma.


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akhmatova



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MessagePosté le: Dim Nov 09, 2008 12:27 am    Sujet du message: Répondre en citant

Il est clair que Glazounov n'était pas un illustre inconnu en Europe et en Amérique. C'était un élève privé de Rimsky Korsakov, dont l'esprit hante la musique de Raymonda, professeur et puis directeur du Conservatoire de Saint Petersbourg jusqu'en 1928, professeur de Prokofiev et de Chostakovitch et de tant d'autres.
Seulement, il appartient au XIXe siècle aussi bien en tant que pédagogue, et que musicien. Stravinsky l'avait accusé d'académisme, par exemple. A vrai dire, c'est le même sort qu'on a réservé à Rachmaninov, voire à Tchaïkovsky dans les milieux dits "modernes".


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Cléo



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MessagePosté le: Dim Nov 09, 2008 12:56 am    Sujet du message: Répondre en citant

Ce qui peut nous ramener justement aux compositeurs de cinéma... Les partitions de film des années 30-40 se devaient d'être de facture "classique". Ce qui pouvait paraître démodé à la jeune garde musicale était rassurant pour l'industrie cinématographique.


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haydn
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MessagePosté le: Lun Nov 10, 2008 10:25 am    Sujet du message: Répondre en citant

Maria Alexandrova a mis à jour son site web et ne fait plus apparaître Ruslan Skvortsov en tant que partenaire pour ses deux représentations au "Grand Opéra". Aucun nom d'un éventuel remplaçant n'est cité.

http://www.mariaalexandrova.ru


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Antonin B.



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MessagePosté le: Lun Nov 10, 2008 3:22 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour,
Pouvez-vous m'éclairer sur ce rôle masculin de Abderam ? Il est parfois mentionné par certains danseurs, visiblement comme un rôle qui fait "référence". Pour quelles raisons ?
Il me semble que Mlle Doisneau l'avait également mentionné comme un des rôles masculins qu'elle aurait aimé interprété, dans un autre monde Wink (si mes souvenirs sont exacts)
Merci



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haydn
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MessagePosté le: Lun Nov 10, 2008 6:35 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne sais pas si le rôle d'Abderrahman (changé en "Abderam" par Nouréev, pour des raisons qui m'échappent) peut être considéré comme un rôle de "référence" (au même titre que Siegfried, Conrad, Désiré...), mais c'est en tout cas un rôle important, qui change un peu des personnages "nobles" et des princes clinquants. De grands danseurs, tels Farukh Ruzimatov, au Mariinsky, l'ont interprété. L'amie Sophia vous en parlera certainement bien mieux que moi.

En tout cas, dans Raymonda (en particulier dans la version de Youri Grigorovitch dansée au Bolchoï, ainsi que chez Nouréev), cela me paraît être le rôle masculin le plus intéressant, celui qui offre à l'exécutant le plus de possibilités de caractérisation, le jeu scénique le plus varié. Jean de Brienne - théoriquement le personnage principal - est nettement plus lisse.

D'ailleurs, à la fin du ballet, on se demande si Raymonda n'a pas quelques regrets, et si après tout, elle n'eût pas préféré que ce soit Abderrahman qui trucidât Jean de Brienne, et non l'inverse. L'histoire me fait toujours penser à l'Enlèvement au Sérail, de Mozart, où l'on se dit que Constance n'a peut être pas vraiment eu une bonne idée de se laisser délivrer par le grand niais de Belmonte (incarné par un ténor, type de voix auquel Wolfie confie généralement des rôles de crétin, Ottavio, par exemple), et qu'elle aurait finalement mieux fait de continuer à roucouler en compagnie du Pacha Sélim. Mais c'est une vision personnelle des choses, que vous n'êtes pas obligé de partager...


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Antonin B.



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MessagePosté le: Lun Nov 10, 2008 7:06 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Je passerai outre le risque de faire plaisir au prof... Wink

J'avoue que je partage votre vision de l'enlèvement au sérail, et votre description me fait bien sourire...

Bien. Ce role d'Abderam (pardonnez-moi, plus simple à écrire de cette manière) m'intrigue, décidément. Pourtant je n'étais pas parti pour voir Raymonda... j'hésite, diriez-vous que Raymonda constitue l'un des ballets classiques qu'il est bon d'avoir vu ?



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Silk



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Messages: 165

MessagePosté le: Lun Nov 10, 2008 8:38 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Pour moi aussi, la référence à l'Enlèvement au Sérail est particulièrement bien vue car très évocatrice !
Selon Noureev, Abderam et Jean de Brienne sont deux évocations masculines différentes mais complémentaires. Par sa naissance, Raymonda se doit d'épouser le sage et valeureux Jean de Brienne mais dans son inconscient c'est par Abderam et sa sensualité qu'elle est attirée... Comme dans toutes ses productions, Noureev intègre une part de psychologie.
Faut il aller voir "Raymonda" ? Ce fut longtemps mon ballet préféré par son faste, ses six variations et quatre pas de deux pour l'héroïne (dont la fameuse variation à la claque), sa musique de Glazounov (qui vaut mieux que l'oubli dans lequel on l'a relégué !) mais il faut une interprétation sans défaut ! Le Ballet de l'Opéra en sera t 'il capable ? J'ai tendance à en douter vu le "raccourci" présenté à Bastille l'an passé avec les difficultés éprouvées par le corps de ballet. "Raymonda" demande non seulement des solistes exceptionnels mais aussi un corps de ballet parfait, sinon je crains que ce ballet merveilleux ne sombre dans le kitsch le plus insupportable...


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Antonin B.



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MessagePosté le: Lun Nov 10, 2008 11:09 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Merci Silk de ces précisions
hm...
c'est quitte ou double ! Wink



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sophia



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MessagePosté le: Mar Nov 11, 2008 1:33 am    Sujet du message: Répondre en citant

Je suis d'accord avec Silk concernant la question "Faut-il aller voir Raymonda"? Oui, tout en sachant que... L'oeuvre est d'une exigence inouïe sur le plan technique, notamment pour l'héroïne, qui doit soutenir plusieurs variations virtuoses dans chaque acte, et la technique y est en même temps indissociable/au service d'un style aristocratique, qui mêle ou alterne académisme et caractère. Ni le livret, d'une efficacité dramatique limitée, ni la scénographie, pourtant d'un faste incomparable, ne suffisent à eux seuls à tenir le spectateur en haleine durant 3h30, sans un corps de ballet et/ou des solistes solides, stylés, et disons-le exceptionnels, pour porter le spectacle et éviter un ennui fatal. Et tout cela ne naît pas comme par magie, sans culture. Cependant, précisons que l'extrait qui a été présenté en avril-mai dernier (en gros, l'acte III et le Grand pas classique hongrois) ne rend pas entièrement compte, loin de là, du style, ou plutôt des styles, qui caractérisent le ballet. La variation de Raymonda dans ce passage fait ainsi appel à d'autres qualités que la virtuosité technique, l'interprète se devant quand même de posséder celle-ci au plus haut niveau dans les actes précédents.

S'agissant du personnage d'Abderam, je ne sais pas non plus pourquoi son nom d'origine, Aberrahmane, a été modifié et raccourci par Noureev. Lydia Paskova, l'auteur du livret, avait emprunté ce nom à Théophile Gautier qui, dans son Voyage en Espagne, évoquait Abderrahmane, calife maure qui fonda la mosquée de Cordoue. Il n'y a cependant aucun souci de vérité historique dans Raymonda qui est d'abord une rêverie romantique sur le Moyen-Age et l'Orient. Abderam/Aberrahmane est un archétype, comme on en trouve dans tous les ballets de Petipa. Archétype de l'Orient, violent, barbare et sensuel (il offre des bijoux et de l'or à Raymonda pour la séduire), objet d'effroi en même temps que de fascination. Peut-être n'est-il pas une créature noire, et proprement maléfique, à l'image de Rothbart ou de Carabosse, qui sont plus directement en relation avec l'imaginaire des contes, mais il en est tout de même un avatar - porteur probablement de plus d'ambiguïté (il s'agit là d'un être humain, non d'une créature surnaturelle) - qui apparaît ainsi dans le ballet comme l'image antithétique de Jean de Brienne, preux chevalier paré de toutes les vertus morales et héroïques (et dont l'héroïsme, passé ou lointain, reste toutefois de l'ordre du dire et non du faire, c'est bien cela qui, à mon sens, pose problème sur le plan dramatique et dramaturgique).

Je pense toutefois que l'aspect psychologique n'est pas uniquement le fait de Noureev et existait déjà pleinement dans le ballet de Petipa, car dans le tableau central de la rêverie, à l'acte II, on voit le Maure apparaître à Raymonda et se substituer à Jean de Brienne. L'héroïne est effrayée et finit par s'évanouir, mais l'on sent bien qu'il n'y a là qu'un pur effet de théâtre motivé par la bienséance et la vraisemblance dramatiques. Du reste, la musique attachée au personnage a des accents très nostalgiques, comme pour signifier le désir de Raymonda, tu à jamais.

A l'origine, Abderrahmane était un rôle de pantomime, ce qu'il est resté en grande partie dans la version du Kirov plus tardive, signée Sergeev (1948).
Ce qu'il y a de particulier chez Noureev est que le rôle du Maure est non seulement dansé, mais aussi équilibré, sinon étoffé, par rapport à celui du héros traditionnel et princier, Jean de Brienne (on retrouve toutefois cette importance scénique et chorégraphique du Maure dans la version de Grigorovitch, qui a toujours aimé à mettre en scène dans ses ballets la fougue et la passion orientales). Jean de Brienne reste le héros noble, avec variations virtuoses et princières dans le plus pur style académique (Noureev a aussi étoffé le rôle sur le plan de la danse), mais Abderam a aussi son mot à dire, notamment dans l'acte II, où il a, je crois, deux variations de caractère chorégraphiées dans un style orientalisant. Là, on perçoit toute l'ambiguïté de la trame narrative et l'on voit bien à quel point il est l'obscur objet du désir de Raymonda. Ces scènes sont sans doute assez valorisantes pour l'interprète (en plus du costume somptueux!), elles mettent en avant sa virtuosité, et plus encore son brio, mais elles exigent aussi une puissance dramatique qu'on peut toujours s'épuiser à trouver dans le personnage de Jean de Brienne (il est même très en-deçà d'autres héros nobles qui n'ont souvent qu'à paraître pour exister...). Dans la version de Grigorovitch du Bolchoï, le rôle d'Abderrahmane est également dansé. Quand on voit l'interprète du rôle, en l'occurrence Gedeminas Taranda, sur les deux enregistrements qui sont disponibles dans le commerce, je ne sais pas si c'est dû au talent de l'artiste ou à la chorégraphie, mais on est aussi plus attiré par le Maure que par le chevalier provençal... Il faudrait que je revoie ces films pour en dire plus...


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julien



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MessagePosté le: Mar Nov 11, 2008 1:49 am    Sujet du message: Répondre en citant

J'imagine que le ballet de l'opéra est encore capable de produire un Raymonda de qualité, si on lui donne le temps de répéter...
Sait-on d'ailleurs qui fait répéter le ballet ? J'ai croisé Elisabeth Platel sortant de l'opéra il y a quelques jours, je me demandais si elle venait partager son expérience du rôle avec ses plus jeunes collègues.


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sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
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MessagePosté le: Mar Nov 11, 2008 11:25 am    Sujet du message: Répondre en citant

Petite curiosité: des pièces de collection produites par la banque de Russie d'une série consacrée aux ballets russes. Ici, des personnages et des tableaux de Raymonda (on en trouve d'autres en lien, notamment Le Lac des cygnes, Casse-Noisette, La Belle au bois dormant). On peut voir aussi parfois des scènes du ballet sur des timbres de collection.








Source: Wikipédia.ru


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