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Le Ballet du Bolchoï à Paris - janvier 2008
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sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
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MessagePosté le: Ven Jan 11, 2008 1:00 am    Sujet du message: Répondre en citant

Maria Alexandrova fera son retour sur scène demain dans Jeu de cartes et la première Ombre de La Bayadère.


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haydn
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Messages: 26517

MessagePosté le: Ven Jan 11, 2008 1:16 am    Sujet du message: Répondre en citant

Comme toujours, pas de critiques sur une générale ; celle du programme Ratmansky - Petipa - Petit a eu lieu ce soir.

Simplement, à l'attention des personnes qui y ont assisté, il faut savoir que c'était véritablement une séance de travail, avec des interventions, des interruptions (les danseurs ont parfois "marqué"), qui n'avait rien à voir avec un spectacle "fini".

Un conseil toutefois, ne ratez sous aucun prétexte Svetlana Zakharova et Denis Matvienko dans l'acte des Ombres de la Bayadère. Vous risqueriez de le regretter longtemps... Wink


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akhmatova



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MessagePosté le: Ven Jan 11, 2008 1:24 am    Sujet du message: Répondre en citant

Haydn, il faudra faire attention à ce que vous dites. La dernière fois que vous avez fait ce type de remarque (Il était question de Nicolas Leriche), il était impossible de suivre votre conseil pour cause de grève. Et là, ça va être l'angoisse jusqu'au levée du rideau …


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haydn
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Messages: 26517

MessagePosté le: Ven Jan 11, 2008 1:35 am    Sujet du message: Répondre en citant

Il n'y a pas de préavis de grève...!!! Mais pour le Drosselmeyer de Nicolas Le Riche, c'était effectivement très dommage. Embarassed


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sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
Messages: 22086

MessagePosté le: Ven Jan 11, 2008 11:23 am    Sujet du message: Répondre en citant

Avant les Ombres... Wink , Ivan Vasiliev dans le Pas des Esclaves:
adage (avec Nina Kaptsova): http://www.youtube.com/watch?v=bo2Pjf2g6Js
variation: http://www.youtube.com/watch?v=VFfzUisZU3w ou: http://www.youtube.com/watch?v=uDq8K285UfE
coda: http://www.youtube.com/watch?v=RF34LvI2TJw


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sophia



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MessagePosté le: Ven Jan 11, 2008 6:30 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Quelques mots sur le "Casse-croûte" consacré au Bolchoï et plus précisément à la reconstruction du Corsaire. Pour Laurence, je précise qu'il est assez difficile d'en rendre compte de manière formelle, la discussion ayant pu paraître parfois un peu décousue... L'historien Vadim Gaevsky a commencé par dire son émotion de voir Le Corsaire représenté à nouveau à Paris, la ville qui a vu sa création, le voyage dans le temps ayant bien plus d'importance à ses yeux que le voyage dans l'espace... Il a par ailleurs apporté d'intéressantes explications sur la genèse du Corsaire de Petipa qu'il a présenté comme une sorte de synthèse et d'aboutissement de versions antérieures où le mimodrame (mais aussi la danse masculine si l'on se réfère au titre) prenait une place considérable. Le Corsaire de Petipa privilégie la danse tout en conservant la pantomime caractéristique des anciens ballets et place surtout la femme et la danse féminine au coeur de l'oeuvre. De ce point de vue, la scène du Jardin animé constitue une rupture fondamentale qu'il était absolument nécessaire de conserver pour rendre compte de ce qu'est le style de Petipa. Les variations masculines sont ainsi toutes postérieures à Petipa, même si des doutes demeurent là-dessus. Alexeï Ratmansky a ajouté à ce propos qu'eu égard à la cohérence du livret, il était difficile de faire danser Conrad en-dehors de la scène de la caverne, puisque dans le deuxième acte, il se dissimule sous le costume d'un derviche et dans le troisième acte, il est enchaîné... A cet égard, il a précisé que Le Corsaire correspond davantage au style du Mariinsky qu'à celui du Bolchoï, mais que le faire entrer au répertoire du Bolchoï permettait aux danseurs moscovites de travailler une virtuosité et une précision qu'on ne trouve pas dans les ballets de Grigorovitch qui constituent une partie importante du répertoire du Bolchoï. Il a d'ailleurs également été question de l'évolution de la danse et de la technique des danseurs depuis le XIXème siècle: Pierre Lacotte et Vadim Gaevsky ont nuancé le lieu commun qui consiste à dire que la technique est meilleure aujourd'hui qu'hier: certes les jambes montent plus haut et l'on danse plus grand, mais les danseurs ont perdu en vitesse et le travail d'allegro a baissé en qualité au fil du temps (les tempi sont de ce point de vue beaucoup plus lents aujourd'hui). Beaucoup de remerciements (et de questions) ont été adressés à Alexeï Ratmansky de la part des spectateurs présents, et n'eût été la programmation de la générale, la conférence aurait probablement duré plus longtemps, je pense. Celui-ci a également rapidement évoqué la chorégraphie de Jeu de cartes et son projet de reconstruire la ballet de Vainonen, Flammes de Paris.


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laurence



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Localisation: Paris

MessagePosté le: Ven Jan 11, 2008 7:59 pm    Sujet du message: casse croute Répondre en citant

Merci Sophia c'est vraiment gentil je pense que le sujet était important et traité par des conférenciers étonnants et savants et sans doute cela vous a semblé court Dommage de ne pas prévoir des conférences de ce type plus souvent Je trouve que ce lieu pourrait aussi servir à ce genre de manifestations à des heures ou les gens ne travaillent pas c'est aussi un moyen d'ouvrir vers un plus large public et la danse en a tellement besoin
La salle était elle remplie?


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haydn
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Inscrit le: 28 Déc 2003
Messages: 26517

MessagePosté le: Sam Jan 12, 2008 12:53 am    Sujet du message: Répondre en citant

Compte rendu de la première du programme Alexeï Ratmansky / Marius Petipa / Roland Petit à suivre dans la nuit ou demain matin, avec comme sommet de cette soirée où de nombreuses personnalités de la politique et des arts s'étaient déplacées au Palais Garnier, les prestations superlatives de Svetlana Zakharova, et encore plus, de Denis Matvienko dans l'acte des Ombres de la Bayadère. Personnellement, je n'avais jamais vu auparavant un Solor d'un pareil niveau. Ceux qui ont eu la chance de voir sur scène un Vladimir Vassiliev ou un Mikhaïl Barychnikov, auront peut être des points de comparaison pertinents. Seul regret, l'orchestre, une fois de plus. Au retour de l'entracte, une partie du public a d'ailleurs manifesté quelque mauvaise humeur à l'endroit des musiciens...


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Swann



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Messages: 193

MessagePosté le: Sam Jan 12, 2008 1:04 am    Sujet du message: Répondre en citant

Soirée magique avec la 1ère de Petit/Ratmanski/Petipa....
Très beau Jeu de cartes, vif, enlevé, belle chorégraphie, Bayadère à couper le souffle, entre le corps de ballet, les 3 ombres, Zakharova éblouissante et Matvienko impressionant dans ses sauts comme dans ses pirouettes (ah les tours à la seconde...), et enfin magnifique Dame de Pique, avec une interprétation extraordinaire de Tsiskaridzé et encore plus d'Ilse Liepa...
Courez-y !


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blaesm



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Messages: 181

MessagePosté le: Sam Jan 12, 2008 1:09 am    Sujet du message: Répondre en citant

Un petit aperçu de la générale au journal de 20h de TF1 ce soir http://videos.tf1.fr/infos/media/jt/0,,3680789,00-theatre-bolchoi-visite-paris-.html


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sophia



Inscrit le: 03 Jan 2004
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MessagePosté le: Sam Jan 12, 2008 1:31 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Quelques petits commentaires sur la première du second programme du Bolchoï, un programme "mixte" donc - comme il est d'usage de dire - qui réunissait des chorégraphes et des oeuvres aussi dissemblables que celles d'Alexeï Ratmansky, Marius Petipa et Roland Petit.

Jeu de cartes est un ballet abstrait d'Alexeï Ratmansky, sur la musique éponyme de Stravinsky, qui ouvrait la soirée. Conçue dans un style proche de certaines chorégraphies de Balanchine, comportant notamment quelques réminiscences ou clins d'oeil à Rubis, cette oeuvre assez brève réunit sur scène quinze danseurs (sept filles et huit garçons) dans des ensembles construits sans hiérarchie (des étoiles côtoient des solistes, voire des danseurs de corps de ballet), qui n'isolent jamais véritablement un interprète en particulier au détriment des autres. La chorégraphie, légère et enlevée, très exigeante physiquement et techniquement, séduit par son côté "glamour" et spectaculaire et se prête de ce fait assez bien aux qualités des danseurs du Bolchoï qui brillent ici par une énergie, une endurance et une vitesse d'exécution remarquables. A les voir évoluer dans ce tourbillon chorégraphique qui ne les laisse guère souffler un seul instant, on est particulièrement impressionné par les filles qui, étoiles ou corps de ballet, possèdent toutes de fortes personnalités scéniques, en plus de physiques magnifiques; les garçons, quant à eux, présentent des ensembles très puissants et disciplinés.

L'acmé de la soirée résidait toutefois dans l'acte des Ombres de La Bayadère, qui nous a fait regretter de ne pas revoir le ballet dans son intégralité, surtout avec une Nikiya et un Solor de ce niveau-là, à des années-lumière, il faut bien le dire, de ce qu'on a l'habitude de voir à Paris. La descente des Ombres fut évidemment un moment mémorable, avec ses danseuses évoluant dans une harmonie et une discipline admirables, littéralement portées par la musique et la poésie de la scène. Ces ombres-là, on les connaissait déjà il est vrai, mais il faut avouer qu'elles possèdent toujours le même pouvoir de sidération et de fascination... Quant aux solistes, Svetlana Zakharova et Denis Matvienko, ils se sont livrés à une véritable démonstration d'évidence. Zakharova parvient très bien à gommer ici la dimension glamour et éclatante de sa personnalité scénique pour se métamorphoser en une sublime vision poétique, et si ses extensions maximales peuvent légitimement agacer dans cette scène, il y a une telle superbe assurance dans sa danse, conjuguée à un lyrisme et à un style admirables - le grand style aristocratique russe - qu'on ne peut que saluer respectueusement une telle interprète. Matvienko était à ses côtés un Solor absolument fabuleux, investi, passionné, avalant l'espace, possédant le romantisme et la fougue du chef de guerre indien, faisant montre enfin dans sa danse d'un brio et d'une virtuosité qu'on ne voit guère que chez des interprètes exceptionnels (c'est la deuxième fois que je le vois dans ce rôle, la première fois, c'était à l'occasion d'une représentation du ballet complet avec Svetlana Lunkina, et vraiment, il n'y a rien à dire, il est idéal, un Solor impeccable!). Trois Ombres de grande classe accompagnaient ces deux solistes: même si aucune ne possède vraiment le caractère éthéré et spirituel de ces créatures confinant à l'abstraction et sorties de l'imaginaire de Petipa, le niveau des prestations de chacune était exceptionnellement élevé. Les ensembles qui les réunissaient ont su par ailleurs charmer par l'harmonie physique et stylistique qui s'en dégageait, aucune ne cherchant à se mettre plus en avant que ses collègues (une gageure pour des étoiles ou des premières danseuses!). Individuellement, Ekaterina Shipulina en deuxième Ombre s'est révélée techniquement la plus brillante, mais particulièrement rayonnante, son interprétation paraissait un peu excessive du point de vue du style... Maria Allash, impeccable en troisième Ombre, était peut-être la plus proche de l'idéal qu'on attend ici, même si elle m'a semblé manifester un peu trop d'énergie dans ses sauts. Maria Alexandrova en première Ombre était quant à elle légèrement en-deçà de son niveau habituel (dans la diagonale d'arabesques sautées notamment).

On ne s'étendra pas sur La Dame de pique, ballet de Roland Petit que je connaissais déjà pour l'avoir vu à deux reprises à Londres, et qui ne gagne peut-être pas à être revu éternellement. Conçu pour être l'apothéose de la soirée (programmé en fin de spectacle) avec un Roland Petit ne se privant pas de venir saluer et un Nikolaï Tsiskaridze toujours très "star", La Dame de pique peine toutefois à dissimuler ses faiblesses chorégraphiques, dans les parties dédiées au corps de ballet, mais aussi dans les soli (quel est le sens de cette accumulation de virtuosité, bien peu musicale, dans certains passages? se demande-t-on ainsi à plusieurs reprises...). On se dit aussi parfois que Roland Petit a le don pour s'attacher aux plus grandes oeuvres littéraires (Proust, Pouchkine...) et rendre celles-ci triviales, quand ce n'est pas ridicules. Evidemment, il reste les deux rôles autour desquels le ballet est construit, celui d'Hermann et dans une moindre mesure celui de la Comtesse: on soulignera donc à cet égard la performance dramatique remarquable, très personnelle et souvent saisissante, de Nikolaï Tsiskaridze (malgré une évidente dimension narcissique conférée au rôle d'Hermann conduisant inexorablement à une forme de surjeu qui n'est pas sans irriter parfois, quand elle ne donne pas envie de sourire...), et plus encore celle d'Ilse Liepa, extraordinaire interprète à la plastique fascinante. N'oublions pas non plus Svetlana Lunkina qui montre une grande finesse d'interprétation dans le petit rôle de Lise, au sein d'un ballet qui ne brille justement pas par sa subtilité. Le principal intérêt de celui-ci - d'aucuns diront le seul - réside alors dans les possibilités dramatiques qu'il offre à ses interprètes...


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haydn
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MessagePosté le: Sam Jan 12, 2008 2:06 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Le second programme de la tournée du Bolchoï proposait une affiche composite, réunissant des œuvres d’Alexeï Ratmansky, Marius Petipa et Roland Petit.

Plus que pour le Corsaire, la jet set parisienne s’était déplacée en nombre au Palais Garnier, Ministre de la Culture en tête. Il est vrai qu’au spectacle de ballet proprement dit venait s’ajouter l’inauguration officielle de l’exposition que l’Opéra National de Paris consacre actuellement à Roland Petit.

La soirée s’ouvrait sur Jeu de cartes, un ballet chorégraphié par Alexeï Ratmansky sur la musique éponyme de Stravinsky. Si on connaissait déjà les talents créatifs d’Alexeï Ratmansky au travers de ses reconstitutions de chefs d’œuvre du répertoire post-romantique et soviétique (Le Corsaire, Le Clair ruisseau, Le Boulon), ses réalisations ex-nihilo ne nous étaient pas encore familières.

Force est de reconnaître que Jeu de cartes nous a laissés quelque peu dubitatifs. La chorégraphie d’Alexeï Ratmansky est bien construite, efficace, respectueuse de la musique ; le dispositif scénique conçu par Igor Chapurin est sobre mais réussi sur le plan esthétique. Les danseurs du Bolchoï sont parfaits – il n’est pas question d’évoquer ici des solistes en particulier, car l’ouvrage est destiné à un ensemble, qui se doit de travailler de concert, sans que des individualités émergent au détriment de l’unité du groupe. Alors? Jeu de cartes s’avère d’emblée un pastiche de Balanchine - sans qu’il y ait par ailleurs d’intention parodique. Le choix de la musique – du Stravinsky période néoclassique -, les costumes – des justaucorps plus ou moins académiques – la gestuelle – déhanchés «jazzy», poignets «cassés», poses photographiques, tout, jusqu’au célèbre «soleil» qui conclut Apollon, évoque le maître – russe! – de la danse américaine. Si Alexeï Ratmansky démontre qu’il a parfaitement intégré tous les poncifs du style balanchinien, et qu’il est à même de les reproduire de manière crédible et convaincante, on peut tout de même s’interroger sur l’intérêt et la finalité d’un tel exercice. Pourquoi ce contrafactum, alors qu’on aurait pu tout simplement faire entrer un grand ballet de Balanchine au répertoire du Bolchoï? Jeu de cartes a du moins le mérite de poser la question de l’avenir de la création chorégraphique en Russie. Le Bolchoï, aussi bien que le Mariinsky, ont su magnifiquement préserver leur style et leur patrimoine, en dépit des récentes vicissitudes de l’histoire, et les deux célèbres compagnies brillent encore et toujours au firmament de la danse mondiale, surclassant avec une insolente réussite toutes leurs plus prestigieuses «rivales». Le défi qu’elles devront à présent affronter est, à côté de la perpétuation de la tradition et de la gestion de l’héritage de Marius Petipa et des grands chorégraphes de l’ère soviétique, la constitution, pour le siècle à venir, d’un répertoire contemporain spécifiquement russe. Entre la nostalgie du passé et la tentation de s’inspirer de réalisations occidentales plus ou moins réussies, la voie ne sera pas aisée à trouver. Avec Jeu de cartes, Alexeï Ratmansky (se) pose assurément les bonnes questions, mais sans y apporter de réponse véritablement satisfaisante.

L’avenir de la danse russe ne se situe sans doute pas non plus dans la pompeuse et vaine Dame de pique créée par Roland Petit pour Nikolaï Tsiskaridzé et la troupe du Bolchoï en 2001. Que sont devenus les grands élans créatifs des années 1945-1970, ceux de Carmen, du Loup, des Forains, de Turangalîla, avec lesquels Roland Petit, tout comme son rival de toujours, Maurice Béjart, avait su faire du ballet un art mêlant le savant et le populaire, ouvrant les portes de la danse classique au public le plus large?

Sa dernière mouture de la Dame de pique ne rend justice ni à Tchaïkovsky, ni à Pouchkine, dont la nouvelle est subrepticement détournée : le secret que les cartes, par l’entremise de la Comtesse, révèlent à Hermann, joueur compulsif, n’est autre que la vraie nature de sa sexualité, et le ballet s’achève sur une scène de jubilation aussi morbide que tonitruante, accompagnée par le terrifiant Allegro molto vivace de la Symphonie Pathétique, que Tchaïkovsky avait, lui, voulu conclure sur un tragique Lamentoso.

La Dame de pique revue par Roland Petit est entièrement construite autour de la personnalité de Nikolaï Tsiskaridzé, et l’ouvrage n’existe que par et pour le danseur étoile du Bolchoï, qui s’est pour sa part acquitté de sa tâche de manière convaincante, même si la chorégraphie pousse délibérément l’interprète du rôle d’Hermann à un narcissisme un peu dérangeant. Nikolaï Tsiskaridzé possède un tempérament accusé, un sens du théâtre et une présence scénique qui emportent finalement l’adhésion. Il en va de même de la somptueuse et effrayante comtesse d’Ilze Liepa. Svetlana Lunkina est une Lise promptement délaissée et trucidée, mais on se dit, au vu de ses qualités lyriques, qu’elle ferait une émouvante Marie si d’aventure l’Opéra de Paris décidait de la convier à une future reprise de Clavigo.

Pour la partie centrale de la soirée, le Bolchoï revenait à ses idiomes, avec un somptueux Acte des Ombres tiré de la Bayadère restituée dans la version de Iouri Grigorovitch elle-même basée sur le travail d’Olga Iordan et Fedor Lopoukhov.

Pour l’occasion, la compagnie russe avait mis les petit plats dans les grands, avec pas moins de quatre étoiles et une première soliste pour servir avec ô combien de réussite cette page célèbre de l’histoire de la danse classique.

Le couple Nikiya / Solor était incarné par Svetlana Zakharova et Denis Matvienko, véritablement éblouissants. Les équilibres de la reine du Bolchoï n’ont pas leurs pareils et ses déboulés sont d’une vivacité à couper le souffle. Irréprochable sur le plan technique, Mlle Zakharova l’était aussi sur le plan artistique, arborant les expressions sobres qui conviennent au spectre de la princesse indienne. A ses côtés, Denis Matvienko a incarné le Solor le plus spectaculaire qu’il nous ait été donné de voir. Stimulé par le charisme d’une partenaire à sa mesure, il a, trois quart d’heure durant, donné le maximum de lui-même, sans jamais paraître à la peine. Ses manèges de grands-jetés et de doubles-assemblés étaient d’une puissance et d’une propreté admirables. A cela s’ajoutaient des réceptions silencieuses et une gestuelle très élégante, d’autant plus remarquables si l’on considère la formidable énergie que M. Matvienko insuffle à sa danse. Chapeau bas.

Distribution de grand luxe également pour le trio des Ombres, interprété par Maria Alexandrova, Ekatarina Shipulina et Maria Allash. Cette dernière est sans doute celle qui incarne le plus parfaitement l’évanescence, l’immatérialité de ces femmes venue d’un autre monde. Sur le plan technique, la suprématie revient à Ekatarina Shipulina, à laquelle on pourra simplement reprocher – pour une fois – un bonheur de danser un peu trop rayonnant dans cette scène irréelle.

On louera une fois de plus la remarquable qualité du corps de ballet du Bolchoï, avec des lignes quasi parfaites, des mouvements d’ensemble à la précision irréprochable, alliant rigueur et moelleux, discipline et génie artistique. Par ailleurs, dans la version du Bolchoï, la descente des Ombres venues des sommets mystérieux et glacés de l’Himalaya, est particulièrement saisissante. Les mouvements sont délibérément décalés d’un rang sur deux, et les ondes à la blancheur diaphane ainsi générées composent un tableau d’une grande force poétique.

Seul regret, les criantes insuffisances de l’orchestre Colonne ; elles ont d’ailleurs provoqué quelques manifestations d’humeur dans le public au retour du second entracte. Heureusement, les musiciens ont fait preuve de davantage d’application dans la Symphonie pathétique, partition qui outrepasse toutefois quelque peu leurs possibilités techniques.




Dernière édition par haydn le Dim Jan 13, 2008 12:50 am; édité 1 fois
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haydn
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MessagePosté le: Sam Jan 12, 2008 9:54 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Quelques impressions de la représentation de ce samedi 12 janvier 2008 (14h30).


Tout d’abord, quelques mots de l’orchestre, dont la prestation s’est très sensiblement améliorée par rapport à celle de la veille. Les musiciens ont peut-être eu vent du mécontentement d’une partie du public, et ont manifestement fait du zèle aujourd’hui. Certes, l’orchestre Colonne n’est pas devenu la Philharmonie de Berlin par quelque coup de baguette magique, mais il s’est plutôt honorablement tiré de Jeu de cartes et de la Symphonie pathétique.

Sans pour autant régler la question de la légitimité artistique d’un pastiche de Balanchine, il faut reconnaître qu’à la seconde lecture, la chorégraphie d’Alexeï Ratmansky pour Jeu de cartes tient plutôt bien la route. L’ensemble est solidement construit, plaisant au regard, et toujours bien servi par les danseurs du Bolchoï, au nombre desquels Svetlana Lunkina et Natalia Osipova brillaient particulièrement.


L’acte des Ombres de la Bayadère était cette fois confié à Nadejda Gracheva (Nikiya) et Andreï Uvarov (Solor). Il était quasi-impossible de succéder au couple exceptionnel formé par Svetlana Zakharova et Denis Matvienko, et l’on ne pouvait attendre aujourd’hui la réédition d’une performance d’un tel niveau. Néanmoins, Mlle Gracheva, sorte d’archétype de la danseuse russe, et M. Uvarov nous ont gratifiés d’un spectacle d’un bon niveau technique et artistique, qui aura en tout cas ravi le public. Les variations des Ombres, confiées respectivement à Ekaterina Krysanova, Natalia Osipova et Anna Nikulina ont été très bien exécutées, avec peut-être une préférence personnelle pour celle de Mlle Krysanova ; en revanche, les ballerines ont été quelque peu à la peine dans le Pas de trois liminaire, où le travail d’ensemble n’était pas irréprochable et où quelques décalages mineurs avec la musique ont pu être observés.

La véritable surprise de cette matinée est toutefois venue de l’interprétation que Dimitri Gudanov nous a livrée du rôle d’Hermann, dans la Dame de pique, de Roland Petit. Sa conception du personnage est très différente de celle de Nikolaï Tsiskaridzé. M. Gudanov se montre beaucoup plus proche du texte de Pouchkine, et s’attache à incarner véritablement un joueur compulsif, prêt à tuer et à mourir pour assouvir sa passion dévorante. Les sous-entendus sexuels sont largement gommés, la danse est peut-être moins raffinée dans les détails, mais plus percutante, plus spontanée dans ses emportements, et finalement plus convaincante sur le plan expressif : la folie destructrice d’Hermann est ici dépeinte avec un réalisme saisissant, qui a valu à Dimitri Gudanov une très longue ovation à l’issue de la représentation.

Le corps de ballet masculin a fait forte impression, par son unité parfaite, dans le premier et surtout le second tableau («la salle de jeu»). En revanche, le placement des couples dans la valse qui suit (troisième tableau : «le bal»), a semblé assez aléatoire, trahissant peut être un relâchement consécutif au rythme très serré des représentations depuis le début de cette très belle tournée parisienne du Bolchoï.


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Manu



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Messages: 65
Localisation: Russie, Moscou

MessagePosté le: Dim Jan 13, 2008 12:49 am    Sujet du message: Répondre en citant

peut etre ca depends de mentalite (ou comment ca s'appele en francais - les particularites de perception nationale?) - mais en Russie plusieurs personnes (moi aussi, oui) trouvent la Dame de Pique absolument geniale et tres tres proche a Poushkine. Vous savez - Poushkine est une idole en Russie, jamais on ne permet pas le toucher sans comrendre. Vous allez voir notre Onegine nouveau dans ce septembre et j'aimerais vraiment voir la reaction de publique francaise... Mais ca c'est plus tard.
En ce qui concerne la Dame de pique. Pour moi est compiquee a faire la discussion detaille en francais alors je voudrais juste dire quelques mots pour la defendre. Et dire que plusieurs acteurs dramatiques russes que on croit "great" en Russie (pas stars dans le sens modern mais vraiement genial) ont du se mettre a genoux (j'ai vu ca moi meme) devant Nikolay pour ce Hermann. Peut etre nous ne regardons pas ca comme un ballet proprement dit - pour nous c'est plutot du theatre dramathique, et en fait tres proche de Poushkine (qui, en fait a parle de cote sexuelle dans les relations de Hermann et comptesse).
Pardonnez-moi ce passage emotionel et erreurs en francais - je viens de revenir a Moscou il y a quelques heures.
P.S. Je pourrais raconter plus precisement que les spectateurs russes voient dans ce spectacle mais je prefere laisser a spectateurs francais chercher pourqoui on l'aime ici Smile
A Haydn. Je comprends tres bien votre reaction musicale a propos de changement des parties. Pour l'orchestre russe ca est aussi toujours genant.


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Luciana



Inscrit le: 17 Déc 2006
Messages: 8
Localisation: Paris

MessagePosté le: Dim Jan 13, 2008 1:05 am    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour à tous,

Voici un lien vers quelques vidéos bien agréables pour nos yeux, trouvé sur le forum du Bolshoï :

http://www.vimeo.com/601902

Bon visionnage ! Very Happy


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