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chien en peluche
Inscrit le: 29 Oct 2011 Messages: 1967
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Posté le: Lun Fév 17, 2025 12:43 am Sujet du message: |
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In the "rejection" pas de deux that close the ballet, Tatiana's conflicting feelings stab at her. Onegin circles his arms round her, rather as the hapless Jasper did to Poll, but here Onegin falls at her feet, and every time she resists, he pulls up her toward him. Some steps repeat parts of the dream sequence to great effect. The central section of the duo is danced to marvellous broad melody from Francesca da Rimini. Tchaikovsky was portraying the shades of Francesca and her lover Paolo trapped in the second circle of hell's inferno, and this music's mood is ideally suited to the ballet' closing scene. (Ashley Killar, Cranko. The Man and his Choregraphy, Matador, 2022, p.255.) |
Dans le programme publié en 2009, ctdr. au moment de l'entrée au répertoire de l'ONP, il est écrit : "Scène II LE BOUDOIR DE TATIANA Francesca da Rimini (1876), extraits de l'ouverture symphoniqe". La même indication sur la feuille de distribution en 2009.
Plus exactement, d'après la liste de "Kurt-Heinz Stolze's major sources from Tchaikovsky's oeuvre" indiquée dans la petite brochure insérée dans le coffret de deux CDs enregistrés par le "Staatsorchester Stuttgart" (sous la direction de James Tuggle, Arimato ACD 6048, 1999)* : Akt III N°28 Pas de deux Francesca da Rimini, Sinfonische Fantasie nach Dante op.32 (1876); Romeo und Julia, Vokalsze-ne für Soprano, Tenor und Orchester o.op (1893).
Pour L'Histoire de Manon aussi, les programmes de l'ONP sont malheureusement de plus en plus mal rédigés au fur et à mesure.
*Ces CDs sont ce que j'ai acheté sur place quand je suis allée voir les trois représentations d'Onéguine du Ballet de Stuttgart à Tokyo en 2018.
Dernière édition par chien en peluche le Lun Fév 17, 2025 5:13 pm; édité 1 fois |
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Sarra
Inscrit le: 29 Sep 2009 Messages: 272
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Posté le: Lun Fév 17, 2025 2:40 pm Sujet du message: |
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tuano a écrit :
La fin de l'opéra Eugène Onéguine sonne un peu platement, sans doute pour coller à la banalité de la vie des protagonistes, à deux doigts de vivre le grand amour mais enfermés dans des vies mornes sans passion.
La fin de Francesca da Rimini est au contraire très dramatique et expressive.[/quote]
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Certes le tempo de l'épisode final de Francesca da Rimini est plus vif que celui de la scène finale d'Eugène Onéguine : Allegro vivo, puis un peu plus rapide, poco più mosso, contre Andante molto mosso (encore que l'orchestre ait parfois des emportements, et que les accords finaux soient tout de même impressionnants de pathétique*) mais c'est seulement -Tuano en a évidemment conscience !🙂- parce que l'Enfer de Francesca et de Paolo est plus tempétueux (d'après Dante) que l'enfer séculier, dans leur âme, auquel sont promis désormais Tatiana et Yevguény... Mais ces derniers sont bien sûr des personnages tout aussi tragiques que les premiers. Et leur vie en ce monde sera tout autant épouvantable que dans le cercle de l'Enfer celle des amants assassinés. -Dans leur esprit, la tempête figurative sera perpétuelle.
"Voyez le sort des mortels !" "Voyez le pouvoir des dieux !" commentaient les choreutes...
Le jeu des dieux prend d'abord, pour Onéguine, la forme du spleen, de la "khàndra" qui l'aveugle et l'empêche de discerner son amour -immédiat !- pour Tatiana. Enfin l'un et l'autre sont victimes du pouvoir du dieu caché des conventions, omnipotentes à leur époque (et de leur propre noblesse d'âme -or : "on ne se refait pas") : la foi orthodoxe ne permet pas le divorce (cf la tentative de ruse "jésuistique" d'Hélène Kouraguina, devenue Hélène Bézoukhova, dans Guerre et Paix), et aucun des deux ne s'abaissera à une relation adultère.
Leur amour est désormais réciproque. (Il ne s'agit pas du tout d'un amour asynchrone : l'une aimant, l'autre pas ; puis celui-ci aimant, celle-là plus du tout, comme je l'avais lu il y a deux ou trois ans, je ne sais plus où, dans une critique de l'opéra 🙄. -qui aurait pu valoir aussi pour le ballet.)
Eugène s'est enfin aperçu de son amour pour Tatiana, et celle-ci l'aime toujours ("Я вас люблю (к чему лукавить?)" -"Je vous aime toujours (pourquoi le dissimuler?), mais il est maintenant impossible de changer la situation où le destin les a menés : le futur horriblement morne de deux amoureux à jamais séparés en ce monde.
Cette "platitude" à laquelle fait allusion Tuano, c'est leur enfer même. Les regrets perpétuels : leur souffrance sans fin (en ce bas monde). Ni l'un ni l'autre ne sont emportés au sens propre par les tourbillons que symbolise la musique à la fin de Francesca da Rimini, mais dans l'âme de Tatiana, les mots qu'elle chante -et ses pas à la fin du ballet-, mots ayant l'esprit sinon la lettre de ceux du roman-poème, en sont l'équivalent : "А счастье было так возможно,/Так близко!.. etc." "Et le bonheur était si possible, si proche !… Mais mon sort est fixé. J’ai peut-être agi sans prudence… Ma mère me suppliait en pleurant… toutes les destinées m’étaient égales… je me mariai." [traduction Tourgueniev]. C'est tragique. Et il me semble que la musique est bien à l'unisson de ce tragique-là, qu'elle l'exprime parfaitement...
Pouchkine a écrit la fin d'Eugène Onéguine en même temps qu'il rédigeait (selon Gustave Aucouturier) la nouvelle Doubrovsky. On y trouve une situation exactement semblable... Doubrovsky le jeune, Vladimir Andréiévitch, vingt-trois ans, s'étant fait brigand pour venger son père spolié, est amoureux de Marie Kirilovna, dix-huit ans, fille du spoliateur, Kiril Troïékourov... Et celle-ci s'éprend de lui aussi. Or Troïékourov entend la marier au prince Viéréïsky, un vieux général pareil à "Grémine" (lequel n'existe qu'à peine, et non nommé, dans le poème-roman), que Marie a en horreur -tout comme Tatiana n'a aucun amour pour Grémine. Elle prévient son amoureux de la secourir, de l'enlever. Mais une circonstance fortuite -méchanceté des dieux, des "démons du hasard"- fait qu'il arrive après la cérémonie. Lui et sa troupe encerclent le coupé emmenant les époux -le mari est épargné, de volonté. "Vous êtes libre !" dit Doubrovsky à Macha. "Non, répondit-elle, il est trop tard, je suis mariée, je suis la femme du prince Viéréïsky. (...) J'ai juré. Le prince est mon mari. (...) Je vous ai attendu jusqu'à la dernière minute, mais maintenant il est trop tard..."
C'est évidemment un calque de la conclusion d'Eugène Onéguine : deux êtres amoureux l'un de l'autre (peut-on imaginer que Macha ait cessé d'aimer Volodka en une minute !), mais que la force du destin empêche d'être réunis.
Dans les deux cas, l'enfer des deux couples que la méchanceté du sort empêche d'être réunis n'est pas l'ouragan furieux de Francesca et Paolo, mais il n'est pas moins atroce -et en principe l'auditeur/spectateur le ressent ainsi, quel que soit le tempo de la partition... Il me paraît certain que Tuano l'a compris ! 🙂 -mais qui comprendrait mal son commentaire pourrait peut-être penser que non...😏
Par ailleurs cette similitude montre bien qu'Onéguine, le ballet, n'est pas une sorte de "drame bourgeois" où un jaloux tardif, Eugène, serait envieux du bonheur domestique de Tatiana ! -ce que peut-être une mauvaise interprétation du rôle laisserait éventuellement croire, car c'était ainsi qu'avait vu une spectatrice, dans un commentaire ici-même, il y a quelques années.
[Enfin, je me demande si ma mémoire est bonne (elle ne doit pas l'être ! 🙁), mais il me semble que le début du pas de deux final est sur une musique qui ressemble tout de même un peu à un passage de Roméo et Juliette...]
*Du moins dans le seul 🙁 enregistrement que j'ai : Bolchoï, Boris Khaikin, 1955.
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chien en peluche
Inscrit le: 29 Oct 2011 Messages: 1967
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Posté le: Lun Fév 17, 2025 5:29 pm Sujet du message: |
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J'ai lu toujours avec un grand plaisir votre message, Sarra, d'autant plus que je suis en train de relire le roman-poème de Pouchkine dans la traduction en japonais. Vos messages et vos comptes-rendus sur ce fil (vous, donc, au pluriel) m'en avait donné envie, moi ne pouvant aller aux spectacles ni du Covent Garden, ni du palais Garnier. Cette lecture m'en console un peu.
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haydn Site Admin
Inscrit le: 28 Déc 2003 Messages: 26633
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Posté le: Lun Fév 17, 2025 5:57 pm Sujet du message: |
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Sarra a écrit: |
[Enfin, je me demande si ma mémoire est bonne (elle ne doit pas l'être ! 🙁), mais il me semble que le début du pas de deux final est sur une musique qui ressemble tout de même un peu à un passage de Roméo et Juliette...] |
Pas de fausse modestie, Sarra, il y a bien un petit passage venu de Roméo et Juliette au début du pas de deux final... Votre oreille est excellente.
Sarra a écrit: |
*Du moins dans le seul 🙁 enregistrement que j'ai : Bolchoï, Boris Khaikin, 1955. |
C'est aussi l'enregistrement que je possède, avec Galina Vichnevskaïa en Tatiana. A mon avis, on n'a pas fait mieux depuis, et la direction d'orchestre est d'une exceptionnelle subtilité, Kaikin fait littéralement "voir" l'action à l'auditeur. Pour ceux qui seraient tentés, on trouve encore assez facilement cette version en CD, avec une qualité de son tout à fait acceptable. |
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sophia
Inscrit le: 03 Jan 2004 Messages: 22156
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Eva
Inscrit le: 26 Fév 2013 Messages: 379 Localisation: Suresnes
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Posté le: Sam Mar 01, 2025 11:07 pm Sujet du message: |
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C'était une soirée intense et émouvante comme on les aime.
Pour moi, cela signait également les adieux de Ludmila Pagliero que je n'aurai pas l'occasion de revoir sur scène.
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Sarra
Inscrit le: 29 Sep 2009 Messages: 272
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Posté le: Dim Mar 02, 2025 7:43 am Sujet du message: |
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Le lien vers l'interview de Mathieu Ganio dans Kommersant, signalée par Sophia. 🙂 https://www.kommersant.ru/doc/7532992?from=weekend_main
Il nous reste à attendre vos commentaires, Sophia… 🙂
Quelques passages à la fin sont presque un peu poignants (pareils à cette complainte de Queneau : C’qu'on a connu quand on est jeune / Quand on est vieux ça a disparu / Tout change rien ne dure...) -bien qu'avec fatalisme léger et sorte de demi-sourire "c'est comme ça"...
Se sentir dépassé par le tourbillon de certaines évolutions dans les faits, les conduites... Mathieu en tire sa révérence, au sens figuratif, mais réel tout autant... Il ne nous était jamais venu à l'esprit, à mon époque -vous voyez, je parle déjà au passé- que le nombre d'abonnés sur les réseaux sociaux serait facteur de renommée : pour moi, le critère principal a toujours été la qualité de ma prestation sur scène, ce qui à mes yeux a bien plus de valeur que ce que l'on publie sur les réseaux sociaux, et que les partenariats ou contrats pouvant être obtenus grâce à ça... [En substance.]
Danseur-influenceur -si jamais la modernité en arrive à ce point 🙄 !- : non, décidément ce n'est pas l'affaire de Mathieu... 😁 Il retire l'échelle...
*
[ Au risque du radotage.
Dans l'œuvre de Pouchkine, au bout de sa lecture, Onéguine n'est personnage ni déplaisant ni "repoussant"(!) ["отталкивающего персонажа", dans l'interview]. Oui, à la fin "il ne veut pas briser le cœur de Tatiana", concède le danseur -Mais il n'a jamais voulu son malheur !- "même si c'est ce qui se passe", poursuit Mathieu -En fait, tous deux ont le cœur brisé ; par des déterminismes qui dépassent de loin les raisons -un peu sommaires, avec tout le respect dû au grand artiste- qu'en donne Mathieu Ganio. -Qui cependant a peu à peu nuancé sa vision du personnage, par sa propre réflexion…
Mais, au-delà même de l'improbable hypothèse d'un répétiteur particulier imprégné d'Eugène Onéguine (sans doute un Russe, alors) qui aurait d'emblée affiné pour le danseur les subtilités du caractère et du comportement d'Eugène, il était impossible à l'art chorégraphique d'en donner une image exacte. Car, de par ses limites qui finalement sont celles du corps humain, il est impossible au langage chorégraphique de rendre les nuances, les innombrables subtilités de toute grande œuvre littéraire, donc d'Eugène Onéguine (un poème, en plus !)
Même la pantomime, les expressions du visage, le tempo particulier que les danseurs peuvent donner à leurs pas sont des adjuvants insuffisants pour doter la danse d'une expressivité qui en serait la traduction stricte (de même qu'il est impossible à la littérature de "traduire" en mots la musique, qui la dépasse par l'infinité des nuances émotionnelles dont elle est capable, et avant tout par l'immanence de l'émotion qui est son propre).
Le vocabulaire et la syntaxe de toute langue dépassent -de beaucoup !- en mots et en potentialités de combinaisons expressives les possibilités de n'importe quelle chorégraphie. Le ballet narratif n'a que très peu de degrés de liberté, et réduit forcément toute œuvre littéraire à une diégèse assez serrée aux entournures...
Croire être devant l'authentique Onéguine (qualifié de bonne foi par Mathieu Ganio, voir épithètes ci-dessus) au travers du ballet de Cranko, c'est comme, par exemple, être face à un squelette féminin auquel un carabin facétieux aurait donné contrapposto, légère inclinaison de crâne, longue perruque rousse, etc., et nous prierait d'y voir la Vénus de Botticelli...
Il est vrai cependant que de la scène finale du ballet éclosent parfaitement tous les sentiments, les successions d'abandons et de réticences, les gestes d'amour lancés puis vite répudiés, les élans et, comme une douleur qu'on s'inflige presque aussitôt, l'arrachement inverse de ces élans, en un mot tous les tourments contenus dans les paroles de Tatiana.
Bien interprétée, elle est facilement aussi bouleversante que dans le livre.
Mais comment Cranko "traduit-il" l'ultime phrase ? Par un bras tendu vers la porte (geste dont une mauvaise interprétation, ou une mauvaise perception, peut facilement faire un : "Hors d'ici !" rageur)... C'est tout ce qu'il a trouvé dans son sac à "mots chorégraphiques", et c'est non seulement ridicule -moindre mal- d'inexactitude littérale (car c'est Tatiana qui sort et laisse Eugène pétrifié dans son désespoir absolu -lui n'a absolument plus rien !), mais, près du sacrifice inouï dont tout lecteur du poème a compris, simplement parce que ces mots ultimes le suggèrent avec une “clarté lugubre”, que Tatiana se l'imposait sous l'effet d'une force extérieure l'écrasant, pitoyable de pauvreté.
Marie-Ange a écrit ici (à l'époque du Rouge et le Noir je crois), ce qu'elle avait un jour entendu Van Manen dire : sans programme en mains, sans décors sur scène et sans costumes aux danseurs, le spectateur aurait du mal à savoir quel livre il est en train de lire... [🙂]
On ne peut mieux exprimer l'altérité idiomatique entre les deux arts, le littéraire et le chorégraphique, et de celui-ci à celui-là l'illusion du miroir.
Se mettre en vis-à-vis d'un écrivain immense et d'un chef d'œuvre -tout en se refusant à l'abstraction qui serait une posture d'hommage- ne grandit pas à sa dimension le chorégraphe, quel qu'il soit (et quoi qu'il en pense peut-être… ) : tout au contraire, à mon humble avis…
Pardon pour les banalités !]
Dernière édition par Sarra le Lun Mar 03, 2025 12:10 pm; édité 1 fois |
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TAHbKA
Inscrit le: 08 Déc 2024 Messages: 49
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Posté le: Dim Mar 02, 2025 1:08 pm Sujet du message: |
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@sophia, @sarra, thank you for the interviews links.
I got to see 4 casts dancing Onegin and Pagliero/Ganio were by far the best. Interpretation wise it was absolutely perfect.
The standing ovatoins that followed their every performance (I was lucky to attend 3) were absolutely deserved.
Think this video more or less sums up the 20-30 minutes of non stop applause that followed yesterday's performance.
_________________ I don't speak French and use an automatic translation to/from English. If I don't make sense it's not me:)
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paco
Inscrit le: 28 Oct 2005 Messages: 3624
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Posté le: Lun Mar 03, 2025 11:01 pm Sujet du message: |
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J'étais également à la soirée d'adieux de Mathieu Ganio samedi dernier. Représentation exceptionnelle, mémorable à plus d'un titre. Tout a fonctionné à la perfection : corps de ballet sur son 31, impeccable et engagé, Léonore Baulac excellente Olga (avec une complexité psychologique inattendue et assez inédite pour ce personnage au deuxième acte), Marc Moreau bien meilleur que quand je l'ai vu il y a deux semaines, plus fluide dans sa danse et, de fait, caractérisant davantage son Lenski.
Et bien sûr le tandem inoubliable Ganio-Pagliero : lui encore une fois un Onegin d'une richesse interprétative renversante, exprimant parfaitement l'évolution psychologique du personnage.
Et décidément, cette fois encore comme il y a deux semaines, j'ai découvert en Ludimla Pagliero une Tatiana absolument exceptionnelle, sculpturale dans une incarnation tragique du personnage, pleine de spleen (probablement la plus "spleen" que j'aie vue après Natalia Osipova). J'avoue avoir été hypnotisé par son interprétation tout au long de la représentation. Et je regrette de ne pas l'avoir davantage vue sur scène, dans d'autres rôles emblématiques, ayant un peu délaissé l'ONP pendant la décennie où la compagnie s'est éloignée de la danse classique.
Il y eut bien entendu la standing ovation de 20 minutes pour les adieux de Mathieu Ganio, où ont défilé sur scène Eleonora Abbagnato, Claire-Marie Osta, Claude de Vulpian, Brigitte Lefebvre, Amandine Albisson, Dorothée Gilbert, Benjamin Pech, Alexander Neef ...
... et, à la surprise de beaucoup, aucun homme en dehors de ces deux derniers. La salle était pourtant pleine de stars masculines, de Manuel Legris à Hugo Marchand en passant par bien d'autres danseurs actuellement dans la compagnie. Pourtant aucun n'est venu apporter son bouquet de fleurs sur scène. Au point que cela semble avoir été un choix "protocolaire" de la compagnie, sans que l'on en comprenne la signification, la justification, le pourquoi du comment ...
Dommage car cette anomalie était vraiment énorme et fortement commentée dans les couloirs à l'issue de la représentation. Décidément, je n'arrive plus à comprendre la mentalité de l'ONP, cette institituion part à la dérive ...
Mais au global ne boudons pas notre plaisir : ce fut une représentation exceptionnelle, dont je me souviendrai pendant très très longtemps ! Et une page se tourne, Mathieu Ganio ayant été un emblème pendant tant d'années, au rayonnement mondial incontestable.
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tuano
Inscrit le: 27 Mar 2008 Messages: 1204 Localisation: Paris
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Posté le: Mar Mar 04, 2025 11:10 am Sujet du message: |
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Je suis en phase avec ces impressions tout en ayant moins de recul. C'est la première fois que je voyais ce ballet et je ne suis pas sûr d'aller le revoir un jour.
J'avoue être parti avant les derniers saluts, un peu scandalisé par cette interdiction organisée des danseurs masculins à pouvoir monter sur scène. La mère et la sœur n'ont pas non plus été invitées à rejoindre le danseur ?
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paco
Inscrit le: 28 Oct 2005 Messages: 3624
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Posté le: Mar Mar 04, 2025 12:17 pm Sujet du message: |
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tuano a écrit: |
Je suis en phase avec ces impressions tout en ayant moins de recul. C'est la première fois que je voyais ce ballet et je ne suis pas sûr d'aller le revoir un jour.
J'avoue être parti avant les derniers saluts, un peu scandalisé par cette interdiction organisée des danseurs masculins à pouvoir monter sur scène. La mère et la sœur n'ont pas non plus été invitées à rejoindre le danseur ? |
Si, la mère et la soeur sont venues sur le plateau, plutôt vers la fin de la standing ovation.
Parmi les stars féminines venues saluer Mathieu Ganio sur le plateau, j'ai oublié de mentionner Agnès Letestu, resplendissante !
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PlumeDeCygne
Inscrit le: 08 Avr 2020 Messages: 14
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Posté le: Mar Mar 04, 2025 1:04 pm Sujet du message: |
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Je ne pense pas qu'il faille absolument y voir là une "interdiction organisée". Ne cherchons pas la petite bête là ou elle n'est pas.
Matthieu Ganio est un danseur exceptionnel et un grand partenaire, je pense tout simplement qu'il a voulu mettre en valeur les danseuses avec lesquelles il a vécu de beaux moments sur scène, tout simplement.
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tuano
Inscrit le: 27 Mar 2008 Messages: 1204 Localisation: Paris
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Sarra
Inscrit le: 29 Sep 2009 Messages: 272
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Posté le: Mer Mar 05, 2025 9:00 pm Sujet du message: |
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Dans Kommersant de ce jour (5 mars), un assez long article de Maria Sidelnikova sur les adieux de Mathieu Ganio.
https://www.kommersant.ru/doc/7551835?from=main
Accessible à chacun via Google Traduction, bien sûr.
"La série de représentations d'Onéguine, le ballet de Cranko sur des musiques de Tchaïkovski, s'est terminée, à l'Opéra Garnier, par une soirée exceptionnelle.
Le célèbre danseur Mathieu Ganio, star mondiale [мироваяя звезда], dont la carrière d'étoile [этуаль] est l'une des plus longues de la compagnie française, a dansé son dernier spectacle."
La journaliste note que les "adieux" sont une spécificité française. Quand en Russie les étoiles s'éclipsent discrètement, à Paris elles sont saluées par ovations et confettis dorés.
Il y avait ce soir-là, dit-elle, plus de monde que le Palais Garnier n'en pouvait accueillir : même les places sans visibilité avaient toutes été vendues...
Elle donne (comme Paco 🙂) une liste de présents remarquables : Claude Bessy (92 ans), Gilbert Mayer (90 ans), Elisabeth Platel, Sylvie Guillem, Manuel Legris, Agnès Letestu, Clairemarie Osta, Isabelle Ciaravola... Et Dominique Meyer, Brigitte Lefèvre, José Martinez -seule Aurélie Dupont était absente...
Avec le départ de Mathieu Ganio, bel homme plein de majesté, noble aristocrate aux yeux bleus, à la présence artistique et au charisme marqués, incarnation pendant presque vingt-cinq ans des traditions et des valeurs des meilleurs danseurs français du XXème siècle, c'est toute une époque qui se clôt...
Selon la journaliste, Mathieu a hérité de sa mère le lyrisme et la grâce, de son père le talent dramatique et la prestance. Il n'a jamais recherché la virtuosité comme fin : la perfection l'intéressait plus que le spectaculaire. Aux sémillants doubles sauts de basque, il préférait la pureté d'une cinquième, d'un développé.
Au contraire de sa mère ("dont l'apparence angélique était trompeuse") inspirée par l'ardent et passionné Dionysos, Mathieu a été gouverné par le sage Apollon : carrière à l'Opéra sans conflits ni heurts avec les directions.
Notant la simplification extrême de l'Eugène Onéguine de Pouchkine par Cranko (plaçant en épigraphe de son ballet un aphorisme inexistant chez l'auteur russe...), qui en fait une lecture passe-partout, Maria Sidelnikova écrit que cependant les étoiles aiment beaucoup en danser les adagios somptueux : Natalia Makarova, Manuel Legris, Isabelle Ciaravola ont choisi ce ballet pour leurs adieux...
Après quelques mots sur la distribution, très beau paragraphe d'hommage à Ludmila Pagliero (qui elle aussi partira bientôt..), "dont le talent d'actrice tragique, la confiance absolue en son corps et en son partenaire ont rendu ténue la frontière entre la ballerine et son personnage : l'admiration artistique et humaine de Ganio transparaissait dans chaque mouvement.
Le désespoir de la séparation devint le point culminant du pas-de-deux final : Ludmila se précipita sur la scène comme une bête pendant plusieurs secondes, avant de se figer dans un cri solitaire et silencieux, pleine de regrets.
Regrets pour l'amour perdu. Mais certainement aussi regrets pour une carrière finalement bien courte..."
Mathieu Ganio, poursuit-elle, a certainement éprouvé un sentiment semblable mais n'en a rien laissé paraître. Au cours de la représentation, l'artiste a incarné à la perfection tous les traits qu'il serait possible d'attribuer au personnage d'Onéguine, sauf un ! qu'il a résolument ignoré : l'égoïsme... -car ce soir-là Mathieu s'est donné à fond pour sa partenaire, pour les autres artistes, pour le public.
Conclusion sur les réactions de ce public, sur les manifestations de l'émotion générale, dont celle de "trois générations de ballerines" offrant avec gratitude des bouquets pour Onéguine -et pour Albrecht, Siegfried, des Grieux, Rodolphe, Armand Duval, Caligula, etc...
Article à lire en entier dans Kommersant de ce jour, donc.
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