ElenaK
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Posté le: Dim Mar 22, 2020 2:31 am Sujet du message: |
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"Нам не дано предугадать, как слово наше отзовётся..."
J’aurais pu le précipiter à expliquer que ma réflexion ne concernait pas vraiment les annulations des spectacles, mais tout ce qui ce passe au sens globale (c’est ce que je voulais faire après la réplique de Paco), mais après, j’ai pensé à quoi bon d’écrire des évidences pour justifier une autre évidence, surtout au moment où le sens critique risque de céder immédiatement face à l’émotionnel. De toute façon, chacun interprète les paroles des autres à travers le prisme de son propre vécu. Je retourne donc à de jolies choses qui sont la raison d’être de Dansomanie.
Là encore, j’aurais pu commencer par quelque chose du genre on est en plein festival, mais on ne connaît toujours pas toutes les distributions... Maintenant, ces distributions risquent de rester secrètes à tout jamais.
Comme cette édition du festival ne commençait pas par une nouveauté, j’ai manqué la soirée d’ouverture sans aucun regret (comme je le croyais en ce moment-là). Pourtant, j’aime bien ce que fait Ratmanski en général et j’apprécie particulièrement son Concerto DSCH. Mais on devait avoir une autre occasion de revoir ce ballet vers la fin du festival, qui, cette année s’est avéré riche en spectacles (ou distributions) pas trop intéressants, qui ne font pas courir même les inconditionnels du Mariinski. Maintenant, le théâtre a promis de reporter les spectacles initialement prévus en mars pour la fin de la saison ou pour la saison prochaine, donc qui vivra verra. Olga Smirnova a déclaré une fois qu’elle était prête à se produire au Mariinski autant de fois que le théâtre l’invite. On garde donc l’espoir de voir sa Giselle prochainement. Jamais deux sans trois comme on dit en France. Une soirée au programme identique à la deuxième soirée Ratmanski du festival a été prévu en avril. Mais les spectateurs, complètement déboussolés par une suite de décisions administratives à effet domino arrivées en moins d’une semaine, ne semblent plus partager l’optimisme de l’administration du théâtre. Si toutefois les spectacles d’avril seront maintenus, Sept sonates d’Aleksei Ratmanski fera son entrée au répertoire de la compagnie le 14 avril.
Pour moi, le festival a commencé avec La Bayadère que j’ai hésité d’aller voir, mais je n’ai pas suivi mon instinct, hélas (ou heureusement, je ne sais plus). Le spectacle a été assez moyen, notamment, en ce qui concerne les personnages principaux. Seuls quelques solistes du second plan et l’incomparable corps de ballet ont été à la hauteur de ce qu’on attend d’un ballet classique au Mariinski en général et pendant la période du festival en particulier.
D’abord, du bon. Les solistes de la danse Djampé, la jeune Alexandra Khiteeva, qui ne fait que sa première saison au théâtre, et l’expérimentée Iana Selina possèdent toutes les deux un charme scénique hors de commun. Les voir danser à "l’unisson" est un véritable régal pour un balletomane. On a également eu plaisir de retrouver Alexandra Khiteeva dans le "Royaume des ombres" où elle s’est produite en deuxième variation. May Nagahisa, la gracieuse troisième ombre, a fait la démonstration d’une danse ciselée en marquant bien les poses.
Victor Caixeta a été assez enthousiasmant en idole dorée qu’il ne dansait que pour la deuxième fois (ses débuts ont eu lieu le 29 janvier dernier). Les sauts bien maîtrisés, malgré quelques légers déséquilibres esquivés lors des réceptions sur un genou, le travail graphique des bras (un progrès bien visible a été fait de ce côté-là) et une série de pirouettes à la place des balancements traditionnels au milieu de petits négrillons (parmi lesquels il y avait, je crois, une fillette). Dans la danse "Manou", la rayonnante Tamara Guimadieva a été entourée de deux toutes jeunes élèves de l’Académie Vaganova (en première année, semble-t-il), dont une a encore la morphologie d’un bébé. Et bien sûr Vladimir Ponomarev, toujours irremplaçable dans le rôle du Grand Brahmane épris de la belle Bayadère. Sa passion n’est pas passagère. L’aveuglement qu’elle a causé a coûté la vie à la pauvre Nikiya et ça tourmentera le Grand Brahmane jusqu’à ses dernières jets jours. (Je ne comprends pas pourquoi à l’ONP ce personnage ressemble à une statue ambulante.) Dans ce spectacle du 12 mars, c’est sans doute lui qui aurait mérité l’amour de Nikiya, mais elle a offert son cœur à un autre. Mais qu’est-ce qu’elle lui a trouvé à ce Solor ? La jeunesse ? Peut-être. Le courage ? Je ne pense pas. Un demi regard du Radja a suffi pour l’arrêter quand il a essayé de venir au secours de sa (ex ?) bien-aimée. La force ? Je ne sais pas. Pour un tigre en peluche il était peut-être assez fort, mais pas pour une cabriole quelque peu impressionnante. En fait, il était très bien avec sa nouvelle fiancée couronnée pendant tout le grand pas de noces : insouciant, souriant, Gamzatti n’avait pas besoin de faire d’efforts pour avoir sa disposition. Même les portés avec la fille du Radja étaient mieux réussis qu’avec Nikiya au troisième acte. La légèreté avec laquelle il l’a soulevée ne laissait aucun doute : ils sont faits l’un pour l’autre. Si seulement Nikiya n’était pas venue à ce mariage il auraient pu vivre ensemble longtemps et heureux. Son arrivée a apporté un trouble inutile au mariage princier. Monsieur a eu un peu honte, il a baissé les yeux, mais ayant aussitôt oublié pourquoi, il a commencé à suivre la danse de la bayadère. Même la mort de Nikiya n’a pas dû le bouleverser. En tout cas, on n’a remarqué aucune émotion particulière lors de leur rencontre dans le Royaume des ombres. En fait, Gamzatti, Nikiya, brune ou blonde - quelle différence ? Il a mieux à la maison. Mais sérieusement, ce spectacle a montré que parmi les danseurs étoiles du Mariinski il y a Chkliarov, Kim et tous les autres. Pourtant, on a déjà vu Timour Askerov plus enthousiasmant que ça. Peut-être une autre fois... J’espère que quelqu’un de ces autres aura bientôt l’occasion et le pouvoir de me faire changer d’avis.
Quant à deux rivales, elles mériteraient un autre Solor ce soir-là, pour mieux briller à ses côtés, surtout Alina Somova. Anastassia Matvienko est toujours aussi convaincante dans la pantomime du second tableau. La beauté de Nikiya lui a gâché l’humeur. Mais ce qui lui a surtout rabaissé l’orgueil c’est le refus de Nikiya d’échanger Solor contre ses bijoux. Ça l’a même fait douter un petit instant de la qualité de ses joyaux. La querelle entre les deux beautés a frôlé le naturisme. Bien évidemment, pas question de roulade par terre au Mariinski, mais Gamzatti s’est bien accrochée à la bayadère avant de tomber par terre et ça ne semblait pas théâtral.
Le rôle de Nikiya va très bien à Alina Somova. Ici, elle nous épargne de petites minauderies qui peuvent être tellement fatigantes dans certains de ses rôles. Avec un autre Solor (ou le même, mais en meilleur forme physique et émotionnel), sa prestation aurait peut-être été plus mémorable. Mais tout ce que j’ai retenu d’elle dans ce spectacle c’est belle, belle, infiniment belle... Le maquillage un peu plus prononcé que d’habitude a magnifié sa beauté naturelle. Mais côté danse... Ce n’est pas qu’elle ne danse pas bien (j’ignore si quelqu’un oserait dire le contraire) mais, à mon sens, le titre de Ballerina ("étoile") du Mariinski suppose que celle qui le détient crée une harmonie par sa danse. Alina Somova en est bien capable, mais elle ne le fait pas toujours malheureusement. Parfois, elle laisse l’impression du non fini, du non dit. Mais je n’exclus pas que mon niveau d’attente est peut-être exagéré...
Quoi qu’il en soit les Ombres sont toujours aussi magiques au Mariinski. Ces créatures immatérielles avec leur descente et l’adagio d’une beauté irréelle expient tout ce qui a pu déplaire (ou pas assez plaire) au cours du spectacle...
Et pendant ce temps-là, dans la petite salle Prokofiev du Mariinski 2, dans le cadre du programme off du festival, se passait une rencontre du public avec Viktoria Terechkina et Alexandre Sergueev. Initialement, le théâtre avait prévu de l’organiser dans le grand foyer du bâtiment historique, une heure avant La Bayadère. Mais, soit suite aux plaintes des balletomanes mécontents de devoir acheter un billet pour le spectacle afin d’accéder à la rencontre avec les artistes qui n’ont rien à voir avec ce spectacle, soit pour d’autres raisons, mais le théâtre a reporté la rencontre dans un autre bâtiment et à l’heure qui coïncidait avec celui du spectacle. Ceux qui n’avaient pas de billets pour La Bayadère et ne voulaient pas en acheter se réjouissaient en remerciant le théâtre, ceux qui les avaient, dont moi, et surtout ceux qui les ont acheté exprès à cause de la rencontre annoncée s’indignaient. Ce qui s’est passé m’a donné envie de poser une question un peu séditieuse à l’administration du théâtre : estime-t-on au Mariinski que la distribution Somova - Askerov est une distribution pour les "touristes", incapable d’intéresser les véritables amateurs de la danse, ceux qui ne voudraient surtout pas rater une rencontre avec Terechkina et Sergueev ? Si la réponse est affirmative, pourquoi elle n’est pas confirmée par la grille hiérarchique ? Et si elle est négative pourquoi cette aberration de la programmation ?
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